Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
D

Duguay-Trouin (René Trouin, sieur du Guay, dit), (suite)

Mais c'est sans doute la prise - réputée extrêmement difficile - de Rio de Janeiro, en 1711, qui constitue sa victoire la plus éclatante. Fait assez inhabituel, cette expédition est financée par des fonds privés, le Trésor royal étant vide. Les combats durent seulement onze jours ; le butin est énorme : 1 350 kilos d'or, des marchandises précieuses, 2 vaisseaux portugais et 60 navires marchands.

Fait chevalier de Saint-Louis en 1707, anobli en 1709, chef d'escadre en 1715, lieutenant général des armées en 1728, membre du Conseil des Indes, Duguay-Trouin met fin à sa carrière après une dernière expédition, couronnée de succès, contre les Barbaresques, en 1731. Ses Mémoires paraissent en 1740. Digne successeur de Jean Bart, il compte parmi les grands marins français.

Dumont d'Urville (Jules Sébastien César),

navigateur et explorateur (Condé-sur-Noireau, Calvados, 1790 - Meudon 1842).

Entré dans la marine en 1807, Dumont d'Urville participe, en 1819-1820, à des missions destinées à améliorer les connaissances hydrographiques relatives à la mer Égée et à la mer Noire ; c'est au cours d'une de ces missions qu'il admire la Vénus de Milo, tout juste découverte, et incite le gouvernement français à l'acquérir. De 1822 à 1825, il effectue un tour du monde aux côtés du marin et hydrographe Duperrey, avant d'entreprendre les deux grands voyages dans le Pacifique qui assureront sa célébrité. Son périple en Océanie, à bord de l'Astrolabe (1826-1829), lui permet à la fois d'étudier l'hydrographie de plusieurs îles (Nouvelle-Zélande, Nouvelle-Bretagne, Nouvelle-Guinée) et de retrouver dans l'île de Vanikoro, sur les renseignements d'un capitaine anglais, l'épave du navire de La Pérouse. Il tirera de cette expédition un ouvrage en 22 volumes, les Voyages de l'« Astrolabe ». De 1837 à 1840, avec l'Astrolabe et la Zélée, il explore les régions antarctiques et découvre la terre Louis-Philippe, l'île Joinville et la terre Adélie, ainsi baptisée en hommage à sa femme. Nommé contre-amiral à son retour en France, il meurt, peu de temps après, dans la première catastrophe ferroviaire, sur la ligne Paris-Versailles.

Étapes majeures de l'exploration maritime, les deux dernières expéditions de Dumont d'Urville se soldent par un bilan scientifique considérable, qui intéresse à la fois la cartographie, l'ethnologie et les sciences naturelles.

Dumouriez (Charles-François du Perrier, dit),

général (Cambrai, Nord, 1739 - Turville Park, Angleterre, 1823).

D'ancienne noblesse, cet officier fait une carrière honorable sous l'Ancien Régime et accomplit différentes missions diplomatiques et militaires. Sous la Révolution, il affiche des idées patriotes qui servent sa carrière, se lie avec les girondins et devient ministre des Affaires étrangères en mars 1792. Nommé lieutenant général, il remplace La Fayette à la tête de l'armée du Nord en août et remporte les victoires de Valmy et de Jemmapes qui lui permettent d'occuper la Belgique, puis de pénétrer en Hollande en février 1793. Malmené par la contre-attaque autrichienne de mars, il doit se replier en Belgique sur ordre de la Convention, dont il conteste vigoureusement les choix stratégiques. Battu à Neerwinden le 18 mars, il négocie avec le général autrichien Saxe-Cobourg dans le but de retourner ses troupes contre Paris et de rétablir la monarchie au profit de Louis XVII. Le 30 mars, la Convention le convoque à la barre et lui envoie quatre commissaires et le ministre de la Guerre Beurnonville, qu'il livre aux Autrichiens. Mis « hors la loi », Dumouriez tente en vain d'entraîner son armée sur la capitale et passe à l'ennemi le 5 avril.

Cette retentissante trahison, qui marque le retour des coalisés sur le territoire national et intervient au début de l'insurrection vendéenne, déstabilise l'armée, provoque les premières mesures de la Terreur et précipite la chute des girondins. Après avoir erré en Europe, Dumouriez devient le conseiller des Anglais, qui le pensionnent en 1800, et finit ses jours en Angleterre.

Dunkerque (bataille de),

opération qui, du 27 mai à la nuit du 3 au 4 juin 1940, permet l'évacuation de contingents britanniques et français face à l'avancée des troupes allemandes.

Cet épisode marque la fin de la première phase de l'offensive à l'ouest engagée le 10 mai par la Wehrmacht. Le 20, alors que le général Weygand remplace Gamelin, les blindés allemands prennent Amiens et Abbeville, et se dirigent vers Boulogne et Calais, menaçant de couper l'accès des côtes aux Alliés. La rupture du front belge oblige les Britanniques à abandonner Arras dans la nuit du 23 au 24 mai. Jugeant la situation désesperée, lord Gort, commandant du corps expéditionnaire britannique, décide de se replier sur Dunkerque afin d'évacuer ses unités par voie maritime. Cette décision compromet définitivement le plan de contre-attaque conçu par Weygand et contraint l'armée belge à la capitulation, le 28. Entre-temps, Hitler a arrêté, depuis le 24 mai, l'avance de ses blindés, arrivés à 15 kilomètres du port de Dunkerque, une erreur tactique qui profite aux Britanniques. C'est seulement le 26 qu'il autorise les troupes de von Kleist à progresser jusqu'à ce que la ville se trouve à la portée de son artillerie. Le 27, l'évacuation des troupes britanniques (opération Dynamo) commence sous une pluie de grenades et de bombes. Les contingents français ne reçoivent l'ordre de repli que le 29 mai au matin. Le 3 juin, la Luftwaffe cesse son attaque sur Dunkerque, qui tombe le lendemain. Le bilan de l'opération Dynamo est impressionnant : 370 000 soldats alliés, dont 139 000 français, sont rembarqués. Mais 35 000 soldats français sont faits prisonniers et les pertes matérielles sont énormes.

Dupanloup (Félix Antoine Philibert),

prélat et homme politique (Saint-Félix, Haute-Savoie, 1802 - château de Lacombe, Savoie, 1878).

Figure majeure de l'épiscopat français au XIXe siècle, Mgr Dupanloup, né d'une paysanne et d'un père inconnu vraisemblablement d'origine aristocratique, est ordonné prêtre en 1825. Vicaire et catéchiste à l'église de la Madeleine à Paris, puis supérieur du petit séminaire de Saint-Nicolas-du-Chardonnet (1837), il prend part à la bataille pour la liberté de l'enseignement. Nommé évêque d'Orléans en 1849, il effectue une remarquable enquête sur l'état spirituel des populations et s'emploie à réorganiser et à ranimer la vie religieuse du diocèse. Il participe également avec fougue aux affrontements politico-religieux du Second Empire et de la IIIe République naissante : après avoir contribué à l'élaboration de la loi Falloux sur la liberté de l'enseignement (1850), il soutient la cause de l'État pontifical contre la politique italienne de Napoléon III, est élu député du Loiret à l'Assemblée nationale de 1871, œuvre en vain à la tentative de restauration de la monarchie, démissionne en 1872 de l'Académie française pour protester contre l'élection de Littré et est nommé sénateur inamovible en 1875. À l'intérieur de l'Église, il combat l'influence du journal l'Univers de Louis Veuillot et du catholicisme intransigeant, tente d'atténuer les aspérités du Syllabus des erreurs modernes de 1864 et participe au concile Vatican I, où il appartient à la minorité hostile à la proclamation de l'infaillibilité pontificale. Léon XIII songeait à le faire cardinal lorsqu'il meurt en 1878.