Congreve (William)
Auteur dramatique anglais (Bardsey, près de Leeds, 1670 – Londres 1729).
Formé en Irlande, patronné par Swift et Dryden, il se veut tragique (la Fiancée en deuil, 1697), mais réussit dans la comédie cynique (Ainsi va le monde, 1700). L'engouement mondain de ses pièces évoquant avec un pessimisme subtil, pour le public antipuritain de Londres, la guerre des sexes (Amour pour amour, 1695) provoqua une vive campagne « antilicencieuse » menée par Jeremy Collier (1698). Également librettiste d'opéras à l'italienne, il mourut aveugle.
Connelly (Michael)
Écrivain américain (Philadelphie 1956).
Lauréat du prix Pulitzer comme chroniqueur judiciaire, il fait sensation avec les Égouts de Los Angeles (1992), où évolue son inspecteur Harry (Hieronymus) Bosch, souvent en conflit avec ses supérieurs dans sa recherche de la vérité. Les références à la peinture ou à la littérature – comme Edgar Poe, dans le Poète (1996) – permettent à Connelly de transcender le roman noir. Il obtient divers prix aux États-Unis puis en France, dont le grand prix de Littérature policière 1999 pour Créance de sang.
Connor (Charles William Gordon, dit Ralph)
Écrivain canadien d'expression anglaise (Indian Lands, Glengarry, 1860 – Winnipeg 1937).
Pasteur dans des villes minières, dans des camps de bûcherons, dans la prairie et sur le front durant la Première Guerre mondiale, il s'attache dans ses romans assez mélodramatiques (Black Rock, une aventure des Selkirk, 1898 ; le Pilote de l'air, un conte des Foot-Hills, 1899 ; l'Étranger, 1909 ; On ne prête qu'aux riches, 1921 ; le Bras d'or, 1932) à revendiquer une plus grande justice sociale.
Conort (Benoît)
Poète français (Villeneuve-sur-Lot 1956).
Dès Pour une île à venir (1988), recueil très remarqué, ses pages sont criblées d'une violence expressionniste, physique. À ras de corps, les images en sont angoissées, désespérées. D'où cette teinte noire qui prend le lecteur à la gorge (Au-delà des cercles, 1992). Captive d'une Main de nuit (1998), la poésie refuse de se nourrir d'espoir. Elle s'adosse frontale au néant. Conort est par ailleurs spécialiste de Jouve et collaborateur de la revue le Nouveau Recueil. Parler à son sujet de poète maudit serait peut-être trop dire mais, à lui seul, ou plus qu'un autre, ou encore avec d'autres (Goffette), il incarne ce versant moderne que l'on pourrait nommer lyrisme noir. Et si la rhapsodie de Cette vie est la nôtre (2001) casse les formes, et la langue, elle en vient au même constat noir, acéré, finalement douloureux : la poésie ne peut rien.
Conrad (Józef Konrad Korzeniowski, dit Joseph)
Écrivain anglais d'origine polonaise (Berditchev, Ukraine 1857 – Bishopsbourne, Kent, 1924).
De 3 à 10 ans, il partage l'exil politique de son père, aristocrate nationaliste, traducteur de Hugo. À 17 ans, il se sépare de la « cause perdue » (la Pologne), gagne Marseille : il vend des armes aux carlistes, saborde son navire, passe en Angleterre (1878) après un duel, obtient la nationalité anglaise (1886) et s'ennuie dignement dans la marine marchande malgré le « charme » colonial (Malaisie, Congo). En 1894, il abandonne sa tenue d'officier, se marie et bifurque vers la littérature. On le compare bientôt à Kipling : exotisme, aventure et vertus marines (fidélité, responsabilité, célibat). Il chante dans une langue somptueuse et livresque le sublime victorien : servir. Avec son héros stoïcien au masque impénétrable, le Nègre du « Narcisse » (1897) annonce Cœur des ténèbres (1902) : la peur de mourir, la soif du pouvoir, la fascination de l'épreuve se conjuguent pour faire resurgir la brute dans l'homme blanc. Désormais aux antipodes de Kipling, il illustre les dégâts du colonialisme sur la psyché occidentale. Nostromo (1904) prédit l'accès à la brutalité capitaliste du continent sud-américain. L'Agent secret (1907) analyse le désir de trahison caché dans le ressentiment anarchiste. Sous les yeux d'Occident (1911) dit le drame du délateur et la perversité commune de la police tsariste et des révolutionnaires. Partout une passion : trahir, être trahi, se trahir. Jim déserte le bateau dont il a charge, passe sa vie à expier, puis répète sa trahison (Lord Jim, 1900). L'irrémédiable, c'est la confiance des autres, le désir d'agir, d'aider, d'aimer : « Quiconque forme un lien est perdu. » (Une victoire, 1915). L'horreur, c'est de lire sa propre imposture dans le regard d'une femme, « dans un monde qui donne à l'amour même le visage de la trahison ». Fasciné par la honte, paralysé par la terreur de l'émotion et l'impudeur des vulnérables, le héros conradien vit le dos tourné à la vie, faux-frère figé dans la grandeur symbolique (ou dérisoire) de la conscience malheureuse de notre temps.
Conradi (Hermann)
Écrivain allemand (Jessnitz 1862 – Würzburg 1890).
Il a contribué à l'avènement de la révolution littéraire de 1890 en Allemagne, par sa préface à une anthologie publiée en 1885 avec Karl Henckell : les Poètes modernes. Il y fustige l'hypocrisie de son temps et réclame un art qui retrouve le sens de la vérité humaine, un nouveau « temps des génies ». Par ses invectives, Conradi est proche de Nietzsche et du « Kulturpessimismus ». Ses poèmes (Chants d'un pécheur, 1887) et son roman Adam l'homme (1889), qui peint l'artiste en martyr d'une société dirigée par le bourgeois, traduisent le désarroi de toute une génération.
Conrart (Valentin)
Homme de lettres français (Paris 1603 – id. 1675).
Les réunions de lettrés qu'il abritait chez lui donnèrent, sur le désir de Richelieu, naissance à l'Académie française, dont il fut le premier secrétaire perpétuel. Il joua un rôle important d'« expert » dans la vie littéraire, par exemple dans l'élaboration des Sentiments de l'Académie sur le Cid (1637). Il a laissé des Lettres (publiées en 1681) et, surtout, un volumineux fonds de manuscrits et de documents.
Conscience (Hendrik)
Écrivain belge d'expression néerlandaise (Anvers 1812 – Bruxelles 1883).
Il exerça sur la culture flamande une influence décisive par ses romans historiques d'inspiration romantique, notamment le Lion de Flandre (1838), un des chefs-d'œuvre du roman historique romantique, qui représente un jalon majeur dans le renouveau du nationalisme flamand. Il laisse également des tableaux de mœurs rustiques ou bourgeoises (le Conscrit, 1850 ; le Fléau du village, 1855 ; le Gant perdu, 1872).