Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
H

Homo erectus, (suite)

Il existe, sur une aussi longue période, plusieurs variétés d'Erectus. Les plus anciens ont été découverts en Afrique de l'Est, près du lac Turkana. On connaît aussi le pithécanthrope de Java, le sinanthrope du site chinois de Zhoukoudian, ou encore l'australanthrope d'Afrique du Nord. En Europe, les vestiges les plus anciens sont ceux d'Atapuerca, en Espagne. En France, les sites - nombreux - habités par Homo erectus correspondent au paléolithique inférieur. Ils ne sont guère antérieurs à - 700 000 ans, et l'existence de sites beaucoup plus anciens, notamment en Auvergne, reste discutée. On n'a mis au jour que de très rares restes humains. Les mieux conservés, ceux de Tautavel (Pyrénées-Orientales) ou de Biache-Saint-Vaast (Pas-de-Calais), semblent appartenir à des formes très évoluées, qui annoncent déjà l'homme de Néanderthal. C'est sur ce dernier que débouche en Europe Homo erectus, parallèlement à d'autres évolutions locales dans le reste de l'Ancien Monde. L'une d'elles donnera naissance, en Afrique orientale, à Homo sapiens sapiens, l'homme moderne.

Homo sapiens,

forme la plus récente de l'évolution humaine, caractérisée par l'homme de Néanderthal (il y a environ 300 000 ans), puis par Homo sapiens sapiens, l'homme moderne.

La classification du genre Homo a connu un certain nombre de péripéties, qui tiennent à la fois au souci humain de se démarquer de toutes les autres espèces comme aux aléas des découvertes paléontologiques. Au sein des êtres vivants actuels, le genre Homo ne compte qu'une seule espèce, Homo sapiens, qui ne renferme elle-même qu'une seule sous-espèce, Homo sapiens sapiens. Toutes les autres formes, Homo habilis, Homo erectus, Homo sapiens neanderthalensis (sans compter d'innombrables dénominations tombées en désuétude), sont des espèces ou sous-espèces fossiles. Mais le refus de classer les australopithèques parmi les Homo tient plus à des pesanteurs idéologiques qu'à des définitions scientifiques précises. En outre, l'ensemble de ces espèces et sous-espèces ne sont pas séparées par des cloisons étanches : il faut plutôt y voir des moments dans un processus à la fois continu et buissonnant, les sauts éventuels étant surtout constitués des lacunes de notre documentation.

On considère que l'homme de Néanderthal, Homo sapiens neanderthalensis, est la forme la plus ancienne connue d'Homo sapiens. De fait, mis à part quelques détails de la boîte crânienne, rien ne distingue Néanderthal de l'homme actuel dans son aspect général, ni, peut-être, dans ses capacités psychomotrices. Mais Néanderthal n'est qu'une évolution locale d'Homo erectus, parallèlement à d'autres évolutions, moins bien connues, dans d'autres régions de l'Ancien Monde. En tout cas, il semble bien, du moins d'après les datations physico-chimiques, que Homo sapiens neanderthalendis ait cohabité au Proche-Orient pendant plusieurs dizaines de millénaires avec une autre sous-espèce, Homo sapiens sapiens, l'homme moderne, qui apporte les premières preuves claires d'une pensée symbolique.

Ce dernier serait apparu entre - 200 000 et - 100 000 ans en Afrique orientale et peut-être au Proche-Orient, et serait issu des Erectus locaux. C'est après ce long temps de coexistence que Sapiens sapiens se serait peu à peu répandu dans le reste du monde. Il prendrait pied en Europe du Sud-Est vers - 40 000 ans et atteindrait le territoire de la France vers - 30 000 ans (civilisation aurignacienne), remplaçant les derniers Néanderthal de la civilisation de Châtelperron. La possibilité de croisements biologiques entre les deux sous-espèces reste discutée.

Il est évident que l'évolution humaine est appelée à se poursuivre, sauf si elle est contrariée par des manipulations génétiques. Les évolutions visibles sur une très courte période, et qui prolongent les traits antérieurs, sont une tendance continue à l'effacement du dimorphisme sexuel dans le squelette et à sa gracilisation.

honnête homme,

idéal de la sociabilité du XVIIe siècle qui synthétise une tradition française illustrée par Montaigne et un courant de pensée italien exprimé par le Courtisan (1528), de Baldassare Castiglione.

Élaboré par Nicolas Faret (1596 ?-1646) dans son Honnête homme ou l'Art de plaire à la cour (1630), il s'affirme et s'affine chez des auteurs tels que Pascal, La Rochefoucauld, La Fontaine, La Bruyère, Bussy-Rabutin, Saint-Évremond, et surtout chez le chevalier de Méré (vers 1607-1684), qui en propose la théorisation la plus achevée dans toute une série de dialogues d'idées (Conversations, 1668 ; Discours, 1671-1677 ; Lettres, 1682 ; De la vraie honnêteté, posthume), l'honnêteté consistant fina-lement pour lui « en je ne sais quoi de noble qui relève toutes les bonnes qua-lités, et qui ne vient que du cœur et de l'esprit ».

Encore limitée chez Nicolas Faret à un art de la civilité restreint au milieu courtisan, à la fois moyen de parvenir et art du paraître fondés sur une alliance des qualités du corps, de l'âme et de l'esprit, l'honnêteté s'étend progressivement à la ville et à ces milieux mondains où nobles et bourgeois reconnaissent le mérite personnel. Défini comme une personne du monde accomplie, d'un esprit cultivé mais exempt de pédantisme, agréable et distinguée tant dans son aspect physique que dans ses manières, sachant briller en société mais sans affectation - « Ne se piquer de rien », écrit La Rochefoucauld -, l'honnête homme possède talent de la conversation, sens des bienséances, bon goût, intelligence et culture. Don d'observation, finesse psychologique et capacité d'adaptation sont indispensables à l'exercice de cette honnêteté, art de la lucidité autant que de la mesure, apologie de l'ordre qui aboutit à un pessimisme clairvoyant sensible dans les œuvres de Mme de La Fayette. Cette idéologie du goût s'accorde pleinement avec l'esthétique et l'éthique classiques du naturel, de la vraisemblance et de la régularité. Mode d'être de l'excellence, l'honnêteté privilégie cependant un goût « moyen », ennemi des extrêmes : il suffit de considérer les excès des personnages moliéresques confrontés aux Philinte et autres Cléante pour comprendre tout ce que l'honnête homme a de mesuré, de subtil, de distingué. Chez lui, la litote s'allie au trait d'esprit et à l'humour. On mesure la distance avec les acceptions modernes d'honnête et honnêteté, réduites à la seule probité.