Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
U

underground

Le terme désigne toute œuvre diffusée par des moyens qui échappent aux circuits de commercialisation établis et aux conventions que ceux-ci imposent. Il renvoie aussi à la thématique de ces œuvres, à leurs auteurs et à leur public, identifiés plus largement durant les années 1960-1970 au phénomène américain de la contre-culture. Le terme caractérise des modes d'expression qui rejettent les valeurs dominantes de la société américaine. Les choix esthétiques et moraux de l'underground – spontanéité, attrait pour le fantastique et l'hallucinatoire, subjectivisme, liberté sexuelle, excentricité vestimentaire, usage de la drogue, apologie de la pauvreté, mysticisme et contemplation – sont ceux de l'anticonformisme et de la marginalité. L'underground a ses héros littéraires (Kerouac, Ginsberg) et ses vedettes (Paul Morissey), ses villes (New York, San Francisco), ses quartiers. Toutefois, l'underground est aussi une mode, avec sa presse et ses signes culturels de reconnaissance.

Undset (Sigrid)

Femme de lettres norvégienne (Kalundborg, Danemark, 1882 – Lillehammer 1949).

Elle consacra un premier roman  à la vie grise et terne des femmes aux prises avec le travail (Madame Martha Oulie et ses voisines, 1907), tout en manifestant son intérêt pour les anciennes sagas islandaises qu'il lui arriva de traduire en norvégien (Vigdis la farouche, 1909). Joignant un art consommé de la narration à un réalisme vigoureux, elle condamne l'amour libre (Jenny, 1911), souligne les devoirs de la femme au foyer (Printemps, 1914 ; les Vierges sages, 1918). Profondément attirée par le prestigieux passé de son pays et soucieuse d'analyse morale et religieuse, elle publie Kristin Lavransdatter (1920-1922), trilogie romanesque formée de la Couronne (1920), la Femme (1921) et la Croix (1922) : récit de la conversion d'une femme ardente et fière au milieu des intrigues et des violences d'un XIVe s. reconstitué. Cette préoccupation religieuse aboutit à sa propre conversion au catholicisme (1925), au terme d'un itinéraire spirituel qu'elle retrace dans des romans de thèmes contemporains (Gymnadenia, 1929 ; le Buisson ardent, 1930 ; la Femme fidèle, 1936) et dans un roman historique (Madame Dorthea, 1939). Ayant dénoncé le nazisme et s'étant réfugiée aux États-Unis lors de l'occupation allemande, elle soutint activement la résistance norvégienne (Retour à l'avenir, 1945 ; Jours heureux en Norvège, 1947). L'œuvre de Sigrid Undset fut couronnée par le prix Nobel (1928).

Ungaretti (Giuseppe)

Écrivain italien (Alexandrie, Égypte, 1888 – Milan 1970).

Il vit jusqu'en 1912 en Égypte puis à Paris, où il découvre et rejoint les avant-gardes française et italienne. Il s'établit à Milan puis combat sur le Carso et en Champagne. En 1936, il part pour le Brésil, où il tient, jusqu'en 1942, la chaire de langue et de littérature italienne à l'université de São Paulo. L'œuvre poétique d'Ungaretti a été réunie en 1969 sous le titre : Vie d'un homme. Elle retrouve la tradition poétique italienne, passe d'une structure éclatée enracinée dans la voix à une combinatoire baroque et maniériste qui fait de lui le chef de file de l'hermétisme. La valeur inaugurale de l'Allégresse (titre de l'édition définitive de 1943, qui regroupe ses poèmes de guerre le Port enseveli, 1916, et Allégresse de naufrages, 1919) dans la poésie moderne italienne tient à ce que la rupture formelle y coïncide avec une expérience radicale du dénuement. Dans le désastre de la guerre, la parole poétique apparaît à Ungaretti comme l'unique recours de l'homme, son « lieu innocent ». Parole primordiale éludant la syntaxe pour mettre à nu le pur phénomène de son énonciation et conférant aux énoncés les plus quotidiens une force et une évidence oraculaires. Avec Sentiment du temps (1933), il retrouve le baroque figuratif de Rome, la rhétorique du Tasse, de Shakespeare ou de Góngora et la symbolique de la vie et de la mort, du temps, de l'érotisme funèbre. À la méditation historique et métaphysique de Sentiment du temps (la mort de l'homme y coïncide avec la mort de la civilisation) se substituent une inspiration autobiographique de plus en plus fragmentée (la Douleur, 1947 ; le Pauvre dans la ville, 1949 ; un Cri et des paysages (1952) et la quête mythique d'une nouvelle patrie (la Terre promise, 1950 ; À partir du désert (1961). Ungaretti fut aussi critique et traducteur, en particulier de Ponge, de Mallarmé et de Blake.

Uno Chiyo

Romancière japonaise (Yamaguchi 1897 – Tokyo 1996).

À Tokyo, où elle faisait divers métiers, elle rencontra Akutagawa, qui joua un rôle déterminant dans sa vocation littéraire. Le Visage fardé (1921) marque ses débuts d'écrivain. Connue aussi pour ses passions amoureuses avec des artistes et des auteurs, elle continua à produire des œuvres d'une grande finesse féminine, souvent d'inspiration autobiographique : Confessions amoureuses, 1935 ; Récit de ma jeunesse, 1947 ; Ohan, 1946-1957 ; la Piqûre, 1966 ; Une femme raconte, 1972 ; Serait-ce le vent d'hiver ?, 1979 ; et son autobiographie écrite à 86 ans et devenue un best-seller, Je vais vivre, 1983.

Unruh (Fritz von)

Écrivain allemand (Coblence 1885 – Diez, Lahn, 1970).

Officier prussien, il quitte l'armée dès 1911 pour devenir écrivain. Il se rend célèbre avec Officiers (1911). La Première Guerre mondiale fait de lui un pacifiste militant et lui inspire ses meilleures œuvres, notamment le récit Verdun (1916), ainsi que des pièces expressionnistes (Une famille, 1918 ; la Citadelle, 1920 ; Dietrich, 1936). Il émigre à Paris en 1932, puis aux États-Unis. Ses romans (Ce n'est pas encore la fin, 1949 ; le Saint, 1952) et son autobiographie (le Fils du Général, 1957 ; Dans la demeure du Prince, 1967) témoignent d'une époque de folie meurtrière et d'une personnalité hors du commun.

Unt (Mati)

Écrivain estonien (Linnamäe 1944).

Après un roman naïf (Adieu, chat jaune, 1963) décrivant les états d'âme d'un jeune lycéen, il contribue à détacher la prose estonienne du réalisme socialiste en y faisant s'épanouir la subjectivité et l'ironie (la Dette, 1964 ; Meurtre à l'hôtel, 1969). À partir des années 1970, il pratique une narration éclatée, parasitée par une érudition parodique. La place de l'individu dans la société, l'angoisse générée par la solitude ou par des relations amoureuses qui vacillent constituent alors ses thèmes de prédilection (Rivage désert, 1972 ; le Bal d'automne, 1979). Dans les années 1980 et 1990, l'intertextualité devient la dimension dominante de ses œuvres (l'Aide-mémoire du donneur de sang, 1990 ; Brecht apparaît la nuit, 1997).