Russie (suite)
La perestroïka
Au tout début de la perestroïka, trois romans marquent un élargissement dans les limites de la censure : Triste Polar (1986) d'Astafiev, l'Incendie (1985) de Raspoutine et les Rêves de louve (1986) d'Aïtmatov. L'allègement de la censure donne une nouvelle vie aux revues littéraires, au premier rang desquelles Novyï mir, Znamia, Droujba narodov, Oktiabr luttent pour imposer des auteurs oubliés ou censurés. L'axe principal de la littérature va devenir pendant plusieurs années la publication d'œuvres de plus en plus critiques à l'égard du stalinisme, puis du système socialiste en général, dues à des écrivains ayant vécu à différentes époques de l'histoire soviétique. Platonov, Boulgakov, Grossman sont enfin publiés sans coupures. La dénonciation des crimes de l'époque soviétique atteint son apogée en 1989 avec la publication des œuvres de Soljenitsyne. Cependant, c'est le roman les Enfants de l'Arbat (1987) de Rybakov qui a remporté le plus grand succès populaire de cette période. L'Union soviétique redécouvre également toute la littérature russe émigrée ; d'abord l'ancienne génération (notamment Nabokov) puis les émigrés récents (Siniavski, Aksionov, Maksimov, Soljenitsyne). Les penseurs occultés depuis des décennies comme les philosophes religieux du début du siècle, Berdiaev, Chestov, Boulgakov, sont publiés, lus, discutés.
Dans toute cette activité de redécouverte, les nouveaux noms passent plus ou moins inaperçus. Il faut noter cependant l'apparition d'auteurs « noirs » décrivant un monde sans espoir ni lumière, comme Petrouchevskaïa ou Sergeï Kaledine (né en 1949).
Littérature contemporaine
Avec la chute de l'U.R.S.S., la littérature russe est entrée dans une phase « post-moderne ». Ses sources remontent à l'underground, poétique essentiellement, des années 1970, la génération des « conceptualistes ». D. Prigov, V. Eremenko, A. Parchtchikov, L. Rubinstein cherchent un « degré zéro » de l'écriture poétique, ouvrant sur la vacuité du réel. Les recherches sur le langage (marquées par un intérêt renouvelé pour les expérimentations de Khlebnikov ou de Karms) et les jeux parodiques sont essentiels dans la formation du postmodernisme. Parmi les écrivains les plus représentatifs de ce courant, on peut citer, pour la prose, A. Siniavski, V. Sorokin ou V. Pelevine. Ce courant, pris dans un sens assez large, génère depuis plus de deux décennies en poésie (Aïgui, Brodski, S. Gandlievski, K. Kedrov, I. Kholin, T. Kibirov, V. Krivouline, E. Rein, G. Sapguir, O. Sedakova, E. Shvarts, V. Sosnora) comme en prose (Aksyonov, P. Alechkovsky, Iou. Alechkovsky, A. Bitov, Iou. Buida, S. Dovlatov, Venedikt Erofeïev, Viktor Erofeïev, M. Fedotov, A. Kabakov, M. Kharitonov, A. Kim, E. Limonov, V. Makanine, I. Mamleïev, V. Maramzine, V. Narbikova, E. Popov, N. Sadour, V. Sharkov, T. Tolstaïa) des œuvres très inégales, et parfois uniformes, mais qui témoignent d'une activité créatrice soutenue.