Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
N

Necker (Jacques), (suite)

Sa popularité fait le succès des emprunts qui financent la guerre d'Amérique, mais l'endettement massif de l'État le contraint peu à peu à s'aliéner les courtisans (tentative de diminution des pensions), les fermiers généraux (création de régies), les intendants et les parlementaires (reprise du projet de Turgot d'associer à la gestion des généralités des assemblées des trois ordres, avec prédominance du tiers état). Il tente alors de consolider à la fois le crédit public et sa position en livrant à l'opinion, contre la tradition du secret, l'état d'un Trésor excédentaire, amputé de son endettement réel mais où figurent les dépenses de la cour (Compte rendu au roi, 1781). La violente réaction de cette dernière lui aliène le monarque : il démissionne le 19 mai 1781. Son action philanthropique (création d'un hôpital modèle à Paris) et la publication d'un second ouvrage (De l'administration des finances de la France, 1784) alimentent cependant une véritable « neckeromanie ». Necker est rappelé par le roi en août 1788 - comme ministre, cette fois - pour cautionner de nouveaux emprunts, dont l'insuffisance le conduit à organiser la convocation des états généraux de 1789 (avec doublement des députés du Tiers). Il se tient désormais en retrait mais demeure populaire : son renvoi, le 11 juillet 1789, provoque indirectement la prise de la Bastille ; de nouveau rappelé le 16 juillet comme « premier ministre des Finances », il désapprouve nombre de décisions de l'Assemblée nationale, telle l'émission massive d'assignats. Démissionnaire en septembre 1790, il se retire dans son château de Coppet, près de Genève.

Neerwinden (bataille de),

bataille remportée par les Français contre les troupes anglo-hollandaises le 29 juillet 1693, au cours de la guerre de la Ligue d'Augsbourg.

Après les victoires de Fleurus (1690) et de Steinkerque (1692), le maréchal de Luxembourg s'apprête à affronter à nouveau le prince Guillaume III d'Orange sur le théâtre d'opérations des Pays-Bas. Après avoir feint de se porter contre Liège, Luxembourg marche sur les troupes de Guillaume qui se tiennent devant Bruxelles, mais l'effet de surprise échoue, et l'ennemi, bien pourvu en canons, a eu le temps de se retrancher dans le village de Neerwinden. L'engagement, commencé au petit matin, ne se termine qu'à 5 heures du soir. Les charges succèdent aux charges, en séries d'attaques frontales. Par deux fois, le village est pris par Luxembourg, l'épée à la main ; par deux fois, il est perdu. Le duc de Chartres (le futur Régent) s'expose avec courage, le prince de Conti est blessé. La résistance de la cavalerie française au tir de l'artillerie ennemie arrache un cri à Guillaume : « Ah ! l'insolente nation ! » Les Français restent enfin maîtres du terrain, mais, épuisés, ne peuvent empêcher les Anglo-Hollandais de faire retraite en bon ordre. Si Guillaume d'Orange perd 12 000 hommes, Luxembourg déplore 8 000 tués, ce qui fait de Neerwinden une des batailles les plus sanglantes du siècle. « C'est à cette occasion qu'on disait qu'il fallait chanter plus de De Profundis que de Te Deum » (Voltaire). Couperin, qui avait baptisé la Steinkerque une de ses sonates, n'eut pas le cœur d'en dédier une à ce nouveau succès, qui eut peu de conséquences stratégiques.

néolithique,

période préhistorique caractérisée par une forme de vie sociale et économique fondée sur l'agriculture et l'élevage, qui apparaît sur le territoire de la France à partir du VIIe millénaire avant notre ère, à la suite de mouvements de colonisation provenant du Proche-Orient.

Les différentes classifications archéologiques.

• Les préhistoriens du XIXe siècle divisèrent l'âge de la pierre en deux parties : l'âge de la pierre ancienne, ou taillée, appelé aussi le « paléolithique », et l'âge de la pierre nouvelle, ou polie, auquel ils donnèrent le nom de « néolithique ». Entre ces deux périodes, ils définirent ensuite une phase intermédiaire : l'âge de la pierre moyenne, ou « mésolithique ». Mais, progressivement, il apparut que le polissage de la pierre n'était qu'une technique particulière de finition de certains outils (haches et herminettes à travailler le bois), et que le néolithique s'identifiait davantage à une transformation économique radicale : la domestication des animaux et la culture des plantes. Le préhistorien australien Gordon Childe parla, dans les années 1920-1930, d'une « révolution néolithique ». Suivant les classifications, on considère le néolithique comme la dernière période de la préhistoire, ou la première de la protohistoire.

Des prédateurs aux producteurs.

• Il ne semble pas qu'il y ait eu, sur les territoires correspondant à la France et à l'Europe d'aujourd'hui, d'invention endogène de l'agriculture et de l'élevage. En effet, ces pratiques apparaissent au Proche-Orient vers le IXe millénaire, au sein d'une civilisation de chasseurs-cueilleurs du mésolithique, le natoufien. Elles ne pénètrent en Europe du Sud-Est qu'au cours du VIIe millénaire. Ce nouveau mode de vie est fondé sur la culture du blé et de l'orge ainsi que sur l'élevage du mouton, de la chèvre, du porc et du bœuf (hormis ces deux dernières, les autres espèces n'existent pas alors à l'état sauvage en Europe). Cette économie de production se répand peu à peu d'est en ouest : d'une part, vers l'intérieur de l'Europe par le bassin du Danube ; d'autre part, en suivant les côtes de la Méditerranée.

C'est par ce mouvement méditerranéen que, vers la seconde moitié du VIIe millénaire, le processus de néolithisation atteint le midi de la France actuelle. La première civilisation néolithique qui s'y épanouit est appelée « cardial » car la poterie est souvent décorée d'impressions de coques (cardium edule). Les populations du cardial maîtrisent la navigation en haute mer et pratiquent surtout l'élevage - parfois transhumant - des moutons et des chèvres ; l'architecture des villages reste encore très mal connue, tandis que des grottes sont utilisées comme bergeries. Peu à peu, à partir de la fin du VIe millénaire, le cardial s'étend vers le nord, par la vallée du Rhône et le long des côtes de l'Atlantique, où il atteint le Centre-Ouest de la France. Le décor des poteries se simplifie et d'autres techniques sont utilisées (rainures, cordons d'argile) : c'est l'« épi-cardial ». Il n'est pas impossible que certains contacts aient eu lieu avec les populations indigènes de chasseurs-cueilleurs mésolithiques. Mais ces contacts sont souvent difficiles à affirmer avec certitude, car l'association, dans la même couche archéologique d'une grotte donnée, d'objets mésolithiques et d'objets néolithiques peut tenir aussi à des mélanges ultérieurs, lorsque par exemple des agriculteurs se sont installés dans une grotte précédemment occupée par des chasseurs.