Brandt Corstius (Hugo)
Écrivain hollandais (Eindhoven 1935).
Mathématicien, spécialiste de l'intelligence artificielle (la Linguistique par ordinateur, 1978), c'est un écrivain satirique qui frôle la science-fiction (les Voyages du Père Key, 1966) et le conte moral (A est une lettre, 1975 ; Langue et Littérature d'Opperland, 1981).
Brandys (Kazimierz)
Écrivain polonais (Lódz 1916 – Nanterre 2000).
Né dans une famille de la bourgeoisie juive polonaise, il évoque la situation des intellectuels pendant la Seconde Guerre mondiale dans le Cheval de bois (1946). À 30 ans, il reçoit deux prix d'État qui consacrent son adhésion au réalisme socialiste : il est considéré par le parti communiste comme l'un des meilleurs écrivains marxistes. Pendant une dizaine d'années, il tente de rester fidèle au principe qui veut que les moyens utilisés par les communistes en Pologne sont parfois mauvais, mais que la cause qu'ils défendent n'en est pas moins sacrée (la Défense de Grenade, 1956 ; la Mère des rois, 1957). À partir de 1960, date de parution d'une nouvelle d'excellente facture, le Romantisme, le thème de la solitude de l'artiste devient dominant dans son écriture. Dès lors, la littérature est révolte, droit de parler au nom du « moi ». Écrire est plus une passion qu'un style chez Brandys, qui rejette les modèles traditionnels de la fiction, parodie volontiers le roman épistolaire (Lettres à Madame Z, 1962), prête à ses récits la forme d'entretiens (En Pologne, c'est à dire nulle part, 1976), de scénarios. Il exprime la complexité des phénomènes humains dans des essais (Souvenirs du présent, 1958-1968) et des récits d'inspiration autobiographique (Façon d'être, 1964 ; le Joker, 1966) ou historique (Variations postales, 1977). En 1977, il participe à la naissance du « samizdat » polonais avec le premier numéro de Zapis qui publie les textes rejetés par la censure communiste. Il se retrouve sur la liste des trente écrivains mis à l'index : la censure interdit jusqu'à la citation de leurs noms dans les publications. Surpris par l'état de guerre à New York, Kazimierz Brandys s'installe à Paris (1982). Dans ses Carnets (Carnets de Varsovie, 1981-1982 ; Carnets de Paris-New York, 1982-1984 ; Carnets de Paris, 1985-1987 ; Hôtel d'Alsace et Autres adresses, 1991), il commente l'histoire contemporaine, la naissance de Solidarność, l'état de guerre, les prises de position des écrivains polonais, l'antisémitisme. Il y relate également ses voyages, s'arrête à la situation de l'écrivain qui vit en exil, s'inquiète d'une Europe qui, selon lui, perd son instinct de conservation. Les Lettres à Madame Z. ont assuré à Brandys une audience internationale. En Pologne, c'est-à-dire nulle part attira plus particulièrement l'attention sur ce qui se passait à l'Est du mur de Berlin : l'individu a le sentiment d'être manipulé par le pouvoir en place, par l'histoire, par les événements. Il sait qu'il ne décide jamais de son devenir, qu'il n'est pas « un citoyen agissant ». L'absence de liberté, de vérité, l'écart entre la réalité et ce qui en est dit officiellement s'ajoutent à une propagande quotidienne qui finit par rendre les êtres inoffensifs devant l'assujettissement dont ils sont les victimes. Dans les romans de Brandys, des situations n'ayant pas plus d'assise dans la réalité qu'une rumeur, s'avèrent correspondre à la réalité (Rondo, 1989). Le vécu d'un vieil hospitalisé, incapable de se protéger des outrages de la maladie et des humiliations entraînées par les soins qui lui sont prodigués, est l'histoire racontée par son dernier roman, les Aventures de Robinson (1999). L'humour se double volontiers d'ironie pour éclairer la réflexion de ce témoin du XXe siècle.
Branner (Hans Christian)
Écrivain danois (Ordrup 1903 – Copenhague 1966).
Son premier récit (Jouets, 1935), son roman radiophonique (l'Histoire de Børge, 1942) témoignent de son goût pour la psychanalyse. Il est surtout connu pour son roman le Cavalier (1949), enquête sur les racines du nazisme. Avec Personne ne connaît la nuit (1955), il traite de l'Occupation. Branner a écrit pour le théâtre : Frère et Sœur (1952) et les Thermopyles (1957) étudient les liens entre humanisme et culpabilité.
Brant (Sebastian)
ou Sebastian Brandt
Humaniste alsacien (Strasbourg 1457 ou 1458 – id. 1521).
Professeur de littérature latine et de droit à Bâle, puis syndic et chancelier de Strasbourg, il doit sa renommée au poème satirique et didactique la Nef des fous (1494). Les 2 039 vers de cette œuvre sont répartis en 112 chapitres. Chaque chapitre évoque un vice humain personnifié par un fou. Il traite du thème des vanités du monde et de l'esprit et se fonde sur deux coutumes médiévales : l'habitude de se débarrasser des aliénés en les confiant à des bateliers ; les fêtes carnavalesques rhénanes caricaturant les métiers. Il propose une méditation sur les difficultés de l'Europe à la veille de la Réforme. Traduit en latin (Stultifera Navis, 1497), réédité en allemand (notamment sous le titre Der Narren Spiegel, « le Miroir des fous », 1519), l'ouvrage de S. Brant fut imité (notamment par T. Murner et Josse Bade) et inspira le roman de Porter, Ship of Fools (1962).
Brantôme (Pierre de Bourdeille, seigneur de)
Écrivain français (Bourdeille v. 1540 – 1614).
Homme d'action déçu qui trouva dans l'écriture une consolation partielle à ses déboires, il eut une vie mouvementée. Étudiant à Poitiers, il effectue à 20 ans son premier voyage en Italie. De retour en France, il s'attache aux Guises et participe aux guerres de Religion. En 1564, il parcourt l'Espagne. Puis il prend part à une expédition contre les Turcs dans l'île de Malte, et, de nouveau, guerroie en France. En 1584, un grave accident de cheval le contraint à la retraite. C'est alors qu'il entreprend d'écrire ses souvenirs et d'évoquer les nombreuses figures célèbres qu'il a pu côtoyer. Son œuvre, composée entre 1584 et 1614 et publiée pour la première fois un siècle et demi après sa mort, comprend une série de Vies (Recueil des Dames dont furent extraites les Vies des dames galantes, Vies des hommes illustres et des grands capitaines), un Discours sur les duels et des poésies. Oscillant entre les genres des Mémoires et celui des propos bigarrés, ses Vies constituent la plus vaste galerie de portraits d'hommes et de femmes illustres que nous ait léguée l'histoire de France. Élaborées à partir de souvenirs vécus aussi bien que de lectures, les Vies constituent une mine féconde (bien que parfois sujette à caution) de renseignements sur la vie de cour en France dans la seconde moitié du XVIe s., documentation que ne vient détourner aucune réécriture partisane qui ressortirait à des intentions apologétiques ou moralisantes. Brantôme y consigne tout ce qu'il a vu ou entendu dire, et aussi ce qu'il a lu, comme de véritables aventures dont il met en exergue le pittoresque : de là vient qu'il est souvent malaisé d'y démêler la part de la vérité historique de celle de la fiction. Sacrifiant l'exactitude au plaisir de conter, pliant le rythme du récit aux saillies d'un style plein de couleur et de verdeur, Brantôme reste le témoin le plus remarquable de la cour des Valois.