Commodien (de Gaza)
Poète latin (IIIe s. apr. J.-C.).
Premier poète chrétien de langue latine et par ailleurs disciple de Tertullien et de saint Cyprien, il est l'auteur des Instructiones, virulente dénonciation du paganisme, et du Poème des deux peuples, où s'exprime un antijudaïsme non moins vigoureux. Sa verve populaire et sa langue pittoresque en font un des poètes latins les plus originaux.
Commynes (Philippe de)
Chroniqueur français (Renescure 1447 – Argenton 1511).
D'abord conseiller de Charles le Téméraire, il quitta son service pour celui du roi de France Louis XI, trahison qu'il minimisa. En échange, il fut comblé d'honneurs, de biens et, par son mariage, acquit la seigneurie d'Argenton. Ministre tout-puissant, il connut par la suite une défaveur qui finit par le reléguer loin des affaires politiques jusqu'à sa mort. Il est l'auteur des Mémoires qui devaient servir à l'archevêque de Vienne pour composer en latin une œuvre sur Louis XI. Mais il saisit l'occasion pour y justifier ses choix et entamer une réflexion politique, créant le genre des Mémoires historiques, dans une prose sèche, souvent digressive, mais précise et nuancée. Dictés de 1489 à 1498, les six premiers livres sont consacrés au règne de Louis XI, les deux autres racontent l'expédition de Charles VIII en Italie. Dans les deux cas, le point de vue est celui du « je » acteur et observateur. Commynes a été mêlé aux événements et un dosage subtil se fait entre les souvenirs authentiques, le déguisement de la vérité pour des raisons personnelles et un effort d'analyse objective. Il porte un jugement sévère sur le duc de Bourgogne, esprit héroïque plein de folles illusions qui l'ont conduit au désastre. Plus nuancé sur le roi de France, il en souligne souvent l'aspect médiocre et mesquin et les phobies. De ses observations, Commynes tire des préceptes politiques, conseillant de surveiller étroitement les princes, démontrant que la politique est affaire d'intelligence et non d'héroïsme ou de prouesse. Il en profite pour dénoncer la comédie de la cour et prouver que, pour un prince, un bon conseiller est un atout essentiel. Homme de bilan et de réflexion, ce mémorialiste est déjà un moraliste dont la pensée dépasse le cadre historique, dont la philosophie bouscule les mythes gouvernant encore les conduites morales et politiques des grands de ce monde. Pour Commynes, Dieu reste le seul maître et le seul recours dans un monde dont la noirceur est à dessein accentuée.
Compère (Gaston)
Écrivain belge de langue française (Conjoux 1924).
Son premier recueil (Géométrie de l'absence, 1969) traite de la métaphysique sous la forme d'un manuel de géométrie. Son imagination témoigne d'une étonnante diversité, de la nouvelle (Sept Machines à rêver, 1974) au récit fantastique (la Femme de Putiphar, 1975) et du théâtre (le Dernier Duc d'Occident, 1977) au roman (Portrait d'un roi dépossédé, 1978 ; Je soussigné, Charles le Téméraire, duc de Bourgogne (1985).
complainte
Ce genre, fortement conventionnel, est issu, en France, des chansons populaires qui racontent les malheurs d'un soldat, du Juif errant ou d'un personnage légendaire. Il a été renouvelé par l'esthétique du sentiment au XVIIIe s. (Young, The Complaints, or Night Thoughts) et, à la fin du XIXe s. chez Jules Laforgue, par un jeu subtil sur la douleur et l'ironie, qui tente de retrouver la naïveté des chanteurs des rues (les Complaintes, 1885). Se marque ainsi la dualité, présente dès les origines, du genre, empreint de lyrisme, comme le montrent les Complaintes de Marot (1532), mais souvent artificiel puisque la lamentation est aussi un exercice rhétorique pouvant tourner à la satire (la Complainte des jacobins et des cordeliers, v. 1270).
Comptes amoureux (les)
Recueil de quatre nouvelles anonymes (vers 1532), signé du pseudonyme de « Madame Jeanne Flore ».
L'auteur faisait certainement partie du groupe des poétesses lyonnaises des années 1530-1540, qui apparaissent dans l'ouvrage sous les traits de « Madame Mélibée », « Madame Sapho », etc. Dans un cadre narratif emprunté au Décaméron, les quatre nouvelles illustrent un thème unique : la punition infligée par Vénus aux femmes qui prétendent se soustraire à son pouvoir. La méthode édifiante de l'exemplum médiéval est ici mise au service d'une conception toute païenne de l'amour.
Compton-Burnett (Ivy)
Romancière anglaise (Pinner, Middlesex, 1884 – Londres 1969).
Ses récits peignent le huis-clos des grandes familles édouardiennes, nœuds de vipères minés par l'arrogance, le persiflage et les rancœurs, à l'aide d'une technique efficace (le roman par dialogues) : Frères et Sœurs (1929), Une famille et son chef (1935), Un Dieu et ses dons (1960), la Chute des puissants (1961).
conceptisme
Dans la littérature espagnole, le terme désigne la recherche d'un raffinement excessif dans le jeu des idées. Caractéristique de l'esthétique baroque, le conceptisme s'épanouit dans les œuvres de Vélez de Guevara (1579-1644) et de Quevedo (1580-1645). Il n'implique pas nécessairement le maniérisme du style qui définira le cultisme, selon les distinctions établies par Gracián (Acuité et art de l'esprit, 1648).
concert party
Théâtre musical improvisé, le concert party emprunte ses thèmes à la tradition orale, sa forme à la soirée de conte, son style de jeu aux films musicaux et au vaudeville européen, et sa musique au highlife, highlife, une forme de jazz ouest-africain. L'inventeur du genre serait un maître d'école de Cape Coast (Ghana) qui, en 1930, avait pour habitude de monter des spectacles de raconteur, agrémentés de chansons. Son exemple fut repris par des groupes en général constitués, d'une vingtaine de jeunes gens. Enfants martyrs, maris cocus, coépouses querelleuses, puis banquiers véreux et soldats brutaux composent la galerie de personnages que les pièces de concert mettent en scène dans des récits qui durent de deux à trois heures. Les groupes de concert, qui jouent toujours dans les langues locales de grande extension, ont essaimé dans tout le Ghana ; leur exemple a inspiré les Nigérians et a été imité dans les années 1960 au Togo. Cette forme de commedia dell'arte africaine atteste de la permanence de la création orale dans les villes.