Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
H

hôpital général,

institution d'Ancien Régime destinée à l'enfermement des mendiants.

En avril 1656, le jeune Louis XIV signe un édit dont l'article 1er précise : « Voulons et ordonnons que les pauvres mendiants valides et invalides, de l'un et l'autre sexe, soient enfermés dans un hôpital pour y être employés aux ouvrages, manufactures et autres travaux, selon leur pouvoir. » Ainsi est créé l'hôpital général de Paris, dont le dessein est d'« empêcher la mendicité en renfermant tous les pauvres dans un hôpital commun ».

Cet édit royal a une double origine : d'une part, il s'inscrit dans le mouvement de réorganisation hospitalière qui prend forme dès le début du XVIIe siècle et fait suite aux difficultés qu'avaient rencontrées les hôpitaux au cours des troubles du siècle précédent ; d'autre part, il résulte de l'influence qu'exerce depuis les années 1630 la Compagnie du Saint-Sacrement, dont les membres sont attachés à la discipline religieuse et à l'ordre social. Ainsi, avant 1656, ceux-ci ont déjà soutenu ou suscité la création d'hôpitaux généraux, notamment à Orléans, Marseille ou Toulouse. Mais la mise en place d'un vaste réseau d'établissements de ce genre n'est rendue possible que par l'édit de 1656, complété par celui de 1662 qui ordonne l'implantation d'hôpitaux généraux dans « toutes les villes et gros bourgs » du royaume. Sur le modèle parisien, les hôpitaux généraux se multiplient en province dans les décennies qui suivent la décision royale : selon un comptage fiable, ils sont 177 à la fin de l'Ancien Régime. Cependant, ce nombre révèle des situations très différentes : certains hôpitaux généraux ont bien été créés ex nihilo, mais nombre d'entre eux sont en réalité des hôtels-Dieu, dont seule la dénomination a été modifiée. Quoi qu'il en soit, ils auraient alors regroupé la moitié des 120 000 personnes que compte l'ensemble des hôpitaux du royaume. C'est dire que le « grand renfermement » dont Michel Foucault parlera dans son Histoire de la folie (1961) est loin d'avoir été accompli. La maîtrise et l'encadrement disciplinaire d'une partie du corps social ont bien été les desseins originels des fondateurs des hôpitaux généraux. Néanmoins, il est clair que ces derniers n'ont pas répondu à cette attente. Conçus pour assurer le « redressement moral » des mendiants par l'exercice régulier de la religion et par le travail manuel (des manufactures, notamment textiles, y sont installées), ils deviennent en effet des lieux de réclusion et d'exclusion sociale où l'on trouve aussi des aliénés, des prostituées, des porteurs de maladies vénériennes, certains protestants après 1685, bref tous ceux que la société juge hétérodoxes. Mais le tableau mérite d'être nuancé : les enfants abandonnés (ou ceux retirés à leurs parents huguenots) et les vieillards indigents constituent en fait l'essentiel des internés, et, parallèlement à la prise en charge sur place, les administrateurs organisent une assistance à domicile pour les pauvres. L'hôpital général, dans sa réalité, assure donc aussi une œuvre charitable conforme à la conception hospitalière du Moyen Âge et de l'époque classique. Cette évolution signe l'échec du projet initial de régulation du corps social par le confinement. Les pouvoirs publics, après avoir tenté à plusieurs reprises, au XVIIIe siècle, de revenir à la lettre de l'édit de 1656, le reconnaissent d'ailleurs : le 21 octobre 1767, un arrêté du Conseil du roi institue les dépôts de mendicité, chargés à leur tour de mettre en œuvre la politique d'assistance.

hospitaliers,

membres d'une congrégation hospitalière destinée à l'aide aux pèlerins, attestée à Jérusalem avant 1099, et qui, avec approbation du pape Pascal II (1113), devient l'« ordre des chevaliers des Hôpitaux de Saint-Jean de Jérusalem », communément nommés « Hospitaliers ».

À l'imitation des Templiers, l'ordre s'organise et se militarise au cours du XIIe siècle. Il est dirigé par un maître, et divisé en trois classes : chapelains, frères servants, et chevaliers voués au combat contre les infidèles ; tous sont vêtus d'un manteau noir à croix blanche. Comme les chevaliers Teutoniques (dont l'ordre est créé en 1190), et à la différence des Templiers, les Hospitaliers ont une double fonction, hospitalière et militaire. En Palestine et en Espagne, ils guerroient contre les musulmans et tiennent de nombreuses forteresses, tel le krak des Chevaliers, près de Homs (Syrie). Après la perte des États d'Outremer (1291), ils se replient sur Chypre, puis sur Rhodes, où ils fondent un véritable État souverain, pourvu d'une flotte redoutable (1310). Cette mutation leur vaut d'échapper au sort funeste des Templiers. À Rhodes, ils soutiennent plusieurs sièges, avant de céder, en 1522, devant les troupes de Soliman le Magnifique. Ils se replient alors sur Malte, donnée en fief par Charles Quint en 1530. La Révolution française prive l'ordre de nombreuses possessions, et Napoléon s'empare de Malte en 1798. Privé de territoire, l'ordre subsiste jusqu'à nos jours sous le nom d'« Ordre souverain militaire hiérosolymitain de Malte » et se consacre désormais à des activités charitables, médicales et diplomatiques.

Hôtel de Ville de Paris,

siège de la municipalité parisienne, dont l'histoire remonte au Moyen Âge.

La place de Grève devient propriété de la Ville de Paris dans la première moitié du XIIe siècle, mais la Maison aux piliers, implantée sur le côté est de la place, n'est acquise qu'en 1357 par Étienne Marcel, prévôt des marchands, et par les échevins de la ville. À partir de cette date, elle abrite les assemblées des bourgeois et des marchands, et le Bureau de la Ville y tient ses conseils. C'est François Ier qui ordonne la construction d'un nouveau bâtiment, dont les plans sont dus à l'architecte italien Dominique de Cortone, dit le Boccador. Le style de l'édifice - qui s'articule autour d'une cour quadrangulaire - est celui de la Renaissance italienne, mais il emprunte aussi à l'architecture des maisons communes des Flandres ou d'Europe centrale.

L'Hôtel de Ville va être l'enjeu et le théâtre de nombreuses émotions populaires, de la révolte des Maillotins (XIVe siècle) aux guerres de Religion (XVIe siècle), de la Fronde (XVIIe siècle) à la Révolution (XVIIIe siècle), durant laquelle y siègent la Commune dite « insurrectionnelle » et le Comité de salut public. Des combats décisifs pour la prise de l'Hôtel de Ville ont lieu en 1830, en 1848, en 1871, et encore en 1944.