Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
A

août 1792 (journée du 10), (suite)

Cette victoire est celle des sans-culottes, principalement ceux du faubourg Saint-Antoine, et des fédérés marseillais et brestois, sur lesquels s'est appuyée une partie de la classe politique. Événement fondateur de la République et de la démocratie, événement marquant de la seconde révolution, cette journée est commémorée dès 1793. Elle devient, en 1794, l'une des fêtes nationales de la République. Sa célébration sera supprimée sous le Consulat.

apanages,

terres appartenant au domaine royal, et données aux enfants puînés de la famille de France, ainsi qu'à l'aîné avant son accession au trône.

Le terme est employé pour la première fois en 1316 : ces possessions sont destinées ad panem – littéralement, « à la subsistance des princes du sang » – pour leur permet-tre de « tenir leur estat ». Une logique familiale ainsi qu'un impératif politique dictent ces dotations. Le roi doit se prémunir contre les ambitions de ses fils et de ses frères, afin de prévenir les risques de guerre civile. Cependant, la pratique des apanages contredit l'idée d'inaliénabilité du domaine royal. Aussi, des clauses restrictives sont-elles progressivement introduites dans ces concessions : les fiefs ainsi accordés reviennent au roi en cas d'absence d'héritier mâle en ligne directe. Dans l'ensemble, le système des apanages n'a pas entravé de manière significative le progrès de la monarchie française. Imitant le roi, les princes ont même amélioré l'administration dans leurs domaines. La victoire de la logique étatique sur la logique familiale marque la fin des apanages : Louis XI est le dernier roi à en créer un - la Guyenne, pour son frère Charles. Ce dernier rentre vite dans le domaine royal (1472), de même que ceux d'Orléans et d'Angoulême, ramenés par Louis XII et François Ier. L'ultime apanage est celui de Bourbonnais, confisqué par François Ier en raison de la trahison du connétable de Bourbon en 1523.

aqueduc,

conduite d'eau qui dessert les fontaines et les thermes des cités.

L'eau était un confort apprécié des Romains, et ils veillèrent à l'approvisionnement régulier des espaces urbains qu'ils créèrent dans les cités gauloises, installant souvent plusieurs conduites. Lyon était ainsi desservie par un réseau de quatre aqueducs, alors qu'on en comptait onze à Vienne, capables d'acheminer quotidiennement 100 000 mètres cubes d'eau. L'aqueduc le plus connu est celui de Nîmes, qui courait sur 50 kilomètres, de la source d'Eure, près d'Uzès, au château d'eau urbain.

L'aqueduc se présentait sous la forme d'une canalisation maçonnée en pente - construite sous terre, en tranchées ouvertes, ou en tunnels exhaussés -, et rendue étanche par un enduit intérieur. Lors de la construction d'un aqueduc, pour déterminer une déclivité constante, les ingénieurs utilisaient un chorobate (règle sur pied qui contenait de l'eau dans une rainure supérieure et dont chaque extrémité donnait un repère de visée), grâce auquel on pouvait calculer l'altitude d'un point à l'aide d'une mire. Lorsqu'il fallait franchir des obstacles - ravins, dépressions, vallées -, ils édifiaient des ponts, tel le célèbre pont du Gard, dans la vallée du Gardon, près de Nîmes, aux trois étages d'arcades, haut de 48 mètres et long de quelque 275 mètres ; ils adoptaient plus rarement la technique du siphon, utilisée pour l'aqueduc lyonnais du Gier, dans la vallée de l'Yseron. À son arrivée en ville, l'aqueduc approvisionnait un château d'eau (castellum divisorium) : à Nîmes, il s'agissait d'une fontaine circulaire, dont les bouches cylindriques et les bondes permettaient une circulation régulière et l'évacuation du trop-plein. Le château d'eau alimentait des tuyaux en plomb, qui desservaient les fontaines publiques de la cité (où l'on venait s'approvisionner), les thermes publics ou privés (où se lavaient et se délassaient les citadins et, parfois, les ruraux), et les demeures des riches particuliers qui avaient obtenu le droit de jouir de dérivations privées. De généreux bienfaiteurs avaient souvent assumé les frais élevés des constructions - 2 millions de sesterces à Bordeaux -, et l'eau, payée par les plus riches pour leurs concitoyens, apparaissait comme l'instrument d'un confort collectif. Sa quantité justifiait, en quelque sorte, l'idée oligarchique de la cité romaine en Gaule. Les sources étant divinisées chez les Gaulois, les Romains associèrent souvent le culte impérial aux divinités topiques. L'eau devenait ainsi un bienfait apporté par l'empereur aux cités.

Aquitaine,

ancienne province française et Région depuis 1960.

Héritière d'une illustre lignée féodale implantée à Poitiers, Aliénor d'Aquitaine apporte ses immenses domaines à Louis VII lorsqu'elle l'épouse, en 1137, puis, en 1152, à son second époux, Henri II Plantagenêt, duc d'Anjou et roi d'Angleterre. C'est sur cet étrange paradoxe d'une princesse indiscutablement poitevine, mais que la postérité a retenue comme aquitaine, que s'ouvre l'histoire médiévale d'une province dont les contours, et même la localisation, n'ont cessé de varier depuis l'époque romaine.

Une province sans identité.

• On sait bien ce qu'est, en revanche, la Région Aquitaine, née en 1960, et réunissant trois départements de la façade Atlantique et deux de l'intérieur. Elle ne présente cependant aucune unité géographique et n'est qu'un fragment du Bassin aquitain des géographes, qui mord sur l'extrémité occidentale des Pyrénées. Elle ne correspond pas davantage à un héritage politique ni à une quelconque aire culturelle ou linguistique. Sa raison d'être économique elle-même est discutée : en effet, d'une part, les Charentes, qui étaient une composante de l'arrière-pays traditionnel de Bordeaux, en sont désormais coupées ; d'autre part, l'Agenais se situe tout autant dans l'orbite de Toulouse que dans celle de Bordeaux. Son « identité régionale » est donc, au mieux, en gestation. Ces origines troubles, loin de faire de l'Aquitaine une exception parmi les Régions françaises, illustrent bien la fragilité de nos provinces, dont les noms, dans bien des cas, n'ont été tirés de l'oubli que pour donner un visage à un regroupement de départements imposé par les exigences supposées de l'aménagement du territoire.