Longfellow (Henry Wadsworth)
Poète américain (Portland, Maine, 1807 – Cambridge, Massachusetts, 1882).
S'il fut, de son vivant, l'un des poètes américains les plus populaires de sa génération, il a moins rencontré l'assentiment de la postérité. Grand voyageur (Outre-Mer, 1834-1835), romancier dans le goût philosophique et sentimental (Hypérion, 1839), il donna avec Voix de la nuit (1839) un recueil lyrique qui est devenu un véritable classique scolaire. Poète ou auteur dramatique, il est toujours au fond un conteur qui prend son bien dans le folklore ou dans l'histoire : les Contes d'une auberge de campagne (1863) doivent leur célébrité à « la Chevauchée de Paul Revere ».
Longus
Romancier grec (IIe s. apr. J.-C.).
Le succès de sa pastorale, Daphnis et Chloé, doit plus à la peinture de l'amour naissant entre deux adolescents recueillis par des bergers et à l'évocation pleine d'humour de la complaisante voisine, initiatrice du jeune Daphnis, qu'à l'arsenal traditionnel du roman grec (enlèvements, incursions de pirates, reconnaissance des parents légitimes). L'œuvre, popularisée en France par Amyot (1559) et P.-L. Courier (1810), a marqué, par exemple, Bernardin de Saint-Pierre, Goethe, Corot, Ravel ou Chagall.
Lönnrot (Elias)
Folkloriste et poète finlandais de langue finnoise (Sammatti 1802 – id. 1884).
Médecin intéressé par le folklore, il entreprit de nombreuses expéditions en Carélie orientale (relatées dans ses Mémoires, 1902-1952) pour recueillir des poésies populaires à partir desquelles il créa le Kalevala : l'édition définitive, qu'il publia en 1849, comprenait 50 runot et 22 795 vers. Élevée, dès sa parution, au rang d'épopée nationale, cette œuvre, qui marqua de son empreinte toute la vie culturelle de son pays, inspira notamment le dramaturge Aleksis Kivi, le peintre Gallen-Kallela et le compositeur Sibelius. Contrairement à la plupart des épopées populaires de ce genre, le Kalevala est un récit relativement pacifique ; il célèbre les hommes du Nord luttant contre la nature, et glorifie les vertus familiales et la sagesse en même temps que la puissance et la magie créatrice du Verbe. Les héros du Kalevala sont des hommes doués de pouvoirs extraordinaires : Lemminkäinen, jeune et vaillant séducteur, qui accomplit des exploits pour conquérir la vierge de Pohjola (le Nord), descend aux enfers et tombe au bord du fleuve de Tuonela (le Styx), mais est ressuscité par sa mère ; Ilmarinen est le forgeron qui fabrique le sampo, objet magique qui devait apporter le bonheur aux peuples, mais les entraîna dans la guerre ; Väinämöinen est un barde et un chaman qui se sert de la puissance du Verbe pour charmer les éléments. Le Kalevala reflète une société déjà évoluée où le culte d'un dieu unique, Ukko-Ylijumala, était en communion étroite avec celui de la nature.
La Kanteletar (1840) est un recueil de poésie lyrique, qui, par son contenu et par son style, témoigne qu'à l'origine des femmes en étaient les auteurs. La première partie distingue les « chants de tout le monde », des « chants de mariage », « des bergers » et « des enfants ». Dans la deuxième partie, les poèmes sont classés selon des sujets adaptés aux jeunes filles (solitude, esclavage, pauvreté), aux femmes mariées (berceuses, attente), aux jeunes hommes (projets de mariage, départ du foyer) aux hommes mariés (à l'étranger, à la guerre, à la chasse). La troisième partie contient de brefs récits épiques et historiques originaires de la Finlande occidentale.
Il publia également des Devinettes (1833) et des Proverbes du peuple finnois (1842). Fondateur de la première revue finnoise, l'Abeille (1836-1840), il enseigna la langue finnoise à l'université d'Helsinki (1852-1862), et consacra sa retraite à un Diction– naire finno-suédois (1866-1880) qui comporte 200 000 mots.
Löns (Hermann)
Écrivain allemand (Kulm 1866 – Loivre, près de Reims, 1914).
Il doit son succès à ses tableaux de la lande de Lunebourg (Des forêts et des landes, 1909), à ses histoires d'animaux (le Lièvre, Ce qui grouille et fourmille, 1909) et à ses ballades, dont certaines sont devenues de véritables chansons populaires. Ses romans paysans le Loup-Garou, 1910) glorifient les vertus du terroir et de la race et prônent un néopaganisme : ils illustrent la dérive de la littérature régionaliste (Heimatkunst) vers les thèmes réactionnaires qui caractérisera la littérature du « sang et du sol » (Blubo-Literatur) sous le IIIe Reich.
Lope de Vega (Felix Lope de Vega Carpio, dit)
Écrivain espagnol (Madrid 1562 – id. 1635).
La majeure partie de la vie de Lope de Vega, emplie d'aventures, d'honneurs, d'exils et de souffrances intérieures, semble avoir été consacrée aux femmes et l'on s'accorde à voir dans la Dorothée, comédie en 5 actes et en prose publiée en 1632 mais probablement commencée vers 1585, une autobiographie du poète et une évocation de son grand amour de jeunesse pour Elena Osorio – d'où il ressort que l'amour vit de trahisons, et le poète, de solitude. Génie dont la vitalité va du mysticisme au libertinage, il a écrit dans tous les genres, mais ce sont surtout ses créations dramatiques qui lui ont donné la gloire. Tous les thèmes ont été pour lui des sources d'inspiration, mais d'abord l'histoire, réelle ou légendaire. Ainsi, la victoire de la flotte espagnole sur l'Angleterre, en 1585, lui fournit le sujet de La Dragontea, poème épique en 10 chants de 100 octaves, écrit en 1596 et publié en 1598 ; le personnage d'Alphonse VIII et la croisade sont le prétexte à un poème en 20 chants, publié en 1609 : Jérusalem conquise, où Vega veut rivaliser avec le Tasse. Christophe Colomb reste le personnage central d'une comédie héroïque en trois actes, le Nouveau Monde découvert par Colomb, publiée en 1614 ; en 1617, ce sont les aventures du Goth Pélage, premier héros de la Reconquête espagnole, qui fournissent le thème du Dernier Goth, au même titre que, en 1623, les Fameuses Asturiennes, qui ne sont autres que les cent vierges livrées chaque année, selon la légende, au souverain musulman de Cordoue.
Lope de Vega serait l'auteur de quelque 1 800 pièces de théâtre. Il nous reste de cette œuvre gigantesque et variée, qui occupe une place centrale dans la littérature du Siècle d'or, 436 comedias et 43 autos sacramentels. Cette fécondité ne l'a pas empêché de se pencher en théoricien sur les ressorts et la technique de la pièce théâtrale. Dans son Nouvel Art de faire les comedias (1609), il crée la formule définitive de la tragi-comédie : trois actes ; trois mille vers ; double interprétation des mêmes événements, l'une comique, l'autre tragique ; unité du lieu scénique, sans décor ; unité de temps (les trois heures d'une représentation peuvent embrasser l'histoire entière de l'humanité). Ses comédies de mœurs (l'Alcade de Zalamea, 1600 ; l'Eau ferrée de Madrid, écrite en 1603 ; la Nuit de Tolède, 1612 ; Peribáñez et le Commandeur d'Ocaña, 1614 ; les Caprices de Bélise, publiée en 1617 et rééditée ultérieurement sous le titre de la Jeune Femme capricieuse ; l'Hameçon de Phénice, 1617 ; l'Étoile de Séville, v. 1617 ; le Chien du jardinier, 1618 ; Font-aux-cabres, 1618 ; Aimer sans savoir qui, 1630 ; le Châtiment sans vengeance, écrite en 1631, publiée en 1634 ; le Meilleur Alcade, c'est le roi, 1635 ; le Cavalier d'Olmédo, écrite avant 1606, publiée en 1641) constituent le meilleur de son œuvre.
Surnommé le « Phénix des esprits » par ses contemporains tant il est vrai que son écriture renaît avec tous les genres dans lesquels elle s'informe et s'épanouit, Lope de Vega a également donné des drames inspirés de la Bible ou de l'histoire médiévale (la Belle Ester, 1610). Une place à part doit être faite à quelques œuvres de tonalité mystique (le Romancero spirituel, 1619 ; les Soliloques, 1re version, 1612 ; 2e version, 1629), à diverses pièces poétiques réunies sous le titre général de Rimes, et à un poème épique burlesque, la Gatomachie (1635).