Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
H

Hadewijch

Mystique brabançonne (XIIIe s.).

Elle fut probablement béguine à Nivelles. Ses Poèmes strophiques et ses Visions subliment la thématique courtoise et le vocabulaire de la lyrique profane en une poésie d'amour mystique qui révèle une inspiration néoplatonicienne. Ses 31 Lettres, l'un des premiers chefs-d'œuvre de prose dans une langue vulgaire européenne, explicitent sa doctrine spirituelle dans une perspective catholique plus orthodoxe et où transparaît l'influence de saint Bernard.

Hadith

Mot arabe désignant « une parole » ou « une histoire », sachant que le Hadith indique plus spécifiquement les paroles et les comportements du prophète (ou accessoirement de ses compagnons) tels qu'ils ont été rapportés par divers transmetteurs. Ils forment la seconde source légale de l'islam, dite aussi sunna. Du point de vue littéraire, outre les divers récits qui portent le titre de Hadith untel... au sens de Histoire d'untel, les techniques propres aux traditions prophétiques ont eu un impact certain sur certaines formes de la littérature arabe médiévale. La citation d'une quelconque anecdote, si l'on veut donner du poids à celle-ci et faire valoir sa réalité, doit être accompagnée par la chaîne des transmetteurs, depuis la source première de l'anecdote, idéalement l'un des protagonistes de l'événement rapporté, jusqu'à l'auteur qui cite ledit événement : c'est en effet le traitement réservé au Hadith (prophétique) afin d'en garantir l'authenticité. Un tel procédé a sans doute eu des effets non négligeables sur la perception de la fiction (assumée comme telle) par les lettrés arabes.

Hadj-Ali (Bachir)

Écrivain et responsable politique algérien (Alger 1920 – Alger 1991).

Il fut l'un des dirigeants du Parti communiste algérien, auquel il adhéra dès 1945, pendant la guerre d'Algérie, puis opposant au régime du colonel Boumediene. Emprisonné par les autorités françaises en 1954, puis de 1965 à 1971, il est l'auteur d'écrits militants, mais aussi un remarquable poète et un musicologue averti, la musique étant à la fois thème et modèle d'expression de sa poésie : Chants pour le onze décembre (1961), l'Arbitraire (1966), Que la joie demeure (1970), Mémoire-Clairière (1978), Actuelles-partitions pour demain (1980).

Hafez (Chamsoddin Mohammed)

Poète persan (Chiraz v. 1325 – id. 1390).

Il vécut à la cour des Mozzafarides de Chiraz. Son Divan le consacra comme le maître incontesté du ghazal et le virtuose du langage analogique, ce qui rend sa poésie difficile à interpréter. La tendance orientale est de lire Hafez comme un mystique, la tendance occidentale est d'y voir l'expression complexe des multiples facettes d'un « honnête homme » du XIVe siècle. Éloge des princes, thèmes érotiques et bachiques, « libertinage », descriptions de la nature et élans religieux s'entremêlent avec une étonnante liberté d'esprit et répondent aux aspirations de chaque lecteur, ce qui explique que son Divan soit si populaire en Iran et serve de moyen de divination.

Haggard (sir Henry Rider)

Écrivain anglais (Bradenham Hall, Norfolk, 1856 – Londres 1925).

Cet ami intime de Kipling fut à la fois économiste, juriste, spécialiste des questions sociales et technicien des problèmes agricoles. Il est surtout connu pour deux cycles, celui d'Allan Quatermain, qui comprend 18 volumes, dont les Mines du roi Salomon (1885), et celui de Elle-qui-doit-être-obéie (1887), qui en comprend huit. Personnages immortels, aventuriers, magie noire et cités disparues sont les ingrédients de ces textes qui relèvent à la fois du roman d'aventures, du fantastique, de la science-fiction et même, dans certains cas, du roman historique.

Hagiwara Sakutaro

Écrivain et poète japonais (Maebashi 1886 – Tokyo 1942).

Fils d'un médecin de province, mauvais écolier de santé chétive, éveillé à la littérature dès l'adolescence, il essaie trois propédeutiques dans différentes villes sans jamais réussir. Pendant ces longues années d'oisiveté, il découvre des auteurs occidentaux tels que Poe, Nietzsche, Dostoïevski, Schopenhauer, compose des tanka, et se passionne pour la mandoline. En 1913, il commence à publier des poèmes dans la revue Zamboa, présidée par Kitahara Hakushu, et fait connaissance avec Muroo Saisei. Le lyrisme du tanka se transforme alors en une inquiétude existentielle marquée par une sensibilité morbide et la conscience d'une culpabilité. La publication en 1917 de son célèbre recueil de poèmes libres en langue parlée, Hurler à la lune, fait grande sensation et le fait reconnaître comme poète. Sa sensibilité esthétique mélancolique et remarquable par sa musicalité, en prose comme en poésie, le couronnement qu'il apporte à la poésie moderne du Japon, le font souvent comparer à Baudelaire. Un désir nouveau (recueil d'aphorismes, 1922), Chat bleu (recueil de poèmes libres en langue parlée, 1923), Principe de la poésie (essai, 1928), l'Île glacée (recueil de poèmes en langue classique, 1934), la Ville des chats (conte poétique, 1935), Buson, poète de nostalgie (critique, 1936).

Haik (Fardj Allah)

Écrivain libanais de langue française (Bayt Chabab 1909 – id. 1979).

Il débuta par des recueils lyriques (Larmes et Soupirs, 1927 ; le Paradis de Satan, 1929), puis publia des romans (Barjoute, 1940 ; Helena, 1941 ; Gofril le Mage, 1947 ; la Crique, 1964 ; De chair et d'esprit, 1968), où il décrit la vie et les mœurs du terroir libanais. On lui doit aussi des essais (Yésouh, 1946 ; Dieu est libanais, 1947) et une Lettre d'un barbare aux civilisés (1971).

haikai

forme poétique japonaise, abréviation de haikai no renga. Le terme haikai, qui signifie « jeux d'esprit », désignait au départ un style humoristique de waka dont Recueil de waka de jadis et d'aujourd'hui, achevé en 905, contient quelques exemples. Adopté par les poètes de renga, il donne naissance, à mesure que le renga s'épure et se transforme en une forme poétique sérieuse, à un genre distinct : le haikai renga ou « renga comique ». Pratiqué sous forme de divertissement en marge des séances de renga sérieux, le haikai a pour traits principaux la parodie, les jeux de mots, ainsi que l'usage d'un vocabulaire trivial qui le rapproche de la vie quotidienne. De premières anthologies sont compilées par Yamazaki Sokan (?-1540) et Arakida Moritake (1473-1549). Mais c'est avec l'instauration du pouvoir des Tokugawa (1603) que le haikai, grâce à l'action de quelques maîtres tels que Matsunaga Teitoku (1571-1653), s'impose comme le genre poétique favori des nouvelles classes dominantes. Plus abordable que le renga, il constitue une porte d'accès à la vie culturelle et devient vite une pratique populaire en vogue dans toutes les couches de la société. Dans les années 1670, de jeunes poètes d'Osaka et d'Edo conduisent une offensive contre les écoles traditionnelles (Teimon) et fondent autour du poète Nishiyama Soin (1605-1682) un haikai renouvelé, qui renoue avec la fantaisie et se veut en prise directe avec la vie quotidienne. Cependant, la mort de Soin accentue la crise latente qui minait un haikai victime de ses excès, mais aussi des querelles de personnes. Des tentatives diverses menées alors, dont la plus notable fut l'introduction massive d'expressions chinoises, émerge finalement la synthèse de Matsuo Basho (1644-1694) qui confère au haikai une dimension nouvelle. Approfondisant la nature comique du haikai, celui-ci cherche à en faire l'expression à la fois savante et spontanée des sentiments de l'homme au contact de la nature. Après une période de déclin, le haikai connaît un renouveau grâce à l'œuvre du lettré Yosa Buson (1717-1783) dont l'univers esthétique repose sur une transposition de l'imaginaire dans la réalité. La dégénérescence du haikai se poursuit parallèlement à sa popularisation, permettant cependant l'émergence de figures comme celles du poète provincial Kobayashi Issa (1763-1827). Le mouvement de renouveau mené par Masaoka Shiki (1867-1902) consacre l'abandon des chaînes poétiques au profit du seul vers de 17 syllabes, et marque la naissance du genre moderne du haiku.