Bashkirtseff (Marie)
Peintre et mémorialiste française d'origine russe (Gavrontsy, près de Poltava, 1860 – Paris 1884).
Après une enfance itinérante, cette jeune aristocrate s'installe avec sa mère à Paris ; elle est douée pour la peinture et s'illustre surtout dans le genre du portrait, et certains de ses tableaux comme la Parisienne connaissent le succès. Atteinte de phtisie, elle rédige un journal intime où s'expriment ses rêves et sa sensibilité, à côté de tableaux de la vie mondaine. Le texte ne sera publié qu'en 1887, après sa mort.
Basho (Matsuo Munefusa, dit)
Poète japonais (Ueno, province d'Iga, 1644 – Osaka 1694).
Fils d'un petit guerrier, il est attaché dès l'enfance à Todo Yoshitada, héritier du seigneur d'Ueno, en compagnie duquel il reçoit les leçons du maître de haikai Kitamura Kigin. Après la mort prématurée de Yoshitada (1666), il se partage entre son pays natal et Kyoto, où il poursuit sa formation poétique, puis se rend en 1672 à Edo, la capitale shogounale, où il fonde bientôt sa propre école et s'installe au Basho-an, « l'Ermitage du Bananier », auquel il empruntera son pseudonyme. Chassé momentanément de son nouveau logis par un incendie, il profite du délai nécessaire à sa reconstruction pour effectuer la première des longues pérégrinations qui, à l'imitation des moines-poètes du Moyen Âge, le conduiront aux quatre coins de l'île principale. Il y puisera la matière de ses cinq « journaux de voyage », où les vers de haikai (hokku), se trouvent à la fois explicités et sertis par la prose poétique ou haibun. Basho donnera ainsi successivement Dussent blanchir mes os, récit d'un pèlerinage accompli sur la tombe de sa mère en 1685, plusieurs relations de voyages effectués dans des sites célèbres pour leurs fleurs de cerisiers (le Carnet de la hotte, 1687-1688) ou leur lune automnale (Notes d'un voyage à Kashima, 1687 ; À Sarashina, 1688), et surtout la Sente étroite du bout du monde, journal d'un immense périple (près de 2 400 kilomètres parcourus en sept mois) qui le mène en 1689 jusque dans les lointaines marches septentrionales. Déjà atteint par le mal qui devait l'emporter, il consacrera les cinq dernières années de sa vie à polir cet ultime chef-d'œuvre. Confronté successivement au formalisme volontiers tatillon de l'école Teimon que professait son premier maître, puis à l'exubérance de l'école Danrin à laquelle il se rattacha lors de son arrivée à Edo, Basho élabore progressivement un art poétique original. Dans cette synthèse où les influences de la poésie classique chinoise viennent enrichir la tradition proprement japonaise, Basho cherche à faire du haikai un moyen pour s'unir avec le cours naturel des choses, sans renoncer pour autant à la veine humoristique ni se couper de la réalité quotidienne. Avec lui le haikai devient l'expression de la poésie la plus haute.
Basile (Giambattista)
Écrivain italien (Naples 1575 – Giugliano, Naples, 1632).
D'abord mercenaire de la république de Venise, puis au service des Gonzague à Mantoue (1612-1613), il passa le reste de sa vie dans le royaume de Naples en assumant des fonctions administratives pour le compte de plusieurs seigneurs féodaux. Poète mariniste assez conventionnel en langue italienne, il a écrit ses chefs-d'œuvre en dialecte napolitain sous le pseudonyme de Gian Alesio Abbattutis : Le Muse napolitane (publié en 1633) et, surtout, le Conte des contes pour amuser les enfants (1634-1636), connu aussi sous le titre de Pentamerone. Dans ce recueil de cinquante contes, l'invention baroque se greffe sur la tradition populaire, notamment dans la présentation des horribles vieilles qui sont les narratrices de chacune des cinq journées en lesquelles se décompose le recueil. Les frères Grimm mais surtout Charles Perrault lui empruntent nombre de sujets (Cendrillon et la Belle au bois dormant). B. Croce, qui voyait dans le Conte des contes « le plus beau livre de la littérature baroque italienne », a largement contribué à sa diffusion par une remarquable adaptation en italien, publiée en 1925.
Basile (saint) , surnommé le Grand
Docteur de l'Église grecque (Césarée de Cappadoce 329 – id. 379).
Né dans une famille chrétienne (deux de ses grands-parents ont été martyrs, sa sœur Macrine, religieuse, est honorée comme sainte, et trois de ses frères furent évêques), mais élève du rhéteur païen Libanios, il devint à Athènes l'ami de Grégoire de Nazianze et choisit la vie monastique après un voyage chez les anachorètes de Syrie et d'Égypte. Ses Grandes et Petites Règles, traduites en latin, forment les bases du monachisme occidental, à travers Cassien et saint Benoît. Évêque de Césarée en 370, il a laissé de nombreuses homélies, dont l'Hexaemeron, et des traités qui témoignent de sa lutte contre l'arianisme.
basque (littérature)
Au Xe s., en même temps que surgissaient les premiers mots de castillan dans un cartulaire latin d'un couvent de San Millan de la Cogolla dans la Rioja, apparaissaient aussi quelques mots en langue basque, ou euskara. Mais les Basques, s'ils parlaient leur langue, la chantaient aussi. Ils ont créé, au cours du temps, une littérature orale de valeur : les poètes improvisateurs (pertsulari ou bertsolari) ont certainement été à l'origine de cette littérature.
C'est surtout au XIXe s. que les folkloristes (Cerquand, Webster, Vinson) ont recueilli de nombreux contes, formulettes enfantines, historiettes, devinettes, et la quête s'est poursuivie au XXe, à travers les travaux d'ethnologues comme Azkue et Barandiarán. La chanson reste l'élément privilégié de la littérature orale : de nombreux recueils ont été publiés à partir du milieu du XIXe s. Sallaberry, Manterola, le R. P. Donostia ont su rassembler ce trésor inestimable où les chansons d'amour côtoient les chansons satiriques et les strophes épiques. Certaines d'entre elles sont d'une qualité littéraire indéniable, comme la Chanson de Bereterretxe, rappelant le meurtre, par le comte de Mauléon, du jeune Bereterretxe vers les années 1440-1450 : quinze strophes de cette chanson du XVe s., éditée pour la première fois en 1870, sont parvenues jusqu'à nous et se chantent encore.
Autre face de cette littérature : les proverbes. Un recueil de 1596, que l'on attribue à l'historien Garibay, et un autre de 1657, réuni par l'historien et poète souletin Arnault d'Oihenart, attestent l'intérêt que les Basques ont porté à la parémiologie et nous donnent une idée de la mentalité des Basques au Moyen Âge. Il est enfin un genre littéraire qui tient à la fois de la tradition orale et écrite : la pastorale, théâtre populaire chanté et psalmodié, dérivé des théâtres ruraux du Moyen Âge.
Il faut attendre le XVIe s. pour que la littérature écrite basque fasse son apparition avec la publication, en 1545, du premier ouvrage imprimé en basque, malgré son titre latin (Linguae Vasconum primitiae), recueil de vers de Bernard Dechepare, curé de Saint-Michel-le-Vieux (en basque Eiheralarre) et vicaire général du pays de Cize. Dechepare oriente la littérature vers des thèmes qu'elle cultivera plus tard : la religion, l'amour profane, l'autobiographie ; en fait, c'est un poète moraliste antérieur au concile de Trente, dont le lyrisme est plus particulièrement marqué dans les deux poèmes qu'il consacre à la langue basque, « défense et illustration » de l'euskara. À cette époque apparaît aussi une autre direction littéraire : la traduction. Avec Lissarrague, pasteur protestant auquel Jeanne d'Albret, reine de Navarre, avait demandé la traduction du Nouveau Testament (1571), la littérature basque s'engage vers la traduction d'ouvrages religieux, genre qui fleurira pendant quatre siècles. Cela n'empêche pas la naissance d'œuvres originales, comme le Gero (Après, 1643) d'Axular, curé de Sare, vaste traité de doctrine chrétienne qui laisse entrevoir le profil de l'homme basque du XVIIe s. et qui s'impose par la maîtrise du langage et du style : le Gero reste le modèle incontestable de la prose basque, un véritable classique de la littérature. De son côté, Joanes Etcheberri de Ciboure compose trois livres de piété en vers (1627-1636) qui contiennent des noëls, dont certains sont encore chantés de nos jours dans les églises basques. Le Souletin Arnault d'Oihenart est le premier laïc à s'intéresser aux lettres et à la culture basques : son œuvre d'historien de la Vasconie et de l'Aquitaine, écrite en latin, la langue noble et scientifique de l'époque, ne le cède en rien aux ouvrages historiques de ce même siècle tant en France qu'en Espagne ; cependant on reproche à sa poésie une certaine préciosité. À la fin du siècle, un jésuite, le Père Gasteluçar, traite en vers des Vérités catholiques nécessaires pour le salut éternel. Si la pensée reste classique, l'ouvrage est novateur en matière de prosodie.
Jusqu'au XVIIIe s., l'essentiel de la production littéraire est concentré en Pays basque de France. Un homme va alors établir le lien avec le Pays basque d'Espagne : Jean d'Etcheberri de Sare (ainsi appelé pour le distinguer d'Etcheberri de Ciboure), médecin dans son village natal, qui a exercé ensuite en Navarre, à Vera de Bidasoa, puis en Guipuzcoa. Il veut faire de la langue basque un moyen d'enseignement à travers une grammaire pour apprendre le latin, et compose une apologie de l'euskara qui a le mérite, par rapport aux œuvres des apologistes antérieurs, d'être écrite en basque. Il se considère comme le disciple d'Axular dont il proclame la primauté littéraire.
Le P. Larramendi, jésuite guipuzcoan et fougueux polémiste, prend la relève de Jean d'Etcheberri en tant qu'apologiste et pédagogue : de sa plume surgissent la première grammaire (El imposible vencido) et le premier dictionnaire qui aient été publiés ; avec lui se crée en Pays basque d'Espagne un courant littéraire important. Un autre jésuite, le P. Mendiburu, figure parmi les meilleurs prosateurs du XVIIIe s. et son style dépouillé et élégant aura des imitateurs. Le P. Cardavezaz mérite aussi d'être mentionné parmi les auteurs religieux. Vers la fin du siècle se détache la figure de Juan Antonio Moguel, auteur de Peru Abarca, dialogues entre un paysan et un barbier citadin où, en un style plein de verve, il montre la supériorité intellectuelle et morale du monde rural.
Le romantisme en Pays basque est incarné par deux poètes de talent. Pierre Topet-Etchahun, souletin, natif de Barcus, a chanté les infortunes d'une vie agitée dans des poèmes-chansons qui vont de la plainte élégiaque à l'ironie acerbe. Le Guipuzcoan José María Iparraguirre a eu, lui aussi, une existence hors du commun : dès l'âge de 14 ans, il combat dans les rangs carlistes (1833-1839) et sera contraint de s'exiler, une première fois à la fin de la guerre, une deuxième fois à la suite de la création, en 1853, du Gernikako Arbola, qui deviendra très vite l'hymne national basque. À côté d'eux, Jean-Baptiste Elissamburu exalte la terre basque et la société paysanne ; Vilinch mêle à son inspiration caustique des accents émouvants.
Les concours poétiques de la seconde moitié du XIXe, fondés par le mécène Antoine d'Abbadie, et le mouvement nationaliste basque du début du XXe vont exercer une forte influence sur les lettres basques. Il faut distinguer deux étapes. La première, qui va jusqu'à la guerre civile espagnole de 1936, voit la création de revues littéraires et l'éclosion de talents nouveaux : le roman, qui avait fait une timide apparition en Pays basque de France (Dasconaguerre, Elissamburu), trouve un certain épanouissement avec Domingo de Agirre, le premier véritable romancier basque (Kresala [l'Eau de mer], 1906 ; Garoa [la Fougère], 1912) ; Jean Barbier, avec Piarres, peint la vie en Labourd ; Jean Etchepare veut adapter la langue basque à la modernité et son style précis lui confère une valeur de modèle classique. La poésie reste cependant chez les Basques le domaine privilégié de la littérature : Oxobi restera comme l'auteur inégalé de fables ; Lauaxeta, tragiquement disparu en 1937, Lizardi, Orixe, portent la poésie vers des sommets encore jamais atteints, en particulier les deux premiers qui ouvrent des voies assez semblables à celles de la génération de 1927 en Espagne. La deuxième étape commence après la fin de la guerre civile et de la Seconde Guerre mondiale. Le Pays basque sort petit à petit, et malgré la dictature franquiste, du mutisme auquel il a été contraint. De nouvelles revues, tant linguistiques que littéraires, se substituent aux anciennes.
On veut désormais tout exprimer en basque et forger pour cela une langue moderne. La poésie, d'allure classique avec Iratzeder, s'interroge, anxieuse, non conformiste avec Gabriel Aresti (Harri eta Herri [Pierre et Pays], 1964 ; Euskal Harria [la Pierre basque], 1967) et Xavier Lete. Le théâtre reprend une vigueur nouvelle grâce à Antonio Labayen, à Telesforo de Monzón, qui lui donne un accent poétique, et à Pierre Larzabal, qui fait vibrer la fibre patriotique. L'essai et le roman, influencés par les auteurs étrangers, trouvent leur accomplissement dans l'œuvre de Txillardegi. Citons encore Jon Mirande (1925-1972) dont l'œuvre, rejetée de son vivant, suscite aujourd'hui l'intérêt ; Gabriel Aresti (1933-1975), auteur d'une épopée du peuple basque de la préhistoire à nos jours, Maldan behera (la Descente, 1960) ; et Bernardo Atxaga (né en 1951), écrivant en basque et en espagnol, traduit dans les principales langues européennes et qui a reçu en 1989 le prix national de Littérature d'Espagne – occasion pour toute la tradition littéraire basque d'une véritable reconnaissance internationale.