Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
M

Margueritte (Paul)

Écrivain français (Laghouat 1860 – Hossegor 1918).

D'abord disciple de Zola, il s'en écarta en signant le tapageux « manifeste des Cinq ». Il subit l'influence des romanciers russes sans pouvoir se défaire de celle des naturalistes, avec lesquels il partage la foi en la toute-puissance des instincts. Viennent alors des romans dans lesquels il tente une synthèse de Zola, de Tolstoï, de sa propre sensibilité et de celle de son frère Victor (Blida 1866 – Monestier 1942), qu'il s'est adjoint comme collaborateur : une tétralogie (Une époque, 1898-1904), vaste fresque de la guerre de 1870, connaît un certain succès. Tandis que Paul s'assagit et rédige des livres de souvenirs, Victor lance, avec une ardeur provocatrice, des récits fortement marqués de préoccupations sociales (Prostituée, 1907 ; la Garçonne, 1922 ; Ton corps est à toi, 1927).

Marías (Javier)

Romancier espagnol (Madrid 1951).

C'est l'un des écrivains espagnols les plus représentatifs et les plus lus de sa génération. Ses récits introspectifs, très souvent proches de la claustrophobie, fourmillent de référence à la culture dite de masse (cinéma, littérature ou art en général). D'abord en rupture avec la tradition (les Domaines du loup, 1971), il s'achemine avec le Monarque du temps (1978) et le Siècle (1983) vers un intimisme très particulier dont le but est de percer à jour l'être humain grâce à la remémoration et à l'accumulation de détails (l'Homme sentimental, 1986 ; Toutes les âmes, 1989). Vies écrites (1996) est une recréation romanesque de biographies d'écrivains.

Marie de France

Poétesse française (1154-1189).

Originaire de France, elle a vécu en Grande-Bretagne, sans doute à la cour d'Henri II Plantagenêt. Son œuvre la plus célèbre est les Lais (vers 1160), conservés par les manuscrits soit isolément, soit en recueils : l'un d'eux rassemble une douzaine de ces poèmes narratifs, avec deux prologues permettant de deviner une élaboration et une réflexion globales de l'auteur. La structure et les formules d'introduction et de conclusion caractérisent un genre particulier de récit bref, dérivant, par l'intermédiaire de conteurs bretons, de traditions celtiques et de sources folkloriques diverses. Mais Marie s'est inspirée aussi d'Ovide, de l'Eneas, du Brut de Wace et de Tristan. Son originalité est de redistribuer les schémas et les motifs traditionnels et/ou légendaires en fonction d'une nouvelle esthétique, fondée sur le développement narratif du lai originel en conte et sur une peinture subtile des personnages. Dans Guigemar et dans Bisclavret, l'allure est encore archaïque, avec le thème de la biche qui parle, dans un cas, et un loup-garou dans l'autre. Mais la technique change avec Yonec, histoire d'un chevalier transformé en oiseau, Laüstic, qui raconte le meurtre d'un rossignol par un mari jaloux de la rencontre amoureuse dont il était le prétexte, Milon, où l'on voit un cygne porter les messages des amants, le Chèvrefeuille, avec une mise en scène de Tristan et d'Iseut, conduisant le récit à la description d'un emblème, celui de l'amoureux figuré par la plante enroulée autour de la branche de coudrier. L'évocation des mœurs de cour repose sur la combinaison du monde courtois de l'époque et du merveilleux celtique, qui transforme l'atmosphère violente de la légende que l'on croit deviner à l'origine. La fée de Lanval est une élégante demoiselle, et la rupture du contrat magique s'estompe pour laisser la place à un long procès provoqué par la reine. Le philtre des Deux Amants n'est plus qu'un « fortifiant » supposé aider le prétendant à gravir la colline avec la fille du roi dans ses bras. Le surgissement du merveilleux atténue cependant les traits réalistes du récit et suscite un sentiment d'étrangeté qui fait osciller entre la vraisemblance et le surnaturel. Le dernier lai du recueil, Éliduc, développe les éléments narratifs, prenant l'allure d'un petit roman : il fait mieux comprendre la superposition des motifs païens et chrétiens, dont l'ambiguïté masque peut-être un fantasme féminin faisant triompher le désir. Marie serait aussi l'auteur d'un recueil de fables, le premier en date des Isopets (1167-1189), écrit dans la tradition ésopique. Les fables proviendraient du Romulus Nilantinus, de l'Antiquité et du fonds populaire et folklorique. Par le biais des animaux, elles montrent l'homme concerné par les aléas de la vie féodale et sont le support d'une morale exprimée avec force. Enfin, Marie traduisit en 2 300 octosyllabes le traité latin d'Henri de Saltrey, l'Espurgatoire Saint Patrice (apr. 1189).

Marie de L'incarnation (Marie Guyard, en religion Mère)

Religieuse française (Tours 1599 – Québec 1672).

Après son veuvage en 1619, elle entre aux Ursulines de Tours (1631) et fonde au Canada (1639) le premier couvent des Ursulines. On lui doit des Lettres (publiées par son fils dom Claude Martin en 1681), deux Relations autobiographiques (1633 et 1654) et des écrits spirituels (Exposition succincte du Cantique des cantiques, 1682 ; l'École sainte, 1684) qui font d'elle l'une des grandes mystiques de l'école française de spiritualité.

Marïen (Marcel)

Écrivain, peintre et cinéaste belge de langue française (Anvers 1920 – Bruxelles 1993).

À 17 ans, il rencontre Nougé et Magritte et est, depuis, mêlé étroitement aux surréalistes belges dont il a édité de nombreux textes dans des collections ou des revues (les Lèvres nues). Poète, il pratique l'aphorisme ironique et le jeu de mots (les Corrections naturelles, 1947), mais excelle aussi dans la nouvelle (Figures de poupe, 1979). Il s'illustra également par ses collages.

Marinetti (Filippo Tommaso)

Écrivain italien (Alexandrie, Égypte, 1876 – Bellagio, Côme, 1944).

Poète, il s'inspira de l'esthétique symboliste et décadente dans la Conquête des étoiles (1902) et Destruction (1904). Il fut ensuite l'initiateur du futurisme, dont il lança le premier manifeste dans le Figaro du 22 février 1909 et qu'il illustra par des drames satiriques (le Roi Bombance, 1909) et des récits (Mafarka le Futuriste, 1909). Il adhéra dès 1919 au fascisme, s'efforçant de traduire en rythmes nouveaux les événements du monde contemporain (Démocratie futuriste, 1919 ; Poèmes simultanés, 1933).