Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
L

langue d'oc, (suite)

Toutefois, la croisade des albigeois (1209) et l'intégration progressive des régions méridionales au royaume de France (XIIIe-XVe siècle) entraînent le déclin de la langue d'oc à la fin du Moyen Âge. La littérature d'oc s'étiole dès le XIVe siècle. L'usage administratif de l'occitan recule au XVe siècle, et l'ordonnance royale de Villers-Cotterêts (1539) conduit à son remplacement progressif par le français dans les institutions royales, provinciales et urbaines au cours du XVIe siècle. Mais, fort de ses nombreux dialectes, l'occitan demeure la langue véhiculaire des populations méridionales jusqu'à la première moitié du XXe siècle. Au XIXe siècle, le romantisme et l'essor des études savantes favorisent un renouveau littéraire qu'entend soutenir le Félibrige, fondé par Frédéric Mistral en 1854. Pourtant, dans le même temps, l'usage de l'occitan se raréfie considérablement, moins sous l'effet de la politique scolaire de la IIIe République qu'à la suite des profondes mutations socio-économiques et culturelles de la fin du XIXe siècle et du XXe siècle. L'occitan profite toutefois, à partir des années 1960, de la revalorisation des cultures régionales, et, depuis la loi Deixonne (1951) et les circulaires Savary (1982-1984), son enseignement est pratiqué dans le cadre de l'école publique.

Languedoc,

ancienne province française, divisée pendant la Révolution en huit départements qui seront rattachés, en 1960, à deux Régions (Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées). Vaste territoire, le Languedoc médiéval s'étend entre le Rhône inférieur et moyen, la haute Garonne, les contreforts méridionaux du Massif central et le piedmont pyrénéen.

Des premiers hommes à la colonisation romaine.

• Si des traces d'une présence humaine remontant à 900 000 ans peuvent être relevées, c'est seulement à partir du XVe millénaire que commence à s'esquisser le trait dominant de l'histoire du Languedoc : la différenciation entre un Occident atlantique et un Orient méditerranéen. Celle-ci s'accuse entre le Ve et le IIIe millénaire, en dépit d'un mode de vie commun fondé sur la chasse, l'élevage, l'agriculture, l'habitat en cabanes ou en grottes. La céramique « cardiale », la transhumance, l'inhumation sous dolmen et les premières importations de cuivre individualisent le domaine méditerranéen. Au Ier millénaire (âge du fer), aux anciens occupants des parties basses orientales se mêlent les « peuples des champs d'urnes » : agriculteurs, ils incinèrent leurs morts et incisent des décors géométriques dans les céramiques. Dans les parties hautes vivent les « peuples des tumulus », pasteurs semi-nomades qui incinèrent ou inhument leurs morts et excisent les décors de leurs poteries. L'intensification des contacts avec le Bassin méditerranéen entraîne la construction de places destinées à contrôler le commerce terrestre et maritime des Étrusques, des Grecs et des Massaliotes. Ces places - Ensérune, Pech-Maho, Peyriac - deviennent, au VIe siècle, des foyers d'hellénisation. Au IVe siècle arrivent les Celtes. Constituant une aristocratie militaire superposée aux autochtones, ils apportent au pays une certaine unité, sans toutefois faire disparaître les différences culturelles entre bordure montagneuse (peuple des tumulus), extrême est (d'abord hellénisé, ensuite romanisé), sud (ibérique) et extrême ouest (celtisé). La pénétration et la conquête romaines (120 avant J.-C.) s'effectuent sans difficulté ni dommage majeurs. Les vainqueurs incluent rapidement le Languedoc dans leur Provincia, dont Narbonne devient la capitale, et installent des colons dans plusieurs villes (Narbonne, Béziers, Lodève, Carcassonne, Nîmes). Dès le Ier siècle après J.-C., le réseau urbain s'étoffe autour de l'axe routier Narbonne-Toulouse, tandis que dans les campagnes, largement pourvues de vastes domaines, s'amorce une certaine spécialisation : élevage sur les Causses et dans la garrigue, céréales à l'ouest et vigne à l'est. L'exploitation des minerais, des carrières, des eaux minérales et du sel marin complète la mise en valeur du pays.

L'annexion française.

• Sous le Bas-Empire puis pendant le haut Moyen Âge, la prospérité s'atténue progressivement. En témoignent le net fléchissement du commerce extérieur, la régression du mode d'existence rural, le déclin de villes telles que Narbonne et Nîmes, la décadence culturelle, malgré la christianisation (achevée au VIe siècle) et la renaissance carolingienne. Plus que les invasions successives des Alamans, des Wisigoths et des Francs (IIIe-IXe siècle), ce sont le déplacement des centres actifs vers le Rhône, les raids de Charles Martel (VIIIe siècle) et l'anarchie féodale (Xe-XIIe siècle) qui apparaissent comme les facteurs principaux de ce déclin.

Unifié à la fin du XIe siècle par Raimond IV de Saint-Gilles, comte de Toulouse, le Languedoc connaît deux sièclesd'épanouissement (XIe et XIIe siècles), marqués à la fois par l'apparition de nouvelles villes - Castres, Alès, Montpellier, Beaucaire -, par le développement du catharisme, religion populaire qui entend revenir aux sources du christianisme primitif, et par la floraison de la lyrique courtoise. La région souffre néanmoins de l'opposition des grands féodaux aux comtes de Toulouse, de l'adhésion de certains d'entre eux à l'hérésie cathare ou vaudoise, et des interventions étrangères qui s'effectuent à la faveur de la crise politico-religieuse de la fin du XIIe siècle : la croisade contre les albigeois (1211-1218), dirigée par le pape Innocent III, et la mainmise française en 1229 mettent logiquement fin à une époque où l'alliance avec la France paraît seule capable de contenir celle des féodaux avec les Aragonais et les Plantagenêts. Le passage sous domination capétienne se traduit par l'installation d'une administration royale (sénéchaussées au XIIIe siècle, lieutenance générale, parlement et cour des aides au XIVe siècle) et d'états provinciaux (XIVe siècle). Il apporte également plusieurs siècles de paix à la province qui, jusqu'aux guerres de Religion du XVIe siècle, sera relativement épargnée par les conflits. Mais seul le siècle consécutif à l'annexion voit se poursuivre la croissance amorcée au XIe siècle, au profit de l'ouest céréalier, de l'est viticole, des villes artisanales et commerçantes (Nîmes, Montpellier, Saint-Gilles, Aigues-Mortes, Narbonne et Toulouse) et des Cévennes (culture du mûrier). En effet, aux XIVe et XVe siècles, les disettes, la peste et la pression fiscale provoquent un effondrement démographique ainsi qu'une crise générale des campagnes et des villes. Seul le triangle Montpellier-Pézenas-Montagnac parvient à y échapper.