Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
F

Firenzuola (Agnolo)

Écrivain italien (Florence 1493 – Prato 1543).

Moraliste et conteur soucieux de purisme linguistique, il mêle dans ses Discours sur l'amour (1523-1524) des nouvelles licencieuses, sur le modèle de Boccace, à un traité de l'amour platonique.

Firuzabadi (Abu al-Tahir Muhammad al-)

Écrivain et lexicographe arabe (Kazarun 1329 – Zabid 1415).

Grand voyageur (il vécut à Jérusalem, à La Mecque, en Inde et au Yémen), il est l'auteur d'un dictionnaire, le Qamus, véritable trésor de la langue arabe classique.

Fischart (Johannes)

Humaniste alsacien de langue allemande (Strasbourg v. 1546 – Forbach v. 1590).

Bourgeois cultivé, il s'en prend volontiers aux petits travers de ses concitoyens, des femmes surtout (Flöhhatz, 1573 ; Petit Livre de consolation à l'usage des goutteux, 1577). Mais, en protestant fervent, il réserve ses flèches les plus acérées à l'Église catholique et aux jésuites (la Ruche, 1575). En adaptant Gargantua en allemand (Déformation de l'histoire, 1575), il prend parfois des libertés avec son modèle, mais se montre digne de Rabelais par une érudition et une imagination verbale apparemment sans limites.

Fischer (Otokar) , dit aussi Otokar Frey

Écrivain tchèque (Kolín 1883 – Prague 1938).

Directeur du Théâtre national, essayiste (Sur le drame, 1919 ; l'Âme et le Verbe, 1929 ; le Verbe et le Monde, 1937), il évoque dans son œuvre poétique (le Buisson ardent, 1918 ; Rapides, 1931) la violence du monde moderne et le drame personnel de l'écrivain juif (l'Hôte, 1937 ; Derniers Poèmes, 1938).

Fishta (Gjergj)

Écrivain et homme politique albanais (Fishta, près de Shkodër, 1871 – Shkodër 1940).

Moine franciscain, directeur de l'école française de Shkodër, membre de l'Académie d'Italie. Traducteur de nombreux auteurs étrangers, il est surtout connu pour son épopée la Lahuta de la montagne (1905-1907), inspirée des thèmes folkloriques du Nord. On lui doit aussi des poésies satiriques (les Guêpes de Parnasse) et lyriques (les Danses du paradis).

Fitzgerald (Edward)

Écrivain anglais (Bredfield, Suffolk, 1809 – Merton, Suffolk, 1883).

Ami de Tennyson et de Carlyle, il donne un dialogue philosophique sur la jeunesse (Euphranor, 1851), rassemble sentences et proverbes dans Polonius (1852), avant d'exprimer, sous le masque du lyrisme oriental, sa haine du Dieu des victoriens – déguisé en Allah du XIe siècle – et son goût du plaisir : son adaptation des rubaiyyat de 'Umar Khayyam (publiée anonymement en 1859) aura une influence décisive sur la révolte des préraphaélites et de l'homosexualité « esthète ».

Fitzgerald (Francis Scott)

Écrivain américain (Saint Paul, Minnesota, 1896 – Hollywood 1940).

En une œuvre qui recueille la splendeur des années 1920 et la folie de l'âge du jazz, puis qui fait entendre les bruits de la ruine personnelle et ceux du malheur américain, Fitzgerald dit exemplairement la « génération perdue » et les incertitudes de l'histoire nationale. De l'Envers du paradis (1920) au Dernier Nabab (1941), inachevé à la mort de l'auteur, on trouve le sentiment de la catastrophe, qui appelle un inévitable romantisme. Cette vocation de l'échec exige la splendeur de la fête, à New York, à Paris, à Antibes, toujours évoquée dans les romans (les Heureux et les Damnés, 1922 ; Gatsby le Magnifique, 1925 ; Tendre est la nuit, 1934) et dans les nouvelles (Agitateurs et philosophes, 1920 ; les Enfants du jazz, 1922 ; Tous les jeunes hommes tristes, 1926 ; Un diamant gros comme le Ritz, 1935 ; Nouvelles, 1951). La fête réalise les promesses de la richesse, et exhibe cette dépense par laquelle l'artifice de la beauté rejoint la certitude de la ruine. Chaque récit retient ainsi la fable de la success story américaine, qui, de Saint-Paul à Princeton et jusqu'au monde des lettres, motive Fitzgerald. La fable est encore une leçon où jouent entre elles les diverses fictions nationales : dans ce jeu se perdent ou meurent Gatsby, Dick Diver, Monroe Stahr. Le succès fait de tout homme un roi découronné. L'écrivain à Hollywood, au plus près des images du rêve américain (Histoire de Pat Hobby, 1962), peut seulement dire son impuissance et répéter l'évidence de « l'affreux gâchis ».

   Il y a là l'histoire d'une vie, du succès précoce à la mort précoce, du talent à l'alcoolisme ; un argument romanesque continu et un imaginaire qui se saisit des fatalités de l'histoire nationale, esquisse de généalogies mythiques, dans les figures de la femme et de la « terre gaste ». L'Envers du paradis porte un constat ineffaçable : il n'est jamais donné au héros de Fitzgerald de devenir un certain type d'homme. La critique du rêve romantique défait l'égotisme en une sorte de roman picaresque américain qui appelle la reconnaissance des grandes images culturelles. Les Heureux et les Damnés montrent que l'écrivain ne peut s'engager dans la simple peinture de l'opposition de l'individu et de la société, car ce serait s'attacher à l'analyse d'une détérioration psychologique et affirmer, de manière vaine, le primat de la nostalgie. Gatsby le Magnifique donne son véritable ton à l'œuvre. À la caractérisation du héros il associe une ambivalence essentielle : héros exemplaire, déchu ou coquin, qui commande le rappel du rêve américain et de ses ambiguïtés et prête au récit une double typologie, celle de la satire et celle de la romance. Quête et combat avec le mal, exaltation du héros, mais aussi futilité et cauchemar, Gatsby expose ces traits antinomiques du récit et Nick Carraway, le narrateur, les évoque dans l'aporie morale. Le roman devient un palimpseste de fictions, celle de la satire et de la romance, celle du récit même qui s'inscrit dans la fiction du rêve national. Fitzgerald légitime ainsi l'entreprise littéraire : restituer le pouvoir issu de l'émerveillement face à un continent neuf, et, plus encore, retrouver l'économie du monde en disant l'échec du rêve, qui est déjà une image pour ordonner le chaos. Avec Tendre est la nuit, la référence psychanalytique et la fiction de la malade amoureuse de son thérapeute permettent de définir ces ambivalences en termes psychologiques et de fondre les éléments du drame américain dans un drame privé. Le roman présente les points antithétiques comme assimilables les uns aux autres : le médecin est un malade. La référence européenne et la fiction de l'expatriation disent, par une stricte réversion, l'Histoire, qui n'est plus la promesse du Nouveau Monde, mais la catastrophe de la guerre. Le Dernier Nabab reprend cette thématique dans l'évocation d'Hollywood. Le personnage de Monroe Stahr, le producteur de cinéma, est le seul héros de Fitzgerald qui, ayant défini et réalisé son rêve, soit sorti de ce rêve pour tout recommencer. Le Dernier Nabab dit que la recherche d'un ordre, à défaut de toucher à l'absolu, appelle la répétition éternelle. L'échec conduit à la consolation du temps mythique, comme la construction rétrospective des romans permettait déjà de rendre l'instant immobile.