Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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présidiaux, (suite)

Souvent citée comme exemple de la politique de modernisation de l'administration de la justice, la création des présidiaux apparaît en réalité comme une mesure de circonstance, destinée à renflouer le Trésor royal en permettant la vente de nouvelles charges. Il est un fait que les présidiaux ne parviennent pas à trouver leur place dans le paysage institutionnel de l'Ancien Régime, se heurtant aussi bien à l'hostilité des bailliages qu'à celle des parlements. Malgré plusieurs réformes tendant à élargir leurs compétences, ils restent jusqu'à la fin de l'Ancien Régime les parents pauvres de l'institution judiciaire.

presse

La presse française contemporaine est le produit d'une histoire qui débute au XVIIe siècle.

L'État, décidé à la contrôler ou soucieux d'assurer les conditions de son développement, joue un rôle majeur dans sa consolidation progressive. La loi de 1881 fonde la liberté d'une presse moderne qui, depuis plus d'un siècle, semble s'interroger, sans trouver de réponse à une question centrale : comment concilier indépendance de l'information et contraintes économiques ?

Politique, littérature et liberté

Si la naissance de la presse en France se situe au XVIIe siècle, il faut en chercher les racines deux siècles plus tôt. Le XVe siècle, en effet, voit l'apparition de deux innovations majeures : tandis que l'imprimerie permet la reproduction des nouvelles à grande échelle, la poste en favorise la plus large diffusion. Bientôt se multiplient les supports occasionnels d'information : « canards » illustrés, ancêtres des journaux à sensations, qui se repaissent de crimes odieux, d'accidents sanglants et d'histoires fabuleuses supposées vraies ; libelles et autres pamphlets qui accompagnent les crises politiques et religieuses du royaume ; feuilles « volantes » en tout genre. Aux imprimés destinés au plus grand nombre s'ajoutent les « nouvelles à la main » qui alimentent régulièrement la haute société en indiscrétions glanées dans les couloirs des puissants.

En 1631, les Nouvelles ordinaires de divers endroits, de Jean Epstein, et la Gazette, de Théophraste Renaudot, introduisent en France une forme de nouvelles imprimées et périodiques qui, depuis deux décennies déjà, connaissent un vif succès en Europe du Nord, et singulièrement en Allemagne. Bénéficiant d'un privilège royal de vente et de distribution, forte d'un millier d'abonnés, la Gazette, qui a absorbé son concurrent, sert de relais à la propagande monarchique. Le monopole de l'hebdomadaire de Renaudot sur les informations politiques est cependant entamé, dès l'origine, par les gazettes étrangères qui pénètrent sur le territoire français sans obstacles grâce à la poste royale. La pratique du privilège est, un siècle plus tard, également étendue aux annonces, avec les Affiches de Paris (1745).

Privés d'actualité politique par le privilège de la Gazette, les imprimeurs rivaux consacrent l'avènement des journaux qui, tels le Journal des savants (1665) ou le Mercure galant (1672), développent le commentaire scientifique et littéraire. Ces liens entre presse et littérature, première grande caractéristique française, sont définitivement établis à l'époque des Lumières. Les Encyclopédistes, de même que leurs adversaires, se regroupent autour de revues qui animent leur polémique. Au Nouvelliste du Parnasse de l'abbé Guyot-Desfontaines (fort véhément à l'égard de Voltaire), ou à l'Année littéraire de Fréron, répond avec pugnacité le Mercure galant, transformé en Mercure de France, qui, sous la conduite de Marmontel, accueille d'Alembert, Condorcet, La Harpe ou Voltaire.

Grâce à la poste, qui réduit et uniformise les tarifs, la presse pénètre rapidement la province dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. La baisse des prix d'expédition assure à la première le monopole de distribution des journaux, et permet à la seconde d'offrir des abonnements à des coûts plus attractifs. En 1777 apparaît le premier quotidien français, le Journal de Paris, fondé trois quarts de siècle après le Times de Londres ! Les monopoles résistent mal au temps et à la pression de libraires qui, comme Panckoucke, lancent des organes de presse où l'on évoque tout autant l'actualité politique que les nouvelles littéraires. Le rythme de création des « feuilles » s'intensifie (plus d'une centaine de journaux voient le jour dans les années 1780) ; les pratiques de lecture collective favorisent la diffusion de l'information imprimée et, à la fin de l'Ancien Régime, le mot même de « journal » acquiert son sens moderne.

La Révolution donne à la presse française son autre trait majeur : en instaurant la liberté d'expression, elle suscite le jaillissement des feuilles politiques. 158 journaux se créent au cours de la seule année 1789, et 1 400 titres nouveaux jusqu'à la fin du siècle. La demande est telle qu'une même feuille peut connaître trois éditions quotidiennes (matin, soir, et départements). Les tirages atteignent parfois 10 000 exemplaires et, dès 1791, la poste diffuse chaque jour plus de 100 000 journaux, auxquels s'ajoutent les numéros vendus par les colporteurs.

Les parlementaires influents utilisent la presse comme une arme de propagande : Mirabeau (le Courrier de Provence), Brissot (le Patriote français), Marat (l'Ami du peuple), Hébert (le Père Duchesne), Desmoulins (les Révolutions de France et de Brabant), etc. Jusqu'en 1792, ils jouissent d'une liberté presque illimitée. Mais, une fois la République fondée, la lutte des factions se traduit par des persécutions contre les journalistes, qui souvent paient de leur vie un engagement sans réserve.

Jusqu'aux débuts de la IIIe République, le destin des journaux est commandé par l'évolution heurtée de la liberté de la presse, que le pouvoir cherche périodiquement à museler. Dès 1800, Bonaparte supprime cinquante feuilles parisiennes pour n'en autoriser que treize, dont le Moniteur, devenu journal officiel. Frappées du droit de timbre, alourdies par une taxe postale en augmentation, étroitement surveillées par la censure, elles disparaissent les unes après les autres. En 1811, on n'en compte plus que quatre. En revanche, l'Empereur épargne la presse de province, qui assure la diffusion, auprès de la population, des décisions de l'État.