Malrieu (Jean)
Poète français (Montauban 1915 – Penne-de-Tarn 1976).
Instituteur et militant communiste, il fait ses débuts grâce à Aragon avec Préface à l'amour (1953). Dans ses recueils poétiques souvent en vers libres d'un lyrisme charnel, influencé par Eluard, il prône l'« amour sublime » (Vesper, 1963 ; le Nom secret, 1968 ; le Château cathare, 1972 ; Possible Imaginaire, 1975). Proche des surréalistes (Breton salua en lui un « poète-né »), il fonda les revues Action poétique (1950) et Sud (1970).
Malva (Alphonse Bourlard, dit Constant)
Écrivain belge de langue française (Quaregnon 1903 – Bruxelles, 1969).
Il descend à la mine dès 15 ans. H. Poulaille, qui patronne à Paris la « littérature prolétarienne », publie en 1932 son premier ouvrage, Histoire de ma mère et de mon oncle Fernand, d'après les confidences de sa mère. Il participe, à Bruxelles, au Front littéraire de gauche de Plisnier et d'Ayguesparse et, à La Louvière, au groupe surréaliste Rupture. En 1947, Sartre publie dans les Temps modernes des extraits de son journal d'une année de mine, Ma nuit au jour le jour, qui ne sera publié in extenso qu'en 1954, après son seul récit vraiment romanesque le Jambot (1951). Si l'œuvre est essentiellement autobiographique et de témoignage, Malva n'en est pas moins un remarquable conteur pour qui écrire « est une longue confidence à [ses] frères anonymes perdus dans la même nuit ».
Malychko (Andriï Samoïlovytch)
Poète ukrainien (Oboukhiv 1912 – Kiev 1970).
Auteur de poèmes historiques célébrant la société nouvelle (Patrie, 1936 ; les Hirondelles, 1940), il fut révélé par sa poésie de guerre (Mon Ukraine, 1942 ; Prométhée, 1946). Exaltant la paix retrouvée (Livre de printemps, 1949 ; Outre-océan, 1950), il évolua vers un lyrisme philosophique chargé d'interrogations (Mes écrits, 1956 ; le Midi du siècle, 1960 ; Transparence, 1962 ; Août de mon âme, 1970).
Mamet (David)
Dramaturge américain (Chicago 1947).
Reprenant la mythologie américaine pour en faire la critique, Mamet a été révélé par American Buffalo (1975), chronique de la préparation d'un cambriolage dont le seul but est de donner un sens à l'existence des trois personnages. De plus en plus beckettien, l'univers de Mamet s'enrichit notamment avec Glengarry Glen Ross (1983), qui met en scène les employés d'une agence immobilière un peu louche. Speed the Plow (1987) approfondit cette problématique du discours performatif qui dupe celui qui l'écoute, le portant au niveau d'une véritable persécution par le langage. Traître plutôt que support de la communication, il est pour Mamet le moyen de démonter l'illusion de toute rédemption : Oleanna (1992) et le Cryptogramme (1995) confirment cette prise de position.
Mamleiev (Iouri Vitalievitch)
Écrivain russe (Moscou, 1931).
Passionné de philosophie allemande, puis orientale, de théosophie et de sciences occultes, il dirige un cercle ésotérique (le Gambit de Moscou, 1985). Il développe une « métaphysique du moi » exposée dans le Destin de l'existence (1993), selon laquelle l'homme n'est que l'enveloppe d'un principe divin, qu'il peut reconnaître en se dépouillant de ses qualités humaines. Se considérant lui-même comme un réaliste métaphysique, il écrit des récits peuplés de monstres et de psychopathes, comme ses Chatouny (1968), avides de découvrir les forces mystérieuses et effrayantes qui régissent le monde, où le christianisme, comme religion de la charité, est tourné en dérision.
Mammeri (Mouloud)
Écrivain algérien de langue française (Taourirt-Mimoun 1917 – Ain Defla, 1989).
Son roman la Colline oubliée (1952) porte sur les problèmes du village kabyle (ennui et malaise des jeunes gens, choix de l'exil) et déclencha à l'époque une vive polémique. Autres titres : le Sommeil du juste (1955), sur l'intellectuel revenu désillusionné d'Europe, l'Opium et le Bâton (1965), sur la guerre de libération, la Traversée (1982), sur les lendemains amers de l'indépendance. Traducteur des poèmes kabyles (les Isefra, poèmes de Si Mohand, 1969 ; Poèmes kabyles anciens, 1980) et de contes (Machaho, 1980), Mammeri est aussi l'auteur d'une grammaire berbère en langue kabyle, et ses recherches portent sur la tradition orale algérienne dans les parlers berbères. Il a également écrit pour le théâtre (le Foehn, 1962 ; le Banquet, 1973).
Manas
Épopée populaire kirghize, qui comprend plus de 500 000 vers organisés en trilogie. Si ses épisodes les plus archaïques, merveilleux (naissance fabuleuse du héros, invulnérabilité, magie) ou romanesques (mariage de Manas avec la belle Kanykeï, conseils des sages Bakaï et Kochoï, fraternité « de sang » avec Almambet), semblent dater des IXe-Xe s., le corps du poème évoque plutôt la lutte patriotique du héros et de sa lignée (Semeteï et Seïtek) contre les envahisseurs des XVIe -XVIIe s., qu'incarnent monstres, géants et magiciens. Transmis oralement par les « manastchi », ce poème a été étudié par le savant kazakh Valikhanov (1856) et les folkloristes soviétiques.
Manchette (Jean-Patrick)
Romancier français (Marseille 1942 – Paris 1995).
Il introduit des préoccupations politiques et sociologiques dans ses « néo-polars » aux antihéros équivoques et névrosés (l'Affaire N'Gustro, 1971 ; Nada, 1972 ; Morgue pleine, 1973 ; Que d'os, 1976). Son style rapide, ironique et visuel, parsemé de digressions plus méditatives, le rapproche de l'écriture cinématographique (Fatale, 1978 ; la Position du tireur couché, 1982). On lui doit aussi des scénarios, des bandes dessinées et une comédie-rock, Cache ta joie (1979).
Manciet (Bernard)
Écrivain français de langue d'oc (Sabres, Landes, 1923 – Mont-de-Marsan 2005).
Il pratique d'abord l'ode (Ode à notre Dame de la Peur, 1950), mais c'est avec Accidents (1955), évoquant un séjour prolongé dans l'Allemagne d'après-guerre, qu'il apporte un souffle véritablement nouveau à la poésie occitane. En 1972, avec Gesta, il se retourne contre l'occitanisme militant. Roncevaux (1977) dit l'attachement fort aux racines, en même temps que la fierté de la renaissance moderne d'une langue. Le lyrisme se déploie sur un mode épique dans cette sorte d'opéra monde qu'est l'Enterrement à Sabres (1989), son chef-d'œuvre, somme d'une vie organisée autour de la puissante figure, largement mythique, de la Dauna, épicentre d'un monde entre terre et ciel, entre nature panique et forces de la mort, entre petites gens et Dieu. Ses sonnets (Sonets, 1996) au lyrisme baroque sont marqués par la lecture des poètes occitans du XVIIe siècle.