Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
C

CFDT (Confédération française démocratique du travail), (suite)

Syndicat politisé malgré ses diverses tendances internes, la CFDT privilégie les débats de fond sur la simple défense des intérêts catégoriels. Après la rupture, en 1980, avec la CGT, jugée trop dépendante du PCF, l'arrivée de la gauche au pouvoir en 1981 semble marquer le triomphe de ce syndicalisme qui se veut réaliste, mais est aussi peu conformiste. Toutefois, la CFDT prend progressivement ses distances par rapport au PS, et elle fait du partage et de la réduction du temps de travail ses chevaux de bataille dans le lutte contre le chômage. Le « recentrage », c'est-à-dire la mutation réformiste de la CFDT, est poursuivi par Jean Kaspar de 1988 à 1992, puis par Nicole Notat, première femme à diriger en France une confédération syndicale. La CFDT, qui ressent les effets de la crise syndicale, enregistre néanmoins des résultats relativement favorables aux élections prud'homales et professionnelles, au début des années quatre-vingt-dix. Ce recentrage est notamment sensible au moment des grandes grèves de fin 1995, durant lesquelles la confédération se démarque de la CGT et de FO, en formulant un avis globalement positif sur la réforme de la Sécurité sociale. L'année suivante, la CFDT succède à FO à la présidence de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM). Cette évolution ne s'est pas faite, au cours des dernières années, sans divisions internes.

La ligne impulsée par Nicole Notat se poursuit avec François Chérèque (à la tête du syndicat depuis 2002), notamment lors des discussions relatives à la réforme des retraites, où la CFDT se rallie finalement au projet du gouvernement, entraînant le départ de certains militants.

CFTC (Confédération française des travailleurs chrétiens),

syndicat créé en 1919.

S'inspirant de la doctrine sociale de l'Église définie dans l'encyclique Rerum novarum, et voulant opérer des transformations « non par la lutte des classes, mais par l'éducation et la collaboration des éléments producteurs », la CFTC regroupe des syndicats chrétiens, qui ont vu le jour dès 1885. Ce syndicat d'employés du commerce et de l'industrie réussit, sous l'impulsion de Gaston Tessier, à s'implanter parmi les ouvriers, mais l'augmentation du nombre de ses adhérents pose le problème de son statut confessionnel. Dès 1947 s'amorce un processus de laïcisation : soutenu par le secrétaire général Eugène Descamps, il aboutit, en 1964, à une « déconfessionnalisation » complète, par la création de la CFDT. Cependant, la « CFTC maintenue » entend préserver la tradition syndicale d'un catholicisme social. Malgré sa participation active dans des combats tels que la défense de l'école privée en 1984, ses effectifs restent limités et son audience, réduite.

CGT (Confédération générale du travail),

syndicat créé en 1895 ; c'est la plus ancienne des grandes centrales syndicales de salariés.

Son congrès fondateur, tenu à Limoges du 23 au 28 septembre 1895, appelle au regroupement de l'ensemble des organisations ouvrières déjà existantes : bourses du travail, syndicats locaux et nationaux, fédérations de métiers et d'industries. Mais il faudra attendre le congrès de Montpellier (22-27 septembre 1902) pour que se réalise l'unité du mouvement syndical grâce à l'adhésion de la Fédération des bourses du travail de Fernand Pelloutier à la CGT.

Avant 1914, la CGT est une organisation peu structurée et peu centralisée, dotée toutefois (si l'on peut faire une analogie avec des institutions politiques) d'organes « exécutif » et « législatif ». L'« exécutif » est assuré par un secrétariat confédéral. Victor Griffuelhes (de 1902 à 1909) et Léon Jouhaux, qui lui succède en juillet 1909 après un bref intermède, en sont les dirigeants les plus marquants. Le premier, surtout, contribue à imposer la ligne du syndicalisme révolutionnaire. Le « législatif » de la confédération est confié au congrès, réuni en principe tous les deux ans. Les organisations qui composent la CGT y sont représentées par des délégués indépendamment de leur nombre d'adhérents. De petites fédérations, favorables au syndicalisme révolutionnaire, peuvent ainsi jouer un rôle certain lors des congrès, alors que les grandes fédérations, telle celle du Livre, sont souvent plus réformistes. Au congrès de 1906 est adoptée une motion d'inspiration syndicaliste-révolutionnaire, dite « Charte d'Amiens », marquée par une défiance à l'égard de l'État et des partis politiques. La CGT rassemble des effectifs bien inférieurs aux trade unions britanniques, très liés au Parti travailliste : elle compte 300 000 adhérents en 1895 et 700 000 en 1914.

Évolution vers le réformisme.

• Pendant la Première Guerre mondiale, la CGT participe à l'effort de défense nationale, et plusieurs de ses militants collaborent avec le ministre socialiste Albert Thomas. Les effectifs s'accroissent très sensiblement pour dépasser le million d'adhérents en 1919. Mais elle subit le contrecoup de la scission de la SFIO, intervenue au congrès de Tours (décembre 1920) entre socialistes et communistes : le 27 décembre 1921, la minorité révolutionnaire de la CGT, qui a joué un rôle décisif dans les grandes grèves de 1920, quitte l'organisation pour aller fonder la CGT - unitaire (CGTU). La CGT poursuit alors la politique amorcée durant la guerre, en renforçant l'intégration de la classe ouvrière à la nation. Elle défend les idées de nationalisation, de contrôle ouvrier dans l'entreprise, de conventions collectives par branches, ainsi que la création d'un Conseil national économique à participation syndicale. Le vote, en 1928, de la loi établissant les assurances sociales peut passer pour l'un de ses succès. Cette tactique réformiste lui permet d'accroître ses effectifs, qui passent entre 1922 et 1930 de 488 000 à 577 000. À la différence de la CGTU, ils sont composés, pour moitié, de salariés du secteur public.

La crise des années trente marque fortement l'histoire de la CGT. Des solutions originales se dessinent en son sein, pour répondre au désordre économique, issues du courant « planiste ». Mais la réunification syndicale - de la CGT et de la CGTU -, le 25 mars 1936, et, plus encore, l'explosion sociale de mai-juin 1936 entraînent l'adhésion massive d'ouvriers dotés d'une tout autre culture syndicale. La croissance des effectifs (1,1 million en mars 1936, 3,9 millions en 1937) renforce la tendance communiste et renverse les rapports de force à l'intérieur de la CGT.