Joubert (Jean)
Poète français (Châlette-sur-Loing 1928).
Il est attentif aux manifestations de la vie : « il n'est de poésie que du réel ». Tout, et d'abord l'imaginaire ou la langue, vient de là. La lumière du Sud et la présence très forte de la Méditerranée, le monde américain, vécu puis enseigné, la vie des hommes (soi, et au-delà, l'universel de tous) autant que les toiles des peintres aimés, notamment modernes (Cinquante Toiles pour un espace blanc, 1981), ou les poètes qu'il goûte, éclairent sa palette poétique et une œuvre accessible et exigeante, qui n'oublie jamais cet autre par excellence qu'est le lecteur. Tracée d'un recueil l'autre d'Une main de feu (1993), l'œuvre oscille entre conscience du terrible et émerveillement. Joubert a publié des romans (l'Homme de sable, 1975, prix Renaudot) et publié en 1997 une anthologie personnelle qui établit la cohérence de son propos.
Joubert (Joseph)
Moraliste français (Montignac, Dordogne, 1754 – Villeneuve-sur-Yonne 1824).
Inspiré par la philosophie des Lumières, il fut un proche de Chateaubriand qui publia, en 1838, sous le titre Pensées, une partie des notes que son ami tenait, en moraliste et en critique, sur ses expériences et ses lectures. Ces Carnets, qui ne parurent intégralement qu'en 1938, constituent l'essentiel de l'œuvre d'une « âme qui a rencontré par hasard un corps et qui s'en tire comme elle peut ». Grand lecteur de Platon, écrivain épris d'excellence, Joubert fait du fragment l'instrument délicat d'une poétique où le romantisme saura puiser tant des leçons de style que des questions fondamentales sur les fonctions et le devenir de la littérature.
Joubert (Laurent)
Médecin et écrivain français (Valence 1529 – Lombert 1582).
Il enseigna la médecine à Montpellier, avant de devenir médecin du roi de Navarre, puis de Charles IX. On lui doit plusieurs ouvrages de médecine en latin et en français, dont un Paradoxum demonstrationum medicinalium liber (1561), un traité sur les Erreurs populaires en fait de la médecine et régime de santé (1578), et un Traité des causes du rire (1560), accompagné de l'exposé d'un système d'orthographe phonétique.
Jouet (Jacques)
Écrivain français (Viry-Châtillon 1947).
Membre de l'Oulipo depuis 1983, il exploite dans ses poèmes, romans, nouvelles, pièces de théâtre ou essais (sur les mots du corps, le pantoum ou Raymond Queneau) les possibilités formelles, ludiques ou narratives de la langue. Fins (1999) applique la forme de la sextine (qui fait pivoter six fois six éléments) à un roman de 216 paragraphes. 107 âmes (1991) est un recueil de 107 poèmes-portraits rédigés selon une même contrainte : partir des éléments biographiques contenus dans un questionnaire. Dans Navet, linge, œil-de-vieux (1998), son journal en poèmes tenu quotidiennement durant quatre ans avec, devant lui, les trois objets éponymes se déploie sur mille pages et trois volumes.
Jouffroy (Alain)
Écrivain français (Paris 1928).
Ses récits autobiographiques (le Roman vécu, 1978), son œuvre poétique (l'Ordre discontinu, id.) et romanesque (Un rêve plus long que la nuit, 1964 ; l'Indiscrétion faite à Charlotte, 1980) s'attachent à cerner l'engagement révolutionnaire du poète par le langage. Il participe à « la trajectoire invisible des idées révolutionnaires », ce « fil rouge » de la prise de parole. Commentateur du surréalisme, dont il est un « hérétique » (il défend l'intraitable Péret), il est témoin de son temps : avec la poésie, dit-il, « voilà l'histoire qui fait claquer toutes les portes et se pulvériser les barreaux ». Ses vers sont repris en deux volumes : C'est aujourd'hui toujours, poèmes 1947-1998 (1999), et Éternelle Extravagance, poèmes 1954-2000 (2000). À l'heure d'Internet, sa carte de visite porte : « Alain Jouffroy, Externet ».
Jouhandeau (Marcel)
Écrivain français (Guéret 1888 – Rueil-Malmaison 1979).
« Notaire de la vie », il soigne l'anecdote, le propos, le conte bref, le trait, le portrait et la silhouette. Ce qu'il lui faut, c'est surprendre l'homme « en flagrant délit d'humanité ou d'inhumanité ». Pour cela, la peinture des âmes « les plus simples » est aussi précieuse que celle des esprits les plus complexes. Dieu et le diable ne sont jamais loin – et ce que Jouhandeau dit du premier peut être vrai aussi du second : « Dieu est le milieu ambiant qui nous relie à toutes choses et à toutes gens ». La vie et le moi sont les valeurs sûres, qui mettent en jeu, sans aléas discursifs, les clivages traditionnels : ciel et enfer, continence et péché, amour et haine, ouverture sur les autres et réalisation de soi-même, générosité profonde et certitude têtue d'être le meilleur (« Dieu est grand et moi aussi »). Davantage que dans ses contes et ses nouvelles (les Pincengrain, 1924 ; Prudence Hautechaume, 1927), plus que dans la chronique provinciale de Chaminadour (1934-1941), qui évoque sa ville natale, ou que dans ses romans (la Jeunesse de Théophile, 1921 ; les Térébinthe, 1926 ; Tite-le-long, 1932 ; M. Godeau marié, 1933), le meilleur de son œuvre est à chercher dans les réflexions que lui suggère le spectacle de son propre moi. Essai sur moi-même (1946), Réflexion sur la vieillesse et la mort (1956), Mémorial (1948-1972) sont autant de textes marqués par l'introspection – d'aucuns ont dit du narcissisme. Au fil des 28 volumes que constituent les Journaliers (1961-1982), l'auteur arrive à constituer, par notations et approches successives, un monde complet dont il est le centre, mais nullement le seul acteur. Œuvre de moraliste, ces carnets découvrent un univers à la fois heureux et accidenté, et un être qui, libéré de tout, sait circuler et choisir, murmurer et protester, accepter et dévoiler, dans un double mouvement d'humilité et d'orgueil. Les Chroniques maritales (1938-1943) proposent quant à elles le compte-rendu de l'affrontement conjugal quotidien avec « Élise », la danseuse Élisabeth Toulemon épousée en 1929. Avec celle-ci, jusqu'à sa mort en 1970, l'écrivain poursuit le jeu de la dénonciation et de l'« abjection », aiguisé par un érotisme homosexuel considéré comme un art (Pages égarées, 1980 ; Bréviaire, portrait de Don Juan, Amours, 1981).