Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
E

Empire (Second). (suite)

La guerre contre la Prusse est engagée imprudemment, à l'occasion de la candidature d'un Hohenzollern au trône d'Espagne, sous la pression des bonapartistes autoritaires, qui souhaitent un succès à l'extérieur pour revenir sur les mesures libérales. Même si une atmosphère d'union nationale peut être observée au début du conflit, la situation intérieure se dégrade rapidement à l'annonce des premiers revers. Le cabinet Ollivier est renversé, et remplacé par une équipe autoritaire regroupée autour du comte Palikao. La révolte gronde à Paris, désertée par l'empereur, parti rejoindre l'armée, et où l'impopulaire impératrice exerce la régence. À l'annonce du désastre de Sedan, le Corps législatif est envahi, et la République est proclamée à l'Hôtel de Ville (4 septembre 1870). Le régime s'effondre sans aucune résistance, abandonné de tous au lendemain d'une défaite qui devait être chèrement payée.

Empire latin d'Orient (

ou de Constantinople), État fondé en 1204 par les croisés, dans l'Empire byzantin. L'histoire de l'Empire latin d'Orient ne peut être séparée de celle de la quatrième croisade.

Rassemblés à Venise en 1202 pour traverser la Méditerranée, les croisés, à court d'argent, sont contraints de payer leur passage en nature, en s'emparant de la ville chrétienne de Zara, sur l'Adriatique, pour le compte des Vénitiens. Détournée une première fois, la croisade l'est de nouveau, à la suite des propositions de l'empereur byzantin détrôné Isaac II Ange : reconquérir Constantinople moyennant une forte somme d'argent, une aide militaire et l'union des Églises orthodoxe et catholique. Les croisés s'emparent donc de la ville, au nom de son empereur, en 1203, mais les relations entre Latins et Byzantins s'enveniment rapidement. Le 15 avril 1204, après trois jours d'effroyables pillages, les Latins reprennent Constantinople pour leur propre compte, sous l'œil bienveillant des Vénitiens, qui y voient une aubaine pour leur commerce. Un mois plus tard, le comte de Flandre Baudouin Ier est couronné empereur dans la basilique Sainte-Sophie.

La conquête de la Grèce par les croisés, durant l'hiver 1204-1205, donne naissance à plusieurs États, vassaux théoriques de l'Empire latin : le royaume de Thessalonique est attribué au marquis italien Boniface de Montferrat ; le duché d'Athènes, au seigneur franc-comtois Otton de la Roche ; la principauté de Morée, conquise par Guillaume de Champlitte, revient à la famille de Villehardouin, qui y établit le plus stable des États francs.

Malgré cela, les Francs ne sont que partiellement maîtres de la Grèce, et une bonne partie de l'Empire byzantin leur échappe. En 1205, le désastre d'Andrinople face aux Bulgares, où périt Baudouin Ier, arrête la conquête franque, alors que subsistent de solides implantations byzantines : l'Empire de Nicée, en Asie Mineure, et le despotat d'Épire, dans l'ouest de la Grèce.

Henri de Hainaut, empereur après son frère Baudouin, parvient à repousser les Bulgares à Philippopolis en 1208, mais, peu à peu, l'Empire latin se réduit considérablement. Le beau-frère d'Henri de Hainaut, Pierre de Courtenay, puis son fils Robert, doivent encore céder du terrain : Thessalonique est prise en 1222 par le despote d'Épire Théodore, et, en 1225, il ne reste de l'Empire latin que Constantinople et ses environs. De 1228 à 1261, Baudouin II de Courtenay résiste courageusement, mais Constantinople est reprise, en 1261, par l'empereur byzantin Michel VIII Paléologue.

Tandis que la famille de Courtenay rejoint l'Occident tout en ayant pendant quelques années des prétentions sur l'Empire d'Orient, la présence franque en Grèce demeure jusqu'en 1311 grâce au duché d'Athènes et, surtout, à la brillante principauté de Morée des Villehardouin, liés aux Angevins de Naples. La principauté de Morée n'est prise par les Byzantins qu'au XVe siècle, avant d'être conquise par les Turcs en 1463.

L'affrontement direct entre Latins et Byzantins, ultime aboutissement d'une incompréhension totale et réciproque, a débouché, fortuitement, à la création d'un éphémère Empire latin. Alors que l'implantation franque réussit durablement en Grèce, l'Empire latin d'Orient, né dans les massacres de Constantinople en 1204, ne peut échapper à cette défiance fratricide.

emprunts russes,

série d'emprunts lancés par la France au profit de la Russie tsariste entre 1888 et 1914.

À la fin du XIXe siècle, cette dernière entre en conflit avec ses alliés traditionnels, l'Autriche-Hongrie et l'Allemagne ; la Reichsbank prive alors la Russie de son soutien financier, afin d'éviter l'intervention militaire de celle-ci en Bulgarie pour contrer la politique autrichienne. C'est dans ce contexte que le gouvernement français propose au tsar une aide, qui se traduit par le lancement, en novembre 1888, d'un emprunt d'État de 125 millions de roubles, couvert par les grandes banques françaises. Il sera suivi, jusqu'en 1914, d'une quinzaine d'autres emprunts garantis par l'État russe et émis par des compagnies ferroviaires et des collectivités locales, pour un montant total de 16 milliards de francs (200 milliards actuels). Dans le même temps, la Russie devient le premier débouché extérieur des sociétés françaises, qui détiennent un tiers du total des capitaux étrangers, devançant les Britanniques. Les émissions de titres de sociétés implantées en Russie croissent de 26 millions par an entre 1888 et 1894, atteignant 83 millions entre 1895 et 1904 et 112 millions entre 1905 et 1913. Ce rapprochement financier se traduit donc au début du siècle par un véritable impérialisme économique. Sur le plan diplomatique, en revanche, on en vient progressivement à la constitution d'une entente conçue comme une alliance de revers contre l'Allemagne, essentielle dans la stratégie française. En 1914, la Russie entre en guerre aux côtés de la France, avant que la révolution bolchévique de 1917 n'entraîne la signature de l'armistice de Brest-Litovsk, le refus du nouveau gouvernement de reconnaître les dettes de l'État tsariste et la confiscation du réseau bancaire : dès lors, les titres détenus par les Français n'ont plus qu'une valeur de pièces de collection.