Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
L

littérature latine (suite)

De la littérature scolastique à la révolution humaniste

Le XIIIe s. a vu naître les premières universités à Paris et à Bologne d'abord, puis dans toute la chrétienté. L'accent est moins mis sur les belles-lettres, la culture est plus théologique et scolastique. Mais ce recentrage n'affecte pas la création littéraire, notamment sous la forme de poèmes d'inspiration religieuse comme ceux du théologien anglais John Peckham (Philomena) ou des Italiens Jacopone da Todi (Stabat mater) et Tommaso da Celano (Dies irae). En prose, l'hagiographie est illustrée par saint Bonaventure (Légende de saint François) et par le dominicain Jacques de Voragine, auteur de la Légende dorée.

   Les progrès des langues vulgaires dans tous les domaines littéraires, intellectuels et spirituels et la laïcisation de la culture à partir du XIVe s. ont réduit quelque peu l'emploi du latin, mais celui-ci reste jusqu'à l'époque moderne la langue dominante dans bien des domaines. Aussi la mutation fondamentale de la fin du Moyen Âge est plutôt l'élimination progressive du latin médiéval par le latin des nouveaux humanistes. Le mouvement humaniste est lancé par Pétrarque (1304-1374) et son ami Boccace, qui, passionnés par tous les aspects de la civilisation classique de l'Antiquité, ont préconisé un retour au style cicéronien ou virgilien. Suivi par les érudits italiens et français du XIVe  s., ce classicisme a substitué au latin médiéval ce que les spécialistes ont récemment nommé le néolatin. Ce néolatin, réservé à une élite, s'est coupé du monde environnant et est devenu une langue figée, ce que n'a jamais été le latin au cours du Moyen Âge, mais cette évolution n'a été ni brutale, ni complète avant l'époque moderne.

Littré (Émile)

Médecin, philosophe, lexicographe et homme politique français (Paris 1801 – id. 1881).

Interne des hôpitaux, il abandonna la médecine pour l'étude du grec, du sanskrit et de l'arabe. Il fonda (1837) un journal médical, tout en entreprenant une traduction des Œuvres d'Hippocrate (1839-1861). Élu en 1838 à l'Académie des inscriptions, il fut chargé, après la mort de Fauriel (1844) de poursuivre l'Histoire littéraire de la France. Devenu le disciple passionné d'Auguste Comte, qu'il n'abandonna (1852) que lorsque son système tourna au mysticisme, Littré fit rapidement figure de chef du positivisme (De la philosophie positive, 1845 ; Paroles de philosophie positive, 1859 ; Auguste Comte et la philosophie positive, 1863) dont il appliqua les principes à la linguistique en élaborant son fameux Dictionnaire de la langue française (1863-1873) et une Histoire de la langue française (1862). Sa méthode diachronique régressive propose un extraordinaire voyage dans le temps et les textes. Il créa en 1867, avec Wyrouboff, la Revue de philosophie positive. Député de la Seine (1871), sénateur inamovible (1875), il fut au cœur de toutes les luttes pour la république et la liberté de pensée : son élection à l'Académie française en 1871 provoqua la démission de Mgr Dupanloup. Il est aussi l'auteur d'une étude sur la Poésie homérique et l'ancienne poésie française (1847), d'une traduction (1848) de l'Histoire naturelle de Pline, et l'éditeur (1857) des œuvres d'Armand Carrel.

Lituanie

Malgré la richesse de sa poésie orale (dainos), la Lituanie n'a connu, jusqu'au XVIe s., qu'une littérature de cour en latin, en polonais et en russe. Avec la Réforme émerge une littérature écrite, d'abord cléricale (Catéchisme de Mazvydas, 1547 ; Bible de Bretkunas, 1536-1602), puis profane (Fables d'Ésope, 1706), qui livre avec les Saisons (1765-1775) de Donelaitis son premier chef-d'œuvre, tandis que s'amorce l'étude du lituanien (premier dictionnaire en 1629). L'union à la Russie (1795) suscite autour de l'université de Vilnious et des collecteurs du folklore (L. Résa, 1825) un éveil culturel exprimé par la poésie de A. Klementas (1756-1823), de A. Strazdas (1763-1833), de D. Poska (1757-1830), et qui culmine dans l'œuvre de Baranauskas (le Bois d'Anyksciai, 1859), mais qu'interrompt brutalement la répression du mouvement national de 1863. Dans ce climat s'organise autour du journal Varpas (1889-1905), en opposition au courant clérical et conservateur – J. Tumas-Vaizgantas, A. Jakstas, M. Satries-Ragana, le journal Ausra (1883-1886) –, qu'illustre aussi le grand lyrique Maironis, un cercle d'écrivains se réclamant d'une esthétique réaliste (poésie de V. Kudirka, roman de Zemaite) : celle-ci s'impose, malgré l'attrait des tendances « modernistes » – symbolisme de Baltrusaitis, drames de Vydunas –, dans les romans paysans des sœurs Lazdynu-Peléda, les vers prolétariens de Janonis, les récits ouvriers de Biliunas et la critique de Mickevicius-Kapsukas. L'indépendance (1919) favorise l'influence de l'Occident et des mouvements d'avant-garde (futurisme, expressionnisme, surréalisme), tandis que les écrivains démocrates (les poètes K. Boruta, Venclova, Montvila, S. Neris, L. Gira, le prosateur P. Cvirka), groupés autour du journal Troisième Front (1930-1931), rallient à leur critique de la société bourgeoise des auteurs d'abord non engagés (les romanciers Mykolaitis-Putinas, Vienuolis, les dramaturges V. Kreve, B. Sruoga) : ils seront, après 1940 et la réunion à l'U.R.S.S., les pionniers d'une littérature d'abord épique et monumentale (romans d'édification de Dovydaitis, Baltusis ; fresques sociales et historiques de E. Simonaityté, de Gudaitis-Guzevicius, de Vienuolis), mais qui, après 1956, évoluera vers une problématique neuve de la société et de l'individu (romans de Avyzius, de Bubnys, de M. Sluckis ; théâtre de A. Gricius, de J. Grusas), tandis qu'avec J. Marcinkevicius et E. Miezelaitis, qui occupent aujourd'hui le devant de la scène, la poésie retrouve le chemin des recherches formelles.

Liu Binyan

Journaliste chinois (Changchun 1925 – New Jersey 2005).

Célèbre journaliste d'investigation, il a donné ses lettres de noblesse à la « littérature de reportage », dénonçant les scandales, les injustices, la corruption nés des dysfonctionnements de la société chinoise contemporaine. Ses deux reportages de 1956, naïvement conformes à l'esprit des Cent Fleurs, lui valent l'étiquette de droitier et la rééducation qui s'ensuit. Réhabilité, il publie Entre hommes et démons (1979) et la Deuxième Forme de loyauté (1985), violemment critiqués. Il vit aux États-Unis depuis 1988.