Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Osofisan (Femi)

Dramaturge et poète nigérian, de langue anglaise (né en 1946).

Il enseigne à l'université d'Ibadan. Ses pièces portent sur le rapport entre les traditions orales des Yoruba et les problèmes politiques contemporains. De Il était une fois quatre voleurs (1978), fable sur le pouvoir politique corrompu, à ses fantaisies politico-mythiques comme Morotundun (1982), il déploie une inventivité polémique et un imaginaire poétique dans une œuvre de plus de quarante pièces. Il a adapté le Revizor de Gogol au contexte nigérian avec beaucoup d'à propos : Qui a peur de Solarin ? (1978). Il est par ailleurs un éditorialiste vif et pertinent dans la presse de son pays. Il s'est essayé au roman philosophique dans le Collège choléra (1975), et a connu en tant que poète – sous le nom d'Okinba Launko – un succès qui lui a valu le prix de l'Association des écrivains nigérians en 1989 pour Pièces précieuses. Un recueil de ses pièces a paru aux États-Unis en 1995 (Louange de la sauterelle).

Ossorguine (Mikhaïl) , pseudonyme de Mikhaïl Andreïevitch Iline

Écrivain russe (Perm 1878 – Chabris 1942).

C'est en France, où il s'est installé à partir de 1923, qu'il publie son roman le plus célèbre, Une rue à Moscou (1928), vaste fresque où l'Histoire et les destinées individuelles sont ramenées à leur relation avec la marche de l'univers. Il poursuit sa réflexion sur la révolution dans Témoin de l'Histoire (1932). Ses souvenirs qui sont un élément important de la mémoire de l'émigration sont publiés après sa mort, en 1955.

Oster (Christian)

Romancier français (né en 1949).

Après quelques romans policiers publiés chez Fleuve noir, il découvre Cherokee de Jean Echenoz et se tourne vers les éditions de Minuit, où il publie Volley-Ball en 1989. Depuis, tout en publiant des contes humoristiques pour la jeunesse, il enchaîne des romans ouverts sur un quotidien insolite, aux personnages légèrement décalés et disponibles pour des aventures ou des amours improbables, où l'angoisse affleure derrière l'humour cocasse et impassible du langage et des situations (l'Aventure, 1993 ; le Pont d'Arcueil, 1994 ; Paul au téléphone, 1996 ; le Pique-nique, 1997 ; Loin d'Odile, 1998 ; Mon grand appartement, 1999, prix Medicis ; Une femme de ménage, 2001 ; Dans le train, 2002).

Oster Soussouev (Pierre)

Poète français (Nogent-sur-Marne 1933).

Reconnu très jeune par ses pairs, proche de Paulhan et admirateur de Saint-John Perse, il publie en 1955 le Champ de mai. L'œuvre est placée sous le signe de la totalité : les poèmes, numérotés comme les opus des musiciens, se suivent pour ne plus en faire qu'un, reflétant sur le mode de l'éloge enthousiaste la synthèse première du monde. Nourri d'une grande culture littéraire, Oster Soussouev revient sans cesse sur ses textes, au point que le terme d'achèvement et l'expression ne varietur ne font pas sens chez lui. La Grande Année (1964) et les Dieux (1970) revisitent le verset au mitan de l'œuvre. La rime est abandonnée vers cette époque. Publié en 2000, Paysage du Tout est une auto-anthologie. « Machine à indiquer l'univers », le poète est celui qui fait signe vers la globalité du monde. Insoucieux des débats d'époque sur le langage, plus sensible à l'éternel, Oster Soussouev, assurant aussi un précieux passage entre les générations, poursuit une (dé)marche solitaire, qui se refuse à assimiler modernité et art bref. Des livrets parmi lesquels Alchimie de la lenteur (1997) sont une parole d'escorte pour le poème en genèse, une sorte d'art poétique pour cette menée classique et dense.

Ostrovski (Aleksandr Nikolaïevitch)

Auteur dramatique russe (Moscou 1823 – Chtchelykovo, gouvern. de Kostroma, 1886).

Il grandit à Moscou, dans un quartier conservateur et traditionnel de marchands et d'hommes de loi, qu'il évoquera dans ses Esquisses d'un habitant de Zamoskvoretchié (1847) et qu'il mettra plus tard en scène. Il interrompit ses études à l'université et obtint un emploi modeste au tribunal de commerce : c'est là qu'il apprit à connaître à fond le milieu des petits fonctionnaires. Sa première pièce, Entre amis, on s'arrangera (1850), connut un immense succès, et son auteur fut vite considéré comme un successeur de Gogol. La pièce fut interdite de représentation, premier épisode d'une longue suite de démêlés avec la censure. Pendant un quart de siècle, Ostrovski a dominé le théâtre russe. Son activité a embrassé tous les genres, du drame historique (le Faux Dmitri, 1866) au vaudeville, de la satire à la féerie (la Jeune fille de neige, 1873) : en tout, une cinquantaine de pièces variées, dont le ressort est souvent l'argent et dans lesquelles les caractères sont révélés à travers les contingences d'un lieu et d'un moment précis, tout en ayant la force de types. Son humour, sa sympathie, sa finesse d'observation, une langue savoureuse font d'Ostrovski un grand écrivain, qui possède « la franchise naïve d'un poète populaire, le sentiment et l'amour de la vie » (Grigoriev). L'année de sa mort, il fut nommé directeur des théâtres de Moscou.

   Les conceptions esthétiques d'Ostrovski doivent beaucoup à Belinski : l'écrivain est un enquêteur, qui soumet à ses investigations certaines couches de la société. Il se doit de connaître à fond son sujet : Ostrovski entreprendra un voyage dans la région de la Volga, où se déroulent bon nombre de ses pièces. À ses débuts, il prolonge la tradition gogolienne de la comédie satirique : le caractère très noir, désabusé de ses pièces est peu à peu nuancé par l'apparition de personnages positifs. Ces derniers sont le plus souvent des « petites gens », un commis, un professeur et sa fille... C'est dans l'Orage (1859) que l'on en trouve la représentation la plus accomplie, avec le personnage de Catherine, l'héroïne, ardente, pure et affectueuse. Mariée à un jeune marchand timide, qui vit sous la coupe de sa mère, elle s'éprend d'un jeune homme qui, comme elle, souffre de l'obscurantisme de leur milieu. Elle cède à sa passion, mais, incapable de duplicité, sentant monter l'orage où elle voit le mécontentement du ciel, elle implore un pardon qui lui est refusé. Elle choisit alors la liberté dans la mort et se noie dans la Volga. La pièce est considérée comme le chef-d'œuvre d'Ostrovski, parce qu'elle met en scène des personnages pleins de vie, typiques, tout en offrant une intrigue à la logique implacable qui fait de ce drame provincial une véritable tragédie sur l'amour et la mort. Avec des pièces comme Un vieil ami vaut mieux que deux nouveaux (1860), les Jours pénibles (1863), Ostrovski crée un nouveau genre : ce sont des sortes de  « tableaux » de la vie moscovite ou provinciale, dans lesquels il plonge dans les détails du quotidien, difficile, de ses héros, d'origine modeste, opprimés, mais qui savent, souvent à l'instigation des jeunes femmes, se révolter. Dans ses dernières pièces, parfois qualifiées de « comédies mélancoliques », le dramaturge accorde une attention toute particulière au sort des femmes. La Fille sans dot (1878), Le cœur n'est pas une pierre (1878), les Talents et les admirateurs (1881) sont autant de portraits d'un personnage féminin, caractérisés par un souci de l'analyse psychologique et une atmosphère poétique jusqu'alors absents des pièces d'Ostrovski. Son théâtre est rapidement victime d'une « standardisation » des mises en scène, qui le réduit trop souvent à des formes vides. Les spectacles de Meyerhold (la Forêt en 1924) et de Stanislavski (Cœur ardent en 1926) jouèrent un rôle essentiel dans la « redécouverte » de cette œuvre.