Kolas (Konstantin Mikhaïlovitch Mickiewicz, dit Iakoub)
Poète biélorusse (Akintchitsy 1882 – Minsk 1956).
Fils d'un garde forestier, instituteur rural, il est incarcéré (1908-1911) pour ses activités politiques et évoque dans ses premiers vers (Pays natal, 1906 ; Chants de deuil, 1910), en une langue issue du patrimoine oral, la vie misérable et les aspirations du paysan. Tardivement rallié à la Révolution, il fait revivre dans des poèmes les injustices passées (Terre nouvelle, 1923 ; Symon le musicien, 1917-1925), relate dans une trilogie autobiographique l'itinéraire hésitant des intellectuels de sa génération (Au carrefour, 1923-1954) et les combats de la guerre civile (le Marécage, 1933). Célébrant la collectivisation (À travers la vie, 1926 ; le Renégat, 1931) et la lutte des Biélorusses occidentaux (la Cabane du pêcheur, 1947), il anime enfin la résistance des partisans (le Tribunal des bois, 1943 ; le Châtiment, 1945).
Kolb (Annette)
Femme de lettres allemande (Munich 1870 – id. 1967).
Allemande par son père, française par sa mère, elle n'a cessé d'œuvrer pour le rapprochement franco-allemand (Treize Lettres d'une Franco-Allemande, 1916 ; Essai sur Briand, 1929). En 1933, elle émigre à Paris puis aux États-Unis. La société européenne cultivée d'avant 1914 fournit le sujet de ses romans (l'Exemplaire, 1913 ; Daphne Herbst, 1928 ; l'Escarpolette, 1934). Elle a aussi laissé des biographies de Mozart (1937), Schubert (1941) et Richard Wagner (1947), ainsi que des écrits autobiographiques (Memento, 1960 ; 1907-1964. Tableaux d'une époque, 1964).
Kolbenheyer (Erwin Guido)
Écrivain allemand (Budapest 1878 – Munich 1962).
Ses nombreux romans (Amor Dei, 1908 ; Maître Joachim Pausewang, 1910 ; Paracelsus, 1917-1926) et drames historiques (Giordano Bruno, 1903 ; Gregor et Heinrich, 1934) prétendent montrer comment, en temps de crise, le peuple allemand a toujours su trouver les guides capables de lui montrer la voie. Toute l'œuvre littéraire de Kolbenheyer est un mélange confus de biologisme et de mysticisme au service de la glorification de l'âme germanique et de la justification de sa « mission » : elle fut, comme il se devait, portée aux nues par le national-socialisme.
Kölcsey (Ferenc)
Écrivain hongrois (Szödemeter 1790 – Cseke 1838).
Poète patriotique, il est surtout connu par son poème Himnusz (1823), qui, mis en musique par Ferenc Erkel (1844), devint l'hymne national hongrois.
Kolmar (Gertrud)
Poétesse allemande (Berlin 1894 – Auschwitz 1943).
Trouvant refuge dans son écriture, elle refusa, jusqu'à sa déportation en 1942, de se laisser atteindre par le réel. La richesse lexicale de Mondes, écrit en 1937, témoigne de son univers féerique, saturé de couleurs, de plantes et d'animaux exotiques, tout le contraire de la mythologie nazie. La qualité existentielle de sa poésie, qui fut sauvée par sa sœur, s'affirme dans le choix des thèmes : identité juive, expérience érotique, perte de l'amant et de l'enfant. On lui doit aussi une correspondance (parue en 2001) et plusieurs récits, dont Susanna, conte marin écrit en 1939.
Kolomiets (Alekseï Fedotovitch)
Auteur dramatique ukrainien (Kharkivtsi 1919 – Kiev 1994).
Baignant dans un climat lyrique, ses drames évoquent, parfois au travers d'épisodes de la guerre ou du passé révolutionnaire, les problèmes éthiques du monde du travail et de la société soviétique (la Planète Speranta, 1965 ; la Tourterelle, 1970 ; les Cerfs bleus, 1973 ; Kravtsov, 1975 ; l'Ange sauvage, 1978).
Koltès (Bernard-Marie)
Auteur dramatique français (Metz 1948 – Paris 1989).
En dépit de sa mort précoce, à l'âge de 41 ans, il est l'un des dramaturges les plus importants et les plus joués de ces vingt dernières années. Il a su renouveler l'écriture dramatique contemporaine en réconciliant le théâtre moderne avec le réalisme et la fiction et parler concrètement de notre temps en inventant une langue théâtrale puissante et poétique.
Une enfance et une adolescence provinciales à Metz, un père officier longtemps absent du fait de ses campagnes en Indochine et en Algérie, l'écho feutré des guerres coloniales, des études chez les jésuites : de cet univers confiné comme du cocon familial, le jeune Koltès cherchera tôt à s'évader, par ses lectures tout d'abord, par ses voyages ensuite, de plus en plus lointains (New York, l'Afrique noire, l'Amérique latine...), dans le besoin renouvelé d'opérer en lui-même un décentrement dont on retrouvera le principe au cœur de sa dramaturgie. Sa vocation théâtrale lui vient à Strasbourg, en 1969, au spectacle d'une Médée, incarnée par Maria Casarès. Il écrit alors et met en scène un texte inspiré par Enfance de Gorki : les Amertumes (1970). Remarqué à cette occasion par Hubert Gignoux, il entre au T.N.S. de Strasbourg où il fait son apprentissage en écrivant plusieurs pièces pour des condisciples, tentatives qu'il reniera par la suite. Avec Sallinger (1977), pièce très librement inspirée par l'œuvre du romancier américain, Koltès commence à explorer ce qui fera le cœur de son théâtre : l'étouffement de la famillle, l'errance et la fuite, l'état de violence du monde.
De son propre aveu pourtant, il naît véritablement à l'écriture dramatique avec le monologue haletant qu'il créé à Avignon : la Nuit juste avant les forêt (1977). Tout son théâtre est déjà inscrit dans cette parole pressante et insatiablement désirante d'un personnage noctambule, hantant les marges. Vient ensuite, écho remarquable de ses voyages africains et de sa perception du monde post-colonial, Combat de nègre et de chiens (1979), créé d'abord en anglais à New York par Françoise Kourilsky, puis révélé en France par une mise en scène magistrale de Patrice Chéreau au Théâtre des Amandiers en 1983. Les destins artistiques du metteur en scène et du dramaturge se trouvent dès lors liés : Chéreau se consacre à la création des pièces suivantes (Quai Ouest, 1986 ; Dans la solitude des champs de coton, 1987 ; le Retour au désert, 1988), contribuant de manière déterminante à la notoriété du dramaturge.
Dans ses drames violents et tendus où s'inscrit de plus en plus lisiblement le principe du conflit originel de chacun contre tous, Koltès réinvente un espace théâtral fort, celui de la marge et des lieux troubles : un chantier aux fins fonds de l'Afrique ; les docks d'une ville portuaire, hantés par une humanité interlope, et où se fourvoient deux « civilisés » ; l'espace urbain de la rue, théâtre nocturne d'échanges illicites. Avec le Retour au désert, drame de famille provincial sur fond de guerre d'Algérie, il fait entrer la comédie dans son théâtre, et, inspiré par la lecture de Shakespeare dont il a traduit le Conte d'hiver, renouvelle ses conceptions dramaturgiques. Dans sa dernière pièce, Roberto Zucco (1989), fasciné par un fait divers réel et la figure d'un tueur en série, il interroge, à travers une série de séquences discontinues, quasi cinématographiques, le destin énigmatique, noir et solaire, de son personnage. Koltès meurt du sida le 15 avril 1989, et ne verra pas la création de sa pièce par Peter Stein à la Schaubühne de Berlin en 1990.