Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
H

Hériat (Raymond Payelle, dit Philippe)

Écrivain français (Paris 1898 – id. 1971).

Acteur, assistant cinéaste, il publie en 1931 un premier roman, l'Innocent. Il porte à la scène deux autres romans, l'Immaculée (1947) et les Noces de deuil (1953). Son cycle romanesque des Boussardel évoque de façon acerbe la bourgeoisie (les Enfants gâtés, 1939 ; Famille Boussardel, 1946 ; les Grilles d'or, 1957 ; le Temps d'aimer, 1960). Il publie également des souvenirs (Retour sur mes pas, 1959).

Hermans (Willem Frederik)

Écrivain hollandais (Amsterdam 1921-Utrecht 1995).

Sa vision cruelle du monde et sa violence polémiste ont souvent trouvé un terrain privilégié dans le microcosme universitaire auquel il appartient en tant que professeur de géophysique à Groningue (Mandarines au vitriol 1963-1983 ; Entre professeurs, 1975). Sa réflexion sur le langage (nourrie à la fois de l'analyse de Wittgenstein et des techniques surréalistes) et sur la violence (l'Univers sadique, 1964-1970) sous-tend un parti pris nihiliste qui fait de la littérature un règlement de comptes et qui, plus que les recherches poétiques (Horror coeli, 1946 ; Hypnodrome, 1947), nourrit les insolences calculées de romans et de nouvelles qui créèrent le scandale et une manière neuve d'envisager l'écriture (Défenses, 1947 ; les Larmes de l'acacia, 1949 ; la Chambre noire de Damoclès, 1958 ; D'innombrables millions, 1981 ; la Chevalière, 1984). Paris, où il vit depuis 1973, est le cadre de son roman Au pair (1989).

Hermant (Abel)

Écrivain français (Paris 1862 – Chantilly 1950).

Son œuvre est une chronique humoristique de son temps : mœurs « républicaines » (Monsieur Rabosson, 1884 ; la Carrière, 1894), monde libertin et « parisien » (Confidences d'une aïeule, 1893 ; Confidences d'une biche, 1909), cosmopolitisme (Trains de luxe, 1908), modes sentimentales (Serge, 1891). Principal auteur de la Grammaire de l'Académie française (1932), il signa Lancelot ses chroniques linguistiques publiées dans le Temps. Élu à l'Académie française en 1927, il en fut exclu en 1945, et condamné à la réclusion perpétuelle pour avoir écrit dans la presse parisienne pendant l'Occupation. Rêveries et souvenirs d'un philosophe proscrit (1949) évoquent cette période.

Hermlin (Stephan)

Écrivain allemand (Chemnitz 1915 – Berlin 1997).

Fils de grands bourgeois juifs, il devient communiste (1931) et résiste aux nazis (1933-1936). Exilé, il s'engage en Espagne contre Franco, puis vient en France. Il traduit son expérience dans des poèmes classiques inspirés de Hölderlin (1945). Établi à Berlin-Est (1947), auteur de récits, de poèmes, d'essais (Lectures, 1974) et d'une autobiographie (Crépuscule, 1979), il croit en l'édification du socialisme. Mais après 1956, son refus du stalinisme l'éloigne du régime. La R.D.A. officielle faisait son éloge tout en s'en méfiant ; il est néanmoins resté fidèle à son engagement communiste.

Hernandez (Amado)

Écrivain philippin d'expression tagale (Batangas 1903 – Manille 1970).

Poète engagé, virtuose des joutes du balagtasan, impliqué dans la rébellion de 1951, il passa treize années en prison. Toute son œuvre lyrique témoigne de ses préoccupations sociales et manifeste « l'ambiance de la grandeur » : Wala nang lunas (Il n'y a plus de remède, 1932) ; Isang Dipang Langit (Une toise de ciel, 1961) ; Bayang Malaya (Peuple libre, 1969). On lui doit aussi des récits dans la tradition de critique sociale de Rizal (Mga Ibong Mandaragit [les Oiseaux de proie], 1960).

Hernández (Felisberto)

Écrivain uruguayen (Montevideo 1902 – id. 1964).

Pianiste de talent, il cultiva aussi une fantaisie poétique originale dans Livre ouvert (1929), l'Envenimée (1931), réflexion sur l'écriture, Au temps de Clemente Colling (1942), où il évoque son enfance, les Hortenses (1949) et la Maison inondée (1961), au climat fantastique. Son œuvre, peu connue du grand public malgré les critiques élogieuses de lecteurs comme Supervielle, est considérée par ses pairs comme l'une des plus grandes de la littérature uruguayenne du XXe siècle.

Hernández (José)

Poète argentin (San Martín 1834 – Buenos Aires 1886).

Né dans une famille poursuivie par le dictateur Rosas, il fut d'abord soldat avant d'obtenir un poste au Sénat. Il dirigea le journal El Argentino, tribune des adversaires de B. Mitre ; l'arrivée de celui-ci au pouvoir le contraignit à se réfugier en Uruguay. De retour en Argentine, il s'opposa au président Sarmiento et dut à nouveau s'exiler, cette fois au Brésil, avant de regagner définitivement sa patrie, où il devint député provincial, puis sénateur. Ce personnage à la vie mouvementée doit sa renommée littéraire à son Martín Fierro, épopée sur la vie des gauchos et véritable poème national, chef-d'œuvre du genre écrit en deux temps, El Gaucho Martín Fierro (1872) et le Retour de Martín Fierro (1879). Entre les deux parties, il existe toutefois de grandes différences thématiques. La première (2 316 octosyllabes répartis en 13 strophes) présente un gaucho traditionnel, qui chante en s'accompagnant de sa guitare son affrontement avec des pouvoirs publics limitant sa liberté ; la seconde partie (4 894 octosyllabes répartis en 33 strophes), au contraire, montre son assimilation à une société qui a radicalement changé durant les sept ans qui la séparent de la première. L'Argentine s'est en effet mise en marche vers la modernisation, et le gaucho doit s'adapter – ou disparaître. En revanche, la société doit lui permettre de s'intégrer à elle, car il est porteur d'une grande part de l'essence de l'Argentine. Le gaucho, héros de quantité d'œuvres antérieures, est ici transcendé par un auteur qui en connaît parfaitement la vie et la psychologie : Hernández a réussi un portrait nuancé et précis du représentant d'un groupe social à son déclin, et qui jusque-là avait plutôt été caricaturé que peint. La renommée de son Martín Fierro a malgré tout occulté l'intérêt de sa Vie de Chacho (1863) ou de son Instruction du fermier (1881).

Hernández (Miguel)

Écrivain espagnol (Orihuela 1910 – Alicante 1942).

Il doit sa renommée non au néogongorisme de son premier recueil de vers (Expert en miroirs, 1933) ni à son drame d'inspiration caldéronienne (Qui t'a vue et qui te verra ô ombre de qui tu es, 1934), mais aux poèmes d'amour de l'Éclair ininterrompu (1936). Combattant républicain lors de la guerre civile, il rend hommage aux humbles dans son drame en vers le Meilleur Laboureur (1937). Écrit en prison (1939-41), le Recueil d'absence est publié en 1958.