Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
K

Kipphardt (Heinar)

Écrivain allemand (Heidersdorf, Silésie, 1922 – Angelsbruck 1982).

Dans la tradition du théâtre « anti-illusionniste » de Piscator, ses pièces abordent les problèmes sociaux et politiques du présent : bureaucratie bornée de l'Est (Recherche Shakespeare désespérément, 1953), survivance du nazisme à l'Ouest (le Chien du général, 1962), abus de la psychiatrie (Mars, 1980), le poids du passé nazi (Joël Brand, 1965 ; Frère Eichmann, 1983). L'Affaire Oppenheimer (1964) met en scène l'homme de science devenu malgré lui complice de l'œuvre de destruction. Ces pièces historiques sont caractéristiques du « théâtre documentaire » allemand.

Kirghizstan

Jusqu'au XXe s., les nomades kirghizes ne connaissent qu'une littérature orale, épique (Manas, Kedeï-khan, Kourmanbek), d'inspiration nationale, guerrière, et lyrique, où le peuple donne libre cours à ses plaintes et ses aspirations. L'union à la Russie (fin XIXe s.) stimule l'apparition, face aux tenants de l'ordre patriarcal (Kalygoul, Moldo Kylytch), de thèmes de progrès social qu'expriment les akynes Toktogoul Satylganov (1864-1933), Togolok Moldo (1860-1942), Barpy Alykoulov (1884-1949). En 1917, la littérature kirghize met d'abord au service de la société nouvelle une poésie écrite dérivée des formes orales avec A. Oussenbaïev (1894-1963) et T. Moldo, puis apprend avec les poètes de l'Étincelle rouge (1924) à se dégager du modèle oral pour acclimater l'esthétique réaliste-socialiste et les genres européens : théâtre avec D. Bokonbaïev (1910-1944), D. Tourousbekov (1910-1943), Tokobaïev, Djantochev, poésie et fiction avec A. Tokombaïev (né en 1904), T. Sydykbekov (né en 1912), K. Baïalinov. Après la guerre, émerge une nouvelle génération de poètes – Osmonov (1915-1950), Oumetaliev (né en 1908), S. Eraliev (né en 1921), M. Abylkassimova (née en 1936) –, de prosateurs (N. Baïtemirov) et de dramaturges (K. Malikov, Abdoumomounov) libérés des schémas classiques, tandis que le roman donne avec Aïtmatov un écrivain majeur à la littérature russe.

Kirk (Hans)

Écrivain danois (Hadsund 1898 – Copenhague 1962).

Son premier roman, les Pêcheurs (1928), est le type même du « roman collectif ». Cette œuvre, où se reflètent les convictions socialistes de l'auteur, se poursuit avec les Journaliers (1938) et les Temps nouveaux (1939) : la fin de la trilogie disparut pendant l'occupation allemande. Dans le Fils de la colère (1950), Kirk voit en Jésus le premier communiste qui « échoue » en hésitant à passer du stade social à la révolution politique.

Kirsch (Ingrid Bernstein, dite Sarah)

Poétesse allemande (Limlingerode 1935).

Ouvrière dans une raffinerie de sucre, elle étudie la biologie avant de fréquenter à Leipzig l'Institut Becher, qui forme les écrivains de R.D.A. Elle appartient à la génération qui s'éloigne de la culture officielle. Solidaire de Biermann lors de son expulsion (1976), elle passe à l'Ouest (1977). Auteur de livres pour enfants, puis d'une œuvre lyrique dominée par les thèmes de l'amour et de la nature, elle vise à un dépassement magique du quotidien, comme dans la Femme panthère (1973), livre-document sur les femmes en R.D.A. Reconnue par un large public, elle reçoit le prix Büchner (1996).

Kis (Danilo)

Écrivain serbe (Subotica 1935 – Paris 1989).

Il était très proche des courants européens contemporains. La pureté et la sobriété de son style en font un des grands classiques de notre temps. Ses œuvres principales traduites en français sont : le Jardin, cendre (1965), Chagrins précoces (1970), le Sablier (1971), Po-éthique I (1971), Po-éthique II (1974), Une tombe pour Boris Davidovic (1976), la Leçon d'anatomie (1978), Encyclopédie des morts (1985).

Kisfaludy (Károly)

Poète et auteur dramatique hongrois (Tét 1788 – Pest 1830).

Frère de Sándor, il fut par ses pièces historiques (les Tatars en Hongrie, 1819)  le véritable fondateur de la littérature dramatique. Ses comédies (les Galants, 1817) figurent toujours au répertoire du Théâtre national hongrois.

Kisfaludy (Sándor)

Poète hongrois (Sümeg 1772 – id. 1844).

Prisonnier de guerre en Provence (1796), il se pénétra du génie de Pétrarque et de la Nouvelle Héloïse, dont s'inspirent ses Amours tristes (1801) puis les Amours heureuses (1807).

Kishon (Ephraïm)

Écrivain israélien (Budapest 1924 – Appenzell 2005).

Il émigre en 1949 en Israël, où il ne tarde pas à tenir la chronique satirique du quotidien Omer puis de Maariv et à écrire des pièces de théâtre humoristiques (Son nom le précède, 1952 ; Contrat de mariage, 1961) et des romans. La plupart de ses œuvres brossent, en un langage virtuose, un portrait savoureux de la vie politique et sociale d'Israël (l'Arche de Noé, classe touriste, 1963 ; La baleine a le mal de mer, 1965 ; le Renard dans le poulailler, 1969 ; Paradis à louer, 1979 ; la Guerre des fourmis, 1981 ; Hercule et les sept nains, 1995).

kiswahili

Le kiswahili (ki– est le préfixe de classe, qui permet de substantiver la racine –swahili) est la principale langue écrite de l'Afrique subsaharienne. Il est parlé par plus de cinquante milllions d'individus entre l'océan Indien et les Grands Lacs, alors que le nombre de ceux qui s'identifient comme ethniquement « swahili » est très faible. Cette langue, issue de la rencontre entre les langues bantoues et le vocabulaire arabe, est écrite depuis des siècles, puisque l'islam a été présent sur la côte de l'océan Indien dès le VIIe siècle. De nombreux textes oraux swahili ont été recueillis et transcrits : l'on y retrouve parfois des échos des littératures arabes ou persanes. Au XIXe siècle, Al Inkishafi constitue le premier texte lié à l'art de vivre et à la morale de l'homme de bien musulman, alors que le poème de Mwana Kupona indique les voies du bon comportement féminin. D'autres textes, comme la chronique de Kilindi, mi-légendaire, mi-historique, écrite en 1906 par Abdallah bin Hemedi 'lAjjemy et consacrée à la dynastie de ce nom qui régna, jusqu'aux débuts de la colonisation, sur le peuple Shambala et les peuples voisins au nord-est de la Tanzanie, sont bien diffusés. Les poèmes de Muyaka renvoient à une chronique satirique et personnelle de la vie à Mombasa vers 1830. Ces textes composés dans une métrique arabe circulent sous forme de manuscrits avant leur impression au XXe siècle. C'est en 1901 qu'un marchand d'esclaves zanzibarite, Tippu Tip, raconte en kiswahili, graphisé en caractères arabes, mais aussitôt romanisé, sa vie, sans référence à l'islam. C'est là un geste fondateur d'un nouveau rapport à l'histoire, alors que les Missions chrétiennes adoptent le kiswahili comme véhicule de leur enseignement. Un comité pour l'aménagement du kiswahili est créé par l'administration coloniale. Le premier prosateur et poète du nouveau kiswahili, Shaaban Robert, ancien fonctionnaire colonial, en sera le président jusqu'à sa mort, en 1962. L'expression swahili graphisée en caractères latins se diffuse au Tanganyika : de nombreux poètes accompagnent le développement du nationalisme tanzanien, puis de l'ujamaa, version tanzanienne du socialisme africain, avec des poètes comme Mnyampala.

   Sur la côte, le roman naît à Zanzibar avec les enquêtes policières de Mohammed Said Abdullah, puis avec les romans historiques de Adam Shafi Adam, de Mohammed Sulaiman Mohammed. Dans les années 1970-1990, une nouvelle génération d'intellectuels apporte au roman swahili une nouvelle sophistication : E. Kezilahabi, M. Said Mohammed en sont les meilleurs représentants. L'expression swahili a pris aussi racine dans l'intérieur du continent : Aniceti Kitereza, les Enfants du faiseur de pluie (I980, trad. fr. 1999). Abdellatif Abdallah, pour la poésie, et Ebrahim Hussein, pour le théâtre, sont aujourd'hui les références littéraires des générations qui ont vu grandir le kiswahili standard.