La langue sumérienne peut être considérée comme celle qui a été notée la première de toutes, puisque l'invention de l'écriture au Proche-Orient a été le fait des Sumériens et que l'établissement de ce système de notation est antérieur aux autres systèmes archaïques que nous connaissons, l'égyptien et le chinois. La littérature sumérienne est donc aussi, en un certain sens, la doyenne des littératures, sans cependant présenter l'aspect initiatique ou primitif que certains ont voulu lui trouver.
Si l'on considère les époques où l'on a accès à une compréhension satisfaisante des textes, il est facile de constater l'existence d'une communauté de culture dans tout le Proche-Orient. Elle s'incarne dans la diffusion, de façon concomitante aux signes d'écriture, d'une certaine littérature, modèle d'écriture dans son principe, mais qui s'est aussi nécessairement trouvée être une source d'inspiration littéraire. Il faut signaler l'existence d'un genre de texte scribal très particulier, celui des listes lexicales : modèles d'écriture et de lecture, ces listes représentent divers arrangements des principaux idéogrammes ou combinaisons d'idéogrammes sumériens, et leur existence est la pierre de touche de l'établissement d'une école d'écriture dans un point géographique précis. Très souvent fautives, ces listes émanent des bibliothèques officielles, mais sont aussi le fait des exercices des jeunes scribes. Jusqu'à la fin de la pratique de l'écriture cunéiforme, les listes lexicales sont restées le genre le mieux représenté.
D'autre part, beaucoup de compositions que nous connaissions par des rédactions récentes sont en fait d'origine beaucoup plus ancienne qu'on ne le pensait. Ainsi, parmi les textes retrouvés dans la bibliothèque d'Abu-Salabikh, ville du centre babylonien, aux environs de Nippour, ruinée aux environs de 2400 av. J.-C., se trouvent les Instructions de Shouroupak, œuvre d'une inspiration analogue aux Travaux et les Jours du poète grec Hésiode. La comparaison des manuscrits archaïques et récents montre clairement que malgré les six siècles d'écart entre les deux traditions, les deux versions relèvent de la même inspiration : quelles que soient les amplifications, interpolations ou modifications postérieures, ou les raccourcissements imputables à la version archaïque, on peut affirmer l'absence d'une solution de continuité entre les deux moments de l'attestation. Pourtant, entre ces XXVIe et XXVe s. av. J.-C., maintenant bien documentés, et l'époque paléo-babylonienne, soit le début du IIe millénaire avant notre ère, d'où datent la plupart de nos manuscrits du sumérien littéraire, il y a une longue période de silence. Toute une série de textes de la haute époque, populaires au milieu du IIIe millénaire avant notre ère, sont tombés en désuétude et ne sont plus recopiés au début du IIe millénaire, sans que nous ne connaissions les raisons de leur disparition ni les conditions de survie ou d'évolution des autres œuvres pendant tout cet intervalle. La période est cependant cruciale, car c'est celle qui a vu le déclin progressif et la fin de l'ethnie des Sumériens et le remplacement de leur langue comme expression par l'akkadien, dialecte sémitique de l'Est moyen-oriental, qui prit peu à peu la relève au service d'un nouvel ordre politique, religieux et social.
Le corpus sumérien a ainsi été fixé dans les innombrables manuscrits du début du IIe millénaire, par des scribes qui étaient avant tout des akkadophones et qui considéraient le sumérien comme un héritage prestigieux, certes, mais qui le pratiquaient comme l'expression d'une culture à maintenir et non plus en devenir. Il faut savoir d'autre part que le sumérien recourait, aux origines de sa notation, à un système de graphie par économie, notation conceptuelle minimale (idéogrammatique) n'accordant qu'une place restreinte aux signes purement phonétiques. Un tel système, qui supposait que le lecteur ait envers l'écriture l'attitude dynamique de celui qui en pratique couramment la langue, n'était plus envisageable et l'on constate le souci d'établir un texte qui soit le plus explicite possible quant à la prononciation.
L'établissement de ces manuscrits à l'époque moyenne a entraîné tout un remaniement des œuvres, très révélateur du savoir des scribes qui l'entreprirent. Il en est résulté un tel désordre de notations que le savant moderne, encore plus coupé de la réalité phonétique et vivante du sumérien que le scribe akkodophone, peut difficilement combiner ces manuscrits et établir une édition critique. En conséquence, il est impossible de retrouver, par l'examen des manuscrits, leur filiation, l'histoire d'un texte et l'interaction des écoles scribales. C'est là un des obstacles majeurs à la redécouverte de l'ancienne littérature sumérienne.
Considérant la littérature sumérienne d'époque moyenne ou récente, un clivage très net apparaît entre le corpus d'époque paléo-babylonienne et celui du Ier millénaire. Ce dernier est de loin, selon nos critères modernes de goût, le moins « intéressant ». D'une part, la majeure partie du corpus ancien n'est plus attestée : les œuvres majeures de la littérature sumérienne, épique ou hymnique, sont soit négligées, soit remplacées (la descente d'Ishtar aux enfers, ou le cycle de Gilgamesh) par des versions akkadiennes. D'autre part, s'est développée toute une littérature monotone d'inspiration strictement religieuse : immenses litanies à la Parole divine, laudes d'une divinité ; le genre pénitentiel est très amplement représenté. À côté de passages d'un lyrisme poignant, sans doute plus sémitiques que sumériens dans leur inspiration, on constate surtout l'établissement de stéréotypes. Certains corpus, celui des incantations, le plus pittoresque et le plus varié, prennent des proportions énormes et reflètent la popularité de la conduite religieuse qui consiste à chasser le mal par la parole et les manipulations magiques. La première caractéristique de ces œuvres du Ier millénaire est qu'elles sont bilingues, c'est-à-dire qu'une ligne en sumérien est suivie de sa traduction en langue akkadienne. La qualité grammaticale de ce sumérien est relativement évoluée. De nombreux psaumes (Lamentations) joignent au fait d'être bilingues celui d'utiliser un dialecte du sumérien, l'emesal ou « langue des femmes ».
Le sumérien du début du IIe millénaire présente une situation très différente. On distingue actuellement trois centres de culture possédant des corpus propres et une conception particulière de la littérature : au Sud, le centre de la ville d'Éridou, sur les bords du golfe Persique ; au Nord, la ville de Kish, d'une très grande importance politique, peut être considérée comme le centre de diffusion de toute la culture sumérienne vers les régions du nord de la Babylonie, jusqu'au cœur de l'Anatolie hittite ; enfin, occupant une position médiane, la ville de Nippour, de tout temps, véritable pôle religieux de Sumer et siège du roi des dieux sumériens, Enlil, constitue le centre de la culture mésopotamienne par excellence où le sumérien s'est, selon toute vraisemblance, maintenu le plus tard possible. Les fouilles de Nippour nous ont rendu le plus considérable corpus sumérien qui soit : hymnes aux rois et aux dieux, littérature sapientiale, gnomique ou savante, pseudo-littérature royale ou religieuse, copie d'inscriptions historiques... dont la compréhension peut être désormais considérée comme satisfaisante grâce aux éditions anglaises, allemandes et françaises.
Au sein de la littérature épique apparaît un genre méconnu, celui du mythe étiologique, récit qui consiste à mettre en rapport une institution ou une caractéristique de la civilisation sumérienne avec un fait situé dans le « passé mythique » de la tradition mésopotamienne. L'épopée est organisée en plusieurs cycles : la geste des héros, qui narre des récits pseudo-historiques attribués aux princes de jadis, et celle des dieux, récit des Sumériens sur la création du monde et sur la « fixation des destins ». Les cycles héroïques les plus connus sont ceux de Gilgamesh, de Lugalbanda et d'Enmerkar. Issus des traditions propres à l'antique métropole d'Ourouk, ce sont des récits de prouesses en tout genre.
À côté de la célèbre descente d'Ishtar aux enfers figurent les mythes de la création : « Enki et l'Ordre du monde », « Enki et Ninhursag », dont le cadre est soit Sumer proprement dit, soit la mythique Dilmun qu'une tradition postérieure fluctuante situe volontiers à Bahreïn. Le style de ces épopées est, en bien des passages, difficile à dominer. La technique même du récit sumérien, avec son parti pris de répéter inlassablement des pans entiers de l'histoire, tout en n'exprimant qu'en un demi-vers le moment crucial du changement de l'intrigue et le passage à un nouvel épisode, a été d'une très grande aide pour la reconstruction de l'ensemble de l'œuvre et la compréhension de son ampleur, mais pas toujours pour l'élucidation des motivations mêmes du récit.