Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
V

Vidocq (Eugène-François)

Aventurier et homme de police français (Arras 1775 – Paris 1857).

Cet ancien bagnard, devenu chef de la police parisienne sous Louis XVIII – il crée la brigade de sûreté en 1817 –, est passé à la postérité littéraire pour la fascination qu'il exerça sur Balzac, Sue, Dumas et Hugo, qui, tous, s'inspirèrent de lui dans leur invention de certains personnages (Vautrin ou Jean Valjean). Il a laissé ses Mémoires (1828) ainsi que les Voleurs : physiologie de leurs mœurs et de leur langage, ouvrage suivi d'un dictionnaire d'argot (1838).

Vidyasagar (Iswarchandra)

Écrivain et réformateur social indien de langue bengalie (Birsingha 1820 – Calcutta 1891).

Il donna à la prose bengalie ses lettres de noblesse grâce à ses nombreuses traductions du sanskrit, à ses manuels scolaires et à ses écrits polémiques (Sakuntala, 1854 ; l'Exil de Sita, 1860).

Vie de Saint Alexis

Poème composé au XIe siècle en laisses de décasyllabes assonancés (625 vers). C'est l'un des premiers monuments de la littérature française. Le manuscrit le plus ancien à l'avoir conservé est le célèbre psautier de Saint-Alban, réalisé aux environs de 1120. La source du texte serait une légende syriaque du Ve siècle et une légende grecque, combinées au Xe siècle par l'archevêque de Damas, Serge, en exil à Rome. Dans ce poème exaltant le rejet du monde et des amours terrestres par Alexis, noble romain chrétien, les deux scènes les plus frappantes sont la nuit de noces, où Alexis abandonne son épouse et où, déguisé en mendiant, il séjourne sous l'escalier de ses parents. Intéressant pour l'histoire de la langue et de la littérature, le texte présente de réelles qualités littéraires, par sa composition équilibrée et par la mise scène des personnages et l'expression de leurs sentiments. Cette version a connu de nombreux remaniements, en vers et en prose, aux XIIe, XIIIe et XIVe siècles.

Viebig (Clara)

Romancière allemande (Trèves 1860 – Berlin 1952).

Après avoir connu ses premiers succès avec des histoires paysannes (Enfants de l'Eifel, 1897 ; le Village des femmes, 1900), elle accède à la célébrité avec le roman la Garde sur le Rhin (1902), qui raconte la rencontre de l'esprit prussien et de l'esprit rhénan. Elle n'ignore pas la misère du prolétariat urbain et particulièrement des femmes salariées (le Pain quotidien, 1900 ; Ceux devant les portes, 1910). Mais sa critique sociale, portée par la compassion plus que par la révolte, débouche sur un idéal d'harmonie et d'entente fraternelle entre les classes et les races, les confessions et les partis.

Vieira (António)

Écrivain portugais (Lisbonne 1608 – Bahia 1697).

Élevé chez les jésuites de Bahia, il y reçut les ordres (1635) et commença de bonne heure sa carrière de prêcheur. Partisan fidèle du roi Jean IV, il se chargea de nombreuses missions diplomatiques et alla jusqu'à risquer sa position à l'intérieur de la Compagnie de Jésus par ses attaques contre la brutalité de l'Inquisition portugaise et contre l'esclavage. Détaché à Maranhão (Brésil), il lutta pour l'évangélisation et la défense des Amérindiens, victimes de l'esclavage. Sa liberté dans l'interprétation des Écritures lui valut, à son retour, la persécution de l'Inquisition, dont il dénonçait les excès. Amnistié, il s'installa à Bahia (1681), où il exerça les fonctions de supérieur des Missions. Orateur éblouissant et direct, il s'inscrit dans la tradition du sermon médiéval, mais ses procédés démonstratifs s'appliquent à une réalité nouvelle qu'il connaît bien. L'éducation rhétorique des écoles jésuites, l'art de persuader, l'intuition psychologique, le sens pratique, la largesse de vues convergent dans son éloquence toujours en prise directe avec le réel. Son œuvre, qui s'inscrit dans la complexité de l'époque baroque déclinante, comprend environ deux cents sermons (Sermons, 1697) – dont le Sermon de saint Antoine (1638) et le Sermon de la Soixantième (1655) sont parmi les plus célèbres –, cinq cents lettres (Cartas, 1735-1746), des récits de voyages et de nombreux documents politiques, diplomatiques, juridiques et religieux.

Vieira (José Geraldo Germano Correia Vieira Machado da Costa, dit José Geraldo)

Écrivain brésilien (Rio de Janeiro 1897 – São Paulo 1977).

Il est l'auteur de romans raffinés et d'avant-garde (la Quarantième Porte, 1943 ; 16e parallèle : Brasilia, 1966).

Vieira (José Luandino)

Écrivain angolais (Vila Nova de Ourém, Portugal, 1935).

Emprisonné durant onze ans, jusqu'en 1972, il fut un membre dirigeant du MPLA. On lui doit des contes (la Ville et l'enfance, 1957) et des romans (Nous autres de Makulussu, 1975).

Viélé-Griffin (Francis)

Poète français (Norfolk, Virginie, États-Unis, 1864 – Bergerac 1937).

Ami d'Henri de Régnier, de Jules Laforgue, de James Whistler, il publia dans la revue Lutèce, à Paris, ses premiers vers, qu'il réunit en 1886 dans Cueille d'avril. Il prit parti pour le vers libre, dont il fut à la fois le théoricien dans la revue qu'il lança avec Bernard Lazare, Paul Adam et Henri de Régnier, les Entretiens politiques et littéraires (1890-1892), et l'illustrateur (Joies, 1889). Parallèlement aux Cygnes (1885-1891), à la Chevauchée d'Yeldis (1893), à la Clarté de vie (1897), à la Voix d'Ionie (1914), il s'essaya au poème dramatique dans une perspective symboliste avec Swanhilde (1893), Phocas le jardinier (1898) et Wieland le forgeron (1900). Une langue inspirée dans une syntaxe pliée au rythme du verset, parsemée de curiosités lexicales et d'archaïsmes, cherche à atteindre l'âme du « lyrisme éternel » entreprise qui retint le surréalisme naissant.

Vienne (groupe de)

Dans les années 1950, le « Wiener Gruppe » était l'équivalent de l'avant-garde en Autriche. Décidé à ressusciter les traditions de la modernité (en particulier du dadaïsme) gommées de la carte culturelle de l'Autriche entre 1934 et 1945, ce groupe est resté très marginal. C'est le succès inattendu de H. C. Artmann qui le fit sortir de l'ombre. Aujourd'hui ses membres (Konrad Bayer, Friedrich Achleitner, Gerhard Rühm et Oswald Wiener, auteur du roman l'Amélioration de l'Europe centrale, 1969) sont considérés comme les maîtres de la poésie concrète de langue allemande.