Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
P

Panamá (scandale de),

grave crise politique et morale qui affecte la IIIe République, en 1892-1893.

Elle a pour origine la révélation, à la suite de la faillite de la Compagnie du canal de Panamá, d'une collusion financière étendue entre le monde des affaires, ceux de la politique et du journalisme.

Fondée en 1881 par Ferdinand de Lesseps, promoteur du canal de Suez ouvert en 1869, la « Compagnie universelle du canal interocéanique pour le percement de l'isthme américain » connaît des difficultés financières en 1885 en raison des charges résultant de l'inadaptation de ses entreprises au milieu naturel de l'isthme. Sa recapitalisation, grâce à l'émission d'obligations remboursables par tirage au sort, nécessite le vote d'une loi, alors même que l'opération apparaît d'une rentabilité douteuse. La Compagnie réussit à corrompre nombre de parlementaires et de journalistes. La loi est finalement votée en 1888, et l'émission est lancée auprès de 800 000 souscripteurs, avant la faillite de la société, en février 1889. Les administrateurs ne sont soumis à une instruction judiciaire qu'en mai 1891.

Le scandale éclate en septembre 1892, à l'approche des élections législatives, avec la dénonciation de parlementaires « chéquards » et « panamistes » par des journaux comme la Libre Parole de Drumont (antisémite) et la Cocarde (boulangiste). Devant une commission d'enquête parlementaire, des hommes politiques de premier plan, tels Rouvier, Clemenceau ou Floquet, justifient l'acceptation de certaines sommes par le coût du combat politique contre le boulangisme. Le procès pour escroquerie intenté aux administrateurs de la Compagnie n'aboutit en février 1893 qu'à des peines légères, avant d'être cassé pour vice de forme. Les parlementaires soupçonnés, jugés pour corruption, sont tous acquittés en mars 1893, à l'exception de Baïhaut, ministre des Travaux publics en 1886, qui a « naïvement » avoué avoir accepté une importante somme d'argent.

Si les nationalistes (Déroulède), les antisémites (Drumont) et les boulangistes ne réussissent pas à ébranler le régime républicain par leurs attaques antiparlementaristes, en revanche, le scandale favorise un renouvellement du personnel politique aux élections législatives d'août 1893 (Floquet et Clemenceau perdent leur siège ; Poincaré, Deschanel, Barthou et Delcassé font leur entrée sur la scène politique), ainsi qu'un reclassement à droite des majorités gouvernementales. En outre, l'affaire politique se double d'un scandale financier, du fait des lourdes commissions prélevées par les banques et qui ont fragilisé la Compagnie. Après avoir organisé la sécession du territoire colombien de Panamá, les États-Unis mènent à bien les travaux de percement du canal, de 1903 à 1914.

Panckoucke (Charles Joseph),

éditeur et entrepreneur de presse (Lille 1736 - Paris 1798).

Figure légendaire de l'édition, Panckoucke est à la fois un homme de l'Ancien Régime - dont il maîtrise à merveille le système de privilèges et de protections - et un homme de transition. Proche des Philosophes, dont il « vulgarise » les idées dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, il n'est toutefois guère un politique, et les positions qu'il affiche sous la Révolution sont toutes de circonstance. Car ce courtisan qui s'insinue dans les couloirs de l'État n'a qu'une seule passion : l'édition. Entrepreneur inventif, il déploie une intense activité, change de stratégie au gré des circonstances, s'associe à d'autres éditeurs, français ou étrangers, pour réaliser ses grands projets, ou rachète des concurrents pour mieux les éliminer.

C'est à la mort de son père (1753), imprimeur-libraire établi à Lille, que Panckoucke, membre d'une nombreuse famille d'origine flamande, abandonne les mathématiques - il voulait être ingénieur - pour la librairie. Cependant, l'hostilité des autorités lilloises, due à ses multiples initiatives en faveur des publications philosophiques, le conduit à s'installer à Paris en 1762, où, à peine arrivé, il est reçu marchand-libraire grâce à l'appui de Malesherbes. Dès lors, achetant d'importants fonds de librairie, vendant les titres non rentables et conservant les plus prospères, il bâtit un empire et accapare le marché de l'édition à partir de 1778. Diffuseur des Lumières avec l'aval de l'État monarchique, il publie tous les grands noms de la philosophie (Rousseau, Voltaire, Raynal...), édités auparavant à l'étranger, réédite l'Encyclopédie de Diderot, dont il a acheté les planches et à laquelle il ajoute des Suppléments, entreprend l'édition de la monumentale Encyclopédie méthodique, grand œuvre qu'il ne pourra achever, et signe nombre de contrats avec des auteurs de talent (Buffon, Chamfort, La Harpe, Marmontel, Condorcet, Linguet, Mallet du Pan, Suard...). À cela, Panckoucke, qui obtient le monopole des journaux politiques en 1778, joint un véritable empire de presse. Il acquiert les privilèges, fusionne ou crée de nombreuses feuilles - il possédera jusqu'à dix-sept journaux -, qu'il met au service du pouvoir politique et de son entreprise d'édition : Mercure de France, la Gazette de France, qu'il prend à bail en 1787, ou encore le Moniteur universel, qu'il fonde en 1789. Cependant, la crise révolutionnaire, qui bouleverse le monde de l'édition, met un terme à l'empire de Panckoucke qui, dépassé, abandonne la direction de son entreprise à son gendre, en 1793. À sa mort, ce visionnaire, qui préfigure le triomphe de l'entreprise bourgeoise au XIXe siècle, laisse toutefois à ses descendants une maison d'édition encore importante.

Panthéon,

monument parisien situé au sommet de la montagne Sainte-Geneviève.

Église à l'origine, le Panthéon s'est transformé à la Révolution en temple laïque et républicain. Symbole national, il doit sa renommée aux écrivains, savants et hommes politiques célèbres qui ont été enterrés dans sa crypte, lors de cérémonies solennelles.

Des origines à la Révolution.

• L'initiative de la construction du Panthéon est prise par Louis XV en 1744, au cours de la guerre de la Succession d'Autriche (1741-1748). Tombé gravement malade, le roi s'en va prier à Sainte-Geneviève et, après son rétablissement, promet aux chanoines de l'abbaye de faire reconstruire leur église, vétuste et délabrée.