Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Raimond VII, (suite)

Pendant deux ans, le sénéchal Humbert de Beaujeu poursuit l'œuvre royale. En 1228, Raimond VII, à bout de ressources, accepte enfin de négocier avec la régente, Blanche de Castille. Le jeudi saint de 1229, il fait amende honorable à Notre-Dame de Paris, et signe un traité par lequel il cède au roi tout le bas Languedoc, donne en mariage à Alphonse de Poitiers, frère de Louis IX, sa fille Jeanne, héritière de tous ses biens s'il n'a pas d'autre enfant, et s'engage à partir en croisade. Le traité de Paris met en coupe réglée le Midi, qui entre dans l'orbite française. Blanche de Castille, en effet, avec la complicité du cardinal de Saint-Ange, s'emploie à ce que Raimond VII ne se remarie pas. Une université est implantée à Toulouse pour lutter contre l'hérésie et l'Inquisition s'installe dans la ville.

Le Languedoc s'enflamme à nouveau en 1240, lorsque l'héritier du vicomte de Béziers, Raimond Trencavel, tente de reconquérir son héritage. Raimond VII met peu d'empressement à le contrer, s'engageant de plus aux côtés du roi Henri III d'Angleterre et du comte de la Marche dans la révolte baronniale de 1242. L'assassinat de deux inquisiteurs à Avignonet, dans lequel Raimond VII semble impliqué, relance la croisade. Raimond VII se soumet à la paix de Lorris en 1243, promettant de contribuer à l'extermination des hérétiques. À sa mort, il ne laisse d'autre héritier que sa fille, et Alphonse de Poitiers recueille tout le Midi toulousain, qui revient en 1271 dans le domaine royal.

Rais, Rays ou Retz (Gilles de),

baron de Bretagne et maréchal de France (Champtocé-sur-Loire, Maine-et-Loire, 1404 - Nantes 1440).

Fils de Gui de Laval-Blaison et de Marie de Craon, il possède, par héritage et par mariage - il épouse, en 1420, sa cousine Catherine de Thouars -, des fiefs importants et nombreux en Bretagne, Maine, Anjou et Poitou. Chef de guerre, il combat tout d'abord dans de petites opérations militaires. Son rôle s'accroît quand il entre, en 1428, dans la clientèle de Georges de La Trémoille, personnage très influent auprès du roi Charles VII. En 1429, il devient l'un des compagnons de Jeanne d'Arc et combat à ses côtés pour la libération de la ville d'Orléans (8 mai) ; il l'accompagne ensuite pour le sacre du roi à Reims, où il est fait maréchal de France. Il est alors au faîte de sa gloire, mais, dès 1431, en raison de la disgrâce de son protecteur, il ne mène plus que de petits combats, souvent pour son propre compte. La guerre, l'entretien de troupes et son train de vie très luxueux le conduisent à s'endetter ; pour faire face à ses dépenses, il vend peu à peu une partie de ses seigneuries, dilapidant ainsi son patrimoine. À partir de 1440, il doit affronter deux procès où il est accusé d'hérésie, d'évocation des démons, de sodomie, d'enlèvements et de meurtres d'enfants. Condamné à mort, il est pendu le 26 octobre 1440. Même si certains écrivains se sont élevés au xxe siècle contre cette sentence, sa culpabilité semble ne faire aucun doute, les témoignages étant nombreux et divers. Devenu un personnage mythique, il n'est pourtant pas, comme on le prétend parfois, à l'origine de la légende de Barbe-Bleue.

ralliement.

On entend par ce mot l'acceptation des institutions républicaines par l'Église, que la papauté préconise à partir de 1890.

Élu pape en 1878, Léon XIII (Gioacchino Pecci) assiste à l'offensive anticléricale et laïque menée par le gouvernement et la majorité parlementaire dans les années 1880. Il prend la mesure de la solidité du régime républicain et de l'impuissance de la droite française (Chesnelong, Mackau, Keller, de Mun, Mgr Freppel) dans son double combat pour la défense de l'Église et la restauration de la monarchie. Aussi s'efforce-t-il, à travers ses encycliques (Immortale Dei, 1885 ; Libertas, 1888), de définir une « politique chrétienne » en distinguant ce qui relève de l'autorité religieuse de ce qui appartient à la sphère étatique. Il sait aussi trouver un terrain d'accord avec les républicains de gouvernement, dits « opportunistes » (Gambetta, Grévy, Ferry), sur le maintien du concordat entre l'Église et l'État, gage de protection légale pour la première, d'exercice d'un contrôle pour le second.

La politique du ralliement s'opère en trois temps. Le 12 novembre 1890, le cardinal Lavigerie porte à Alger un toast retentissant à la marine de la République en proposant « une adhésion sans arrière-pensée à cette forme de gouvernement ». Le 20 février 1892, Léon XIII publie l'encyclique Au milieu des sollicitudes : il y affirme la contingence des régimes politiques, distingue le pouvoir, respectable en lui-même, des législations, toujours réformables, et plaide contre la séparation de l'Église et de l'État. Le 3 mai 1892, dans une lettre adressée aux cardinaux français, le pape enjoint nettement à ces derniers d'accepter la République.

La directive pontificale divise la droite entre « ralliés », favorables à la création d'un grand parti conservateur (de Mun, Piou, mais aussi des journaux, tels l'Univers ou la Croix), et « réfractaires » (le monarchiste d'Haussonville, le bonapartiste Cassagnac et l'Autorité, l'antisémite Drumont et la Libre Parole). Les élections de l'été 1893 voient l'échec des monarchistes tandis que les ralliés forment, autour de Jacques Piou, le petit groupe de la « droite constitutionnelle ». Le 3 mars 1894, Eugène Spuller, alors ministre de l'Instruction publique, des Beaux-Arts et des Cultes, célèbre à la Chambre un « esprit nouveau » dans les relations entre l'Église et l'État. Mais les affrontements de l'affaire Dreyfus conduiront à la loi de séparation de 1905 ; et il faudra, à l'aube des années 1920, un second ralliement pour qu'un modus vivendi stable puisse s'instaurer, en régime de laïcité, entre Église et République. Essentiel sur le principe, le ralliement préconisé par Léon XIII n'aura été qu'un bref répit sur le chemin qui conduit, à terme, à la disparition du système concordataire.

Ramadier (Paul),

homme politique (La Rochelle 1888 - Rodez 1961).

Avocat à la cour d'appel de Paris, Paul Ramadier adhère au mouvement socialiste dès 1904. Grand blessé de guerre, il entre en 1916 au cabinet du ministère de l'Armement, dirigé par le socialiste Albert Thomas. Il est « l'homme de Decazeville », ville dont il est maire de 1919 à 1959. Il est aussi élu conseiller général et député en 1928. Favorable à la participation des socialistes au pouvoir, il quitte la SFIO en 1933 avec les néosocialistes. Sa capacité de travail, ses dons de conciliateur, lui valent d'être nommé par Léon Blum sous-secrétaire d'État aux Travaux publics en juin 1936 ; il le reste jusqu'en janvier 1938, avant d'être ministre du Travail dans le cabinet Chautemps, puis dans le gouvernement Daladier, dont il démissionne le 21 août 1938, refusant la remise en question de la semaine de quarante heures. En juillet 1940, il ne vote pas les pouvoirs constituants au maréchal Pétain et s'engage ensuite dans la Résistance. Il retrouve ses mandats après la guerre, sous l'étiquette SFIO, et entre dans le gouvernement de Gaulle comme ministre du Ravitaillement. Président du Conseil de janvier à novembre 1947, il doit alors gérer une situation économique et sociale difficile, marquée par les grandes grèves de l'automne, organisées par les communistes après l'éviction de leurs ministres en mai. Ministre d'État puis de la Défense en 1948, il est rappelé au gouvernement en 1957 par Guy Mollet, qui lui confie les Affaires économiques et financières. Il est à ce titre l'instigateur de la vignette automobile. La fin de la IVe République est aussi celle de sa carrière : il est battu aux législatives de 1958 et aux municipales de 1959.