Solomos (Dionysios, comte)
Poète grec (Zante 1798 – Corfou 1857).
Aristocrate heptanésien d'éducation italienne, il se convertit au grec lors de son retour dans son île natale et réapprend sa langue aux meilleures sources, celles du chant populaire et de la tradition crétoise d'Erotokritos. Il chante le combat des Grecs pour la liberté dans l'Hymne à la liberté (1823), devenu par la suite l'hymne national grec, puis le Poème sur la mort de lord Byron (1824), et défend avec ferveur la langue du peuple dans un Dialogue en prose (1823-1825). La Femme de Zante (1826), texte en prose d'une liberté et d'une modernité de ton étonnantes, ne sera publiée qu'en 1927. La chute de Missolonghi lui inspire les Libres Assiégés (1828), poème épique et philosophique dans lequel il oppose à la forteresse matérielle et vulnérable où luttent les assiégés la forteresse spirituelle et inexpugnable qu'est leur âme. De grandes compositions restées inachevées (Lambros le Crétois, 1833-1834 ; Porphyros, 1847-1849) achèvent de révéler la délicatesse et la pureté de l'art de celui qui fut l'initiateur de l'école poétique ionienne et le père de la poésie moderne en Grèce.
Solooukhine (Vladimir Alekseïevitch)
Écrivain russe (Aliopino, région de Vladimir, 1924 – Moscou 1997).
Fils de paysans, il est révélé par des poèmes méditatifs où s'exprime son double souci de la nature et du passé national. À l'étranger, il est surtout connu pour ses nouvelles lyriques (les Chemins de Vladimir, 1957, ou la Goutte de rosée, 1960, qui font le portrait minutieux d'un village et de ses habitants). Apparaissant généralement en héros principal de ses récits (la Tartine de miel, 1976 ; la Baguette magique, 1983), il déplore dans un esprit passéiste et slavophile la transformation du monde rural. Ses livres autobiographiques consistent souvent en une dénonciation des mythes communistes (le Rire derrière l'épaule gauche, 1988 ; la Coupe, 1997).
Solstad (Dag)
Écrivain norvégien (Sandefjord 1941).
Après des nouvelles kafkaïennes (Spirales, 1965) et expérimentales (Un recueil de textes en prose, 1967), un roman (Vert de gris ! Vert !, 1969) inspiré de Gombrowicz, il aborda la littérature engagée avec Arild Asnes (1971). Marxiste-léniniste, il met en accusation la société bourgeoise dans une grande trilogie sur la classe ouvrière et la guerre (Trahison – les années d'avant-guerre, 1977 ; Guerre, 1978 ; Pain et Armes, 1980).
Somaize (Antoine Baudeau de)
Écrivain français (1630 ? – ?).
De cet auteur quasi inconnu, seules demeurent des œuvres consacrées aux précieuses, écrites juste après le succès des Précieuses ridicules de Molière : comédies (les Véritables Précieuses, 1660 ; le Procès des précieuses, 1660) et dictionnaires (le Grand Dictionnaire des précieuses ou la Clef de la langue des ruelles, 1660 ; le Grand Dictionnaire des précieuses, 1661), mêlant la satire et l'éloge, constituent un document intéressant, mais ambigu, sur ce phénomène socio-littéraire.
Somalie
Il n'existe pas, à proprement parler, de littérature écrite en somali avant l'introduction de l'orthographe nationale en 1972 : de fait, la littérature somalie est aujourd'hui la seule littérature couchitique écrite. On ne saurait pourtant considérer le corpus littéraire effectivement écrit à ce jour que comme une infime partie d'une littérature essentiellement orale, constituée depuis des siècles en ses genres, ses formes, ses thèmes particuliers, et qui continue d'occuper une position centrale dans la culture somalie autant par son rôle socio-politique que comme lien culturel national.
La littérature écrite en somali est d'abord, par priorité, une littérature de transcription : il s'agissait en effet, par un immense travail de collecte soutenu à la fois par les organismes gouvernementaux et le zèle patriotique de l'élite intellectuelle, en particulier de Muuse Ismaaciil Galaal (né en 1919), de préserver le trésor culturel de la nation. L'avènement de l'écrit aura probablement, sur l'évolution des genres littéraires, une influence qu'il n'est pas encore facile d'évaluer, mais qui laisse prévoir un développement accéléré des genres en prose, traditionnellement considérés comme secondaires dans une société pour qui l'art poétique est une caractéristique essentielle de son génie littéraire.
La poésie
La Somalie traditionnelle a bâti sur la langue non écrite une tradition poétique d'origine immémoriale. Particulièrement développée chez les Somalis du Nord (nomades pastoraux), extrêmement structurée, la poésie constitue encore à ce jour le mode le plus « noble » d'expression littéraire. On dénombre quelque quarante formes de poésie en Somalie : avant la Seconde Guerre mondiale, les genres classiques traditionnels, gabay, geerar, jiifto, buraanbur, ont dominé entièrement la vie culturelle. Vie et mort, guerre et paix sont les thèmes le plus couramment traités. À partir de 1940, la poésie renaît grâce à l'essor d'un nouveau genre, le heello, qui se différencie des genres classiques principalement par l'accompagnement musical et par l'évolution des thèmes (anticolonialisme, pansomalisme, rôle des femmes dans la société moderne).
L'art poétique de la Somalie traditionnelle possède trois caractéristiques fondamentales : 1) la rigidité formelle, combinant règles allitératives et lois quantitatives (l'allitération choisie doit être maintenue dans tout le poème, dont chaque vers contient obligatoirement un ou plusieurs mots commençant par un son donné ; les genres sont différenciés par le nombre et la combinaison des unités métriques) ; cette double contrainte, qui a grandement contribué au développement et à la richesse du vocabulaire poétique, joue un rôle mnémotechnique important, en même temps qu'elle garantit la préservation formelle de l'œuvre ; 2) l'absence d'improvisation : poète et récitant sont deux fonctions clairement définies dans la société traditionnelle ; chacune a ses techniques propres, chacune a son prestige. Rarement auteur lui-même, le récitant est en quelque sorte le vivant support du poème qui se transmet fidèlement pendant plusieurs générations, non comme élément anonyme de folklore national, mais comme une authentique œuvre littéraire obligatoirement « signée » du nom de son auteur ; 3) la finalité : tout poème somali est composé dans un but précis, pour une circonstance particulière, ou dépositaire d'un message, plus ou moins codé en langue poétique. Considéré comme la forme d'expression poétique la plus élevée, le gabay est réservé au commentaire sérieux, philosophique, social ou politique (ainsi la plupart des gabay du célèbre révolté Maxamad Cabdulle Xasan [1864-1920], le « Mad Mullah of Somaliland », étaient-ils destinés à soutenir la cause des Derviches contre l'impérialisme euro-abyssin). Aujourd'hui, la poésie continue d'être un instrument puissant de persuasion politique ou de mobilisation, une force effective dans le contexte de la vie somalie moderne, nomade ou urbaine : poème d'amour à l'origine, et presque toujours poème d'amour en apparence, le heello est étroitement lié au développement du nationalisme somali. Les moyens de diffusion modernes (journaux, radio, bandes magnétiques) accroissent encore le prestige des poètes.
Parmi les poètes classiques, Raage Ugaas (XVIIIe-XIXe s.) s'impose, par sa maîtrise des ressources de la langue, comme un modèle de style. L'œuvre de Maxamad Cabdulle Xasan comme celle d'Ismaacil Mire (1884-1950), un de ses alliés politiques, immortalise l'histoire troublée de leur temps. Faarax Nuur (vers 1850-1930) a écrit, sur les thèmes des luttes claniques, de célèbres poèmes d'inspiration anticolonialiste. Enfin Salxaan Carrabey (vers 1850-v. 1940) doit être mentionné comme un des plus féconds et des plus novateurs de sa génération.
La radio, les journaux ont rendu célèbres nombre de poètes contemporains dont l'œuvre, caractérisée par l'art du raccourci, de l'image, de la métaphore, conserve le caractère engagé de la poésie traditionnelle : ainsi Bounderi Cilmi, Cadbullaahi Muse, Cabdulle Guuire Cali.