Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
G

Gambetta (Léon), (suite)

Le « commis voyageur » de la République.

• La Commune marque une étape importante dans son évolution politique. Réfugié à Saint-Sébastien, en Espagne, il est surpris par la violence des événements, et commence à penser que la république ne pourra s'installer de façon durable que si elle est présentée au plus grand nombre comme un régime paisible, libéré des excès extrémistes. Réélu à l'Assemblée en juillet 1871, il sillonne la France pour promouvoir l'idéal républicain, et fonde, en novembre, un quotidien, la République française. Le 26 septembre 1872, à Grenoble, il explique avec éloquence que, pour s'enraciner, la république doit s'appuyer sur « une couche sociale nouvelle » : la classe moyenne, qui émerge. Renonçant à la stratégie de rupture inscrite dans les programmes radicaux de la fin du Second Empire, il prend progressivement la tête d'un courant « opportuniste » qui cherche des alliances au centre pour installer le régime : les réformes doivent être entreprises avec prudence, sans brusquer l'opinion. Il s'attire ainsi les foudres de ses anciens amis radicaux, tel Clemenceau, aux yeux desquels il passe pour un « renégat ». Cependant, il reste un républicain fervent, comme en témoignent son anticléricalisme et son désir d'émanciper les paysans des tutelles nobiliaires. Sa stratégie d'alliance politique avec le centre le conduit à accepter les lois constitutionnelles de 1875, critiquées par les radicaux, en particulier celle qui crée le Sénat, « grand conseil des communes de France ». Néanmoins, Gambetta est en tête du combat, lors de la crise du 16 mai 1877, quand il s'agit de défendre la république face à la dernière grande tentative de restauration monarchique ; au cours de la campagne électorale, il lance au président Mac-Mahon, qui a dissous la Chambre, une adresse promise à la postérité : « Quand la France aura fait entendre sa voix souveraine, il faudra se soumettre ou se démettre. »

Le rendez-vous manqué avec le pouvoir.

• Principal chef du parti républicain victorieux aux élections législatives de 1877, il dirige le groupe de l'Union républicaine à la Chambre des députés (tandis que Jules Ferry crée celui de la Gauche républicaine). Il semble désormais admis qu'il doive gouverner. Pourtant, le président Jules Grévy, inquiet, tout comme nombre de ses amis politiques, de sa popularité et de son tempérament autoritaire, lui refuse la présidence du Conseil. Gambetta se contente donc de celle de la Chambre des députés, à partir de 1879. Ce n'est qu'après la victoire éclatante de l'Union républicaine aux élections de 1881 que Grévy lui demande de former un gouvernement. Le « grand ministère » - appelé ainsi par dérision, puisque aucun des hauts responsables politiques du pays n'a souhaité y participer - est constitué le 14 novembre. Il regroupe des hommes jeunes, encore peu connus, tels Waldeck-Rousseau, Paul Bert ou Félix Faure, et dure moins de quatre-vingts jours. Attaqué à gauche pour ses velléités coloniales, et à droite pour son désir de nationaliser les chemins de fer, peu soutenu par ses propres amis opportunistes, Gambetta tombe sur la question du scrutin de liste : depuis longtemps, il a envisagé de stabiliser les institutions en renforçant l'exécutif, et en limitant la pratique du clientélisme des députés. Il est renversé le 27 janvier 1882, victime de la crainte que son charisme ne le transforme en dictateur. Il meurt quelques mois plus tard, des suites d'une blessure accidentelle. On lui fait des funérailles nationales

Gamelin (Maurice Gustave),

général (Paris 1872 - id. 1958).

Saint-cyrien issu d'une famille d'officiers, Maurice Gamelin se lie à Joffre dès 1902, et, en 1914, dirige le cabinet de guerre du généralissime, avant de combattre sur la Somme. Promu général de division en 1925, il est l'adjoint de Sarrail, haut représentant de la France en Syrie, où il rétablit la situation militaire dans le djebel Druze. En 1927, il est nommé chef des troupes françaises du Levant. Sa carrière se poursuit à l'état-major : en 1935, il succède à Weygand comme vice-président du Conseil supérieur de la guerre ; en 1938, il est chef d'état-major de la Défense nationale. Mal renseigné, il déconseille l'emploi de la force face à Hitler, qui occupe la Rhénanie (mars 1936) puis le territoire des Sudètes (1938). Il jouit pourtant d'un grand prestige, notamment auprès des Britanniques : en septembre 1939, le rôle de chef des forces alliées en France ne lui est pas discuté.

Croyant que les Allemands vont reprendre le plan Schlieffen de 1914, il masse ses troupes à la frontière belge : surpris par la guerre éclair, il ne peut contenir la percée des Ardennes. Reynaud sanctionne cet échec par un limogeage, le 17 mai 1940. Gamelin est accusé de négligence au procès de Riom ; il est ensuite fait prisonnier par les Allemands, qui le déportent au Tyrol, où les Américains le libéreront en 1945. Dans ses Mémoires (Servir), il a tenté de se justifier par rapport aux critiques lui reprochant, outre ses choix tactiques de 1939, sa stratégie défensive anachronique, le manque de préparation de l'armée française, et, sur le terrain, son inaptitude à coordonner l'action des troupes et à prendre des décisions.

Garde impériale,

corps d'élite de l'armée napoléonienne. Elle est issue de la Garde des Consuls, elle-même créée en 1800 par Bonaparte à partir de la Garde du Directoire et de celle des Conseils législatifs.

Formée, à l'origine, d'anciens soldats de l'armée d'Italie, et ayant soutenu le coup d'État des 18 et 19 brumaire an VIII (9 et 10 novembre 1799), elle est placée sous l'autorité directe de l'Empereur par le décret du 10 mai 1804, qui lui donne le nom de « Garde impériale », et l'organise.

Cette force, indépendante de l'armée pour son administration, joue un rôle de plus en plus important au sein du dispositif militaire et voit ses effectifs augmenter au fil des ans (quelque 9 700 hommes en 1804, contre environ 56 000 en 1812). Elle compte des unités d'infanterie, de cavalerie (dont les fameux mamelouks), d'artillerie et même de marine, et ses soldats et ses officiers bénéficient de soldes plus élevées que leurs homologues des unités de ligne. Aux côtés de la Moyenne Garde et de la Jeune Garde, créées plus tardivement, la prestigieuse Vieille Garde, constituée de soldats ayant accompli au moins deux campagnes et cinq ans de service, est censée intervenir dans les moments critiques des batailles. Mais, considérée comme un corps de réserve, la Vieille Garde à pied - les « grognards » - se contente d'assurer la sécurité de l'Empereur. Toutefois, à Eylau (1807), puis pendant toute la campagne de Russie (1812), elle s'engage activement dans les combats. Symbole d'une armée où le mérite est distingué, et fidèle à Napoléon, elle est dissoute en 1814 par Louis XVIII. Reconstituée durant les Cent-Jours, elle forme les derniers carrés de Waterloo (1815), où elle est décimée.