Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
M

Mirabeau (Gabriel Honoré Riqueti, comte de),

homme politique et l'une des figures les plus marquantes des débuts de la Révolution (Le Bignon, Loiret, 1749 - Paris 1791).

Frasques et scandales.

• Fils de l'économiste et physiocrate Victor Riqueti, marquis de Mirabeau, il tranche, par son physique, ses manières et ses mœurs, sur la vieille aristocratie provençale dont il est issu : d'une extrême laideur, peu enclin à la sociabilité raffinée, habitué aux excès de table et de boisson, il mène durant sa jeunesse une existence si dissolue que, en 1767, son père lui intime l'ordre d'entrer dans l'armée. Mais il y fait scandale et doit purger une peine de six mois d'emprisonnement dans la citadelle de l'île de Ré. Capitaine de dragons, il quitte l'armée en 1771, et s'établit au château de Mirabeau, après avoir épousé une héritière provençale. Ses frasques ne s'apaisent pas pour autant. Son père, qui l'interdit comme prodigue, ne cessera de solliciter des lettres de cachet contre lui. Emprisonné à Vincennes (1777-1780) après sa liaison tumultueuse avec Sophie de Ruffey, la jeune épouse du marquis de Monnier, Mirabeau rédige en détention les célèbres Lettres à Sophie (qui seront publiées en 1792) et un Essai sur les lettres de cachet et les prisons d'État (1782). Une fois libéré, il vit d'abord de sa plume : journaliste financier - « à la solde de l'agio », selon la formule de son père -, il rédige également des pamphlets et des libelles qui dénoncent l'absolutisme royal. La politique devient alors sa principale préoccupation, et le restera jusqu'à sa mort.

Le tribun de la Révolution.

• Candidat aux états généraux en 1789, il est rejeté par la noblesse, mais est élu par le tiers état d'Aix. « Au milieu de l'effroyable désordre d'une séance, écrit Chateaubriand dans les Mémoires d'outre-tombe, je l'ai vu à la tribune, sombre, laid et immobile : il rappelait le chaos de Milton, impassible et sans forme au centre de sa confusion. » Après son coup d'éclat, le 23 juin 1789, contre le marquis de Dreux-Brézé (« Allez dire à votre maître que nous sommes ici par la volonté du peuple, et qu'on ne nous en arrachera que par la puissance des baïonnettes »), il s'impose comme le tribun du parti patriote. Orateur le plus brillant des États généraux, puis de l'Assemblée nationale constituante, il joue un rôle décisif au début de la période révolutionnaire : il contribue à instaurer la liberté de la presse, soutient la réquisition des biens du clergé et participe à la rédaction de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Partisan d'une monarchie constitutionnelle, il défend, contre l'avis dominant de l'Assemblée, le principe d'un droit de veto absolu du pouvoir royal ; mais c'est un droit de veto suspensif qui est finalement voté. Dans les derniers mois de l'année 1789, au prix d'ambiguïtés exploitées par ses adversaires, Mirabeau tente de concilier défense des acquis révolutionnaires et maintien des prérogatives royales. Il aspire à jouer le rôle d'intermédiaire entre le roi et l'Assemblée. Mais celle-ci, mesurant le risque de telles ambitions, interdit aux députés de devenir ministres, le 7 novembre 1789. Introduit à la cour par son ami le comte de La Marck, Mirabeau en devient le conseiller secret au début de l'année 1790, envoyant au roi des mémoires et notes confidentiels. Sa vénalité ne fait plus de doute aujourd'hui : tandis que la cour éponge ses dettes, il s'engage à défendre les intérêts royaux. Bien qu'il soit accusé de trahison par certains députés et brocardé par des pamphlets, il conserve une popularité intacte. Nommé à la présidence de l'Assemblée, le 30 janvier 1791, il meurt brutalement quelques semaines plus tard. Par décret de l'Assemblée, il est enterré dans l'église Sainte-Geneviève, qui vient d'être rebaptisée « Panthéon français », avant d'en être délogé deux ans plus tard, au profit de Marat.

Tribun d'exception et intrigant peu scrupuleux, Mirabeau aspirait incontestablement à gouverner. Mais le succès de son double jeu politique supposait à la fois un monarque moins velléitaire et une possibilité de contrôle du courant révolutionnaire. Faute de cette conjonction historique, Mirabeau n'aura été, selon l'expression de Michelet, que « l'organe et la voix de la liberté ».

missi dominici,

pendant le haut Moyen Âge, légats envoyés par le roi pour veiller au bon fonctionnement de l'administration locale.

Les missi dominici, c'est-à-dire les « envoyés du maître », sont attestés dès l'époque mérovingienne, mais leur rôle n'est institutionnalisé qu'à partir de 800, par l'empereur Charlemagne. Recrutés dans l'aristocratie et dans le haut clergé (évêques et abbés), ils travaillent toujours par paire (un laïc et un ecclésiastique), dans le cadre d'une circonscription regroupant de six à dix comtés, le missiaticum. Ils sont chargés de contrôler l'administration locale, en particulier la gestion comtale, de diffuser la législation impériale, d'exercer la justice d'appel royale, et de recevoir les serments de fidélité à l'empereur. Sous les règnes de Charlemagne (768/814) et de Louis le Pieux (814/840), ils constituent l'un des principaux éléments de l'homogénéisation politique de l'Empire franc. Cependant, dès le milieu du IXe siècle, dans le contexte de division de l'Empire et d'essor des principautés régionales, l'institution connaît un déclin rapide. Des missi continuent à être nommés jusque dans les années 860, mais seulement dans le nord du royaume de Francie. En outre, ils sont désormais choisis dans les rangs des notables régionaux : la pratique du cumul des charges de comte et d'envoyé dans une même région favorise alors l'essor des clans aristocratiques, aux dépens de la puissance royale. Conçue pour assurer la cohésion de l'État impérial, l'institution n'a pu, en définitive, en enrayer la dissolution.

missions.

La mission ou la propagation de la foi est une caractéristique essentielle du christianisme.

Les missionnaires se placent sous le patronage des Apôtres et prétendent poursuivre leur œuvre d'évangélisation et de prédication. Un essor missionnaire apparaît aux XVe et XVIe siècles, encouragé par les Grandes Découvertes. Les papes du XVe siècle confient aux pouvoirs coloniaux le soin d'encadrer et d'évangéliser les populations soumises : ce système du « patronat » profite surtout aux royaumes de Portugal et d'Espagne - les principales puissances maritimes d'alors. En effet, le traité de Tordesillas (juin 1494) oblige ces puissances à diffuser le message chrétien, mais le pape n'a plus de droit de regard sur les nominations épiscopales.