Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Chronique abrégée (la)

Les grandes chroniques royales éthiopiennes fournissent les annales détaillées de la monarchie depuis le XIVe s., mais elles n'existent pas pour chaque règne et varient considérablement d'importance et de caractère de l'une à l'autre. La Chronique abrégée offre, au contraire, un récit continu de toute l'histoire éthiopienne, en remontant jusqu'aux origines mythiques de la dynastie « salomonide ». Les notices sont très brèves jusqu'au XVIe s. et s'étoffent ensuite pour constituer une véritable chronique au jour le jour à partir du règne de Iyasu Ier (1682-1706). L'œuvre a probablement été composée au milieu du XVIIIe s. par des compilateurs, mais elle n'est nullement un abrégé des anciennes chroniques royales dont elle diffère souvent fortement. Elle provient d'une autre source : la tradition orale ecclésiastique conservée plus particulièrement par les moines qui constituent le milieu lettré et savant où s'est élaborée la littérature éthiopienne. Ce n'est pas un texte clos, puisque certains manuscrits la prolongent jusqu'à la fin du XIXe s. et que d'autres y ont interpolé des adjonctions importantes, notamment un traité du cérémonial de cour (le Ser 'ata Mangest) et un bref roman sur la chute des Zâgwê (la Richesse des rois). Dans cette perspective, il serait donc plus juste de parler de « chroniques abrégées ».

Chronique des Empereurs

Poème historique en moyen haut allemand, écrit v. 1150 à Ratisbonne et longtemps attribué (à tort semble-t-il) au clerc Conrad, auteur entre 1130 et 1170 d'une adaptation de la Chanson de Roland.

La chronique relate « l'histoire des papes et des rois », depuis la fondation de Rome jusqu'à Conrad III, et se termine sur Bernard de Clairvaux prêchant la deuxième croisade (1147). L'histoire présente la victoire du christianisme sur le paganisme et la réalisation du royaume de Dieu sur terre par l'entremise des souverains temporels, auxquels on propose en modèle la figure idéalisée de Charlemagne.

Chroniques (livres des)

En hébreu Dibrê hayyamim, c'est-à-dire : « événements » ou « actes des jours ». Ces livres bibliques ont dû atteindre leur forme définitive vers la fin du IVe s. av. J.-C. Ce sont les deux derniers livres du canon hébraïque. Les Chroniques s'ouvrent sur une table généalogique, commençant avec Adam, et se terminent par les préliminaires du retour de l'Exil. On les divise ordinairement en quatre parties : d'Adam à David (I Ch., I-IX), David (XI-XXIX), Salomon (II Ch., I-IX), les rois de Juda (X-XXXVI). Pour construire son œuvre, le chroniqueur s'est servi de nombreuses sources. La principale est constituée par les livres de la Genèse, des Nombres, de Samuel et des Rois qu'il utilise librement. Mais il se réfère aussi à plusieurs autres ouvrages non bibliques, une vingtaine, dont aucun ne nous est parvenu. C'est en théologien que cet auteur écrit l'histoire. À la lumière des expériences passées et principalement de l'expérience de la dynastie davidique, il élabore les conditions du royaume idéal et projette sur l'époque de David l'organisation culturelle qu'il a sous les yeux, celle de la fin de l'époque perse.

Chuchtari (Abul-Hasan Ali al-)

Mystique et poète arabe (Cadix v. 1212 – Damiette 1269).

Fortement influencé par Ibn Sab'in, il est l'auteur de qasida, mais aussi de muwachchah et de zadjal, à la manière d'Ibn al-'Arabi, et a été lui-même par la suite commenté par al-Nabulusi.

Chukri (Abd al-Rahman)

Poète égyptien (Port-Saïd 1886 – Alexandrie 1958).

Membre du groupe du Dîwân avec al-'Aqqâd et Mâzinî, il laisse une œuvre novatrice (Dîwân en 7 volumes, 1909 à 1919), fortement influencée par le romantisme anglais.

Chukri (Muhammad)

Romancier marocain (Beni Chikar 1935 – Rabat 2003).

Obligé de quitter sa famille à 11 ans et de se débrouiller seul, il n'apprend à lire qu'à 20 ans, devient enseignant, puis journaliste, et se consacre aujourd'hui entièrement à l'écriture. La parution de son autobiographie (le Pain nu, 1982) fit scandale car il y heurtait l'opinion arabe en décrivant avec un réalisme cru le monde de la marginalité à Tanger. Il récidivait en lui donnant une suite (le Temps des erreurs, 1993). Il est aussi l'auteur de nouvelles (le Fou des roses, 1978), décrivant la misère ordinaire, l'alcool, la prostitution.

Chumayyil (Chibli al-)

Écrivain libanais (1860 – 1917).

Fixé en Égypte, il publia la revue al-Chifa' (1886-1891), puis al-Mustaqbal, avec Salâma Mûsâ (1914). Il y diffusa ses idées socialistes, laïques, et diffusa les thèses de Darwîn en Orient, suscitant de fortes polémiques. Il a composé aussi un roman et une pièce de théâtre (la Grande tragédie, 1915).

Churchill (Caryl)

Auteur dramatique anglais (Londres 1938).

Cet auteur original est l'une des principales représentantes du théâtre féministe anglais, apparu dans les années 1970. Les œuvres de Caryl Churchill se penchent sur le statut de la femme dans la société moderne, mais sans naturalisme. Au contraire, elles font preuve d'un goût pour l'innovation dramaturgique postbrechtienne. Top Girls (1982) réunit autour d'une table les femmes célèbres des siècles passés. Le Skriker (1994) emprunte son personnage principal aux légendes celtiques ; tandis que les héroïnes parlent une langue quotidienne, le Skriker, créature maléfique, s'exprime en vers. Churchill mène une réflexion sur l'Histoire en abordant des pages peu glorieuses du passé britannique (procès de sorcières, colonialisme) et dénonce toutes les ségrégations, selon le sexe, la race ou la classe sociale.

chuubiyya

Mot arabe tiré du pluriel (chu'ub) de cha'b (peuple) et désignant, dans l'Islam médiéval, aussi bien en Andalousie qu'au Proche-Orient, un mouvement généralement supporté par des non-Arabes (Sahl Ibn Harun, Ibn Gharsiya), lesquels, pour mieux affirmer leur culture propre, entendent rappeler aux Arabes leurs origines fort modestes (vie fruste et sans éclat dans le désert). Des auteurs comme al-Djahiz, Ibn Qutayba ou Ibn 'Abd Rabbih se sont attachés, eux, à leur donner la réplique, transposant ce débat dans leur production littéraire.