Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
P

plébiscite,

consultation directe de tous les citoyens qui doivent se prononcer par « oui » ou par « non », et organisée par le pouvoir afin d'asseoir sa légitimité, ou, plus rarement, afin de fixer le statut international d'un territoire.

En référence à une institution de la Rome antique, le terme n'est utilisé qu'à partir de 1851. La procédure est assez proche de celle du référendum, repris des idées de Rousseau et inauguré par la Constituante, dont, toutefois, le champ d'application est plus large et la connotation plus neutre. En France, le plébiscite est attaché au nom des Bonaparte, qui l'ont utilisé, systématiquement et semblablement, pour conférer la légitimité populaire à l'établissement puis à la confirmation de leur hégémonie, conformément au pouvoir constituant du peuple français : ainsi, en 1800 et 1851, pour valider un pouvoir issu d'un coup d'État ; en 1804 et 1852, pour consacrer la fondation de l'Empire (Bonaparte avait également organisé un plébiscite sur le consulat à vie, en 1802) ; enfin, en 1815 et 1870, bien après les consultations précédentes, pour faire approuver la libéralisation du régime.

Des différences existent cependant entre les pratiques plébiscitaires des deux Bonaparte. En effet, le premier organise des consultations caractérisées par la mise en application préalable du texte proposé, par la falsification des résultats (1800, 1804) et par la faible participation d'ensemble (35 %) ; seul le plébiscite de 1802 montre une popularité certaine du régime, du fait du retour à la paix. Quant à Louis Napoléon Bonaparte, président de la République élu au suffrage universel (1848) mais fidèle à la tradition consulaire, il prétend avoir déclenché le coup d'État du 2 décembre 1851 pour « rendre la parole au peuple » ; et, malgré les circonstances, le résultat du plébiscite du 14 décembre, qui prévoit une alternative « démocratique » en cas d'échec, est incontestable : avec un taux de participation de 80 %, le « oui » l'emporte avec plus de 7 millions de voix. Le plébiscite est inhérent au régime qui se met alors en place, dans lequel le chef de l'État entretient une relation directe et personnelle avec le peuple, auquel il a toujours le droit de faire appel : d'où, en plus des trois plébiscites - triomphaux -, le projet de renouveler l'adhésion populaire à chaque changement de souverain et la transformation de chaque élection en plébiscite (candidature officielle). Tout comme les plébiscites relatifs aux rattachements du comté de Nice et de la Savoie (avril 1860), ces scrutins permettent d'affirmer le caractère national de l'Empire et de flatter le patriotisme.

Le plébiscite, discrédité par l'échec final des deux Empires, a été flétri par les républicains, qui y ont vu une manipulation de l'opinion publique et un instrument de dictature (pressions sur l'électorat, précipitation du vote...). Il disparaît après 1870, mais la réintroduction par de Gaulle de la pratique référendaire a inquiété les partisans de la tradition républicaine.

Pleven (René),

homme politique (Rennes 1901 - Paris 1993).

Cet industriel proche de Jean Monnet rejoint Londres peu après l'appel du 18 juin 1940, et contribue au ralliement de l'Afrique-Équatoriale française à la France libre. Investi de nombreuses responsabilités (notamment aux Finances et aux Colonies) par le général de Gaulle, il est membre du Comité français de Libération nationale (CFLN) et du Gouvernement provisoire de la République française (GPRF), où ses propositions, politiquement indolores, pour juguler l'inflation (recours à l'emprunt) sont préférées à celles, plus drastiques, prônées par le ministre de l'Économie Pierre Mendès France. Il quitte le gouvernement en même temps que de Gaulle, en janvier 1946.

Député des Côtes-du-Nord à partir de 1945, d'abord sous l'étiquette Union démocratique et socialiste de la Résistance (UDSR), dont il est l'un des fondateurs, il est surnommé « Petit Bleu de Bretagne », car il est autant chrétien militant que républicain laïque. En raison de la situation internationale, marquée par les débuts de la guerre froide, il accepte un rapprochement avec la « troisième force », devient ministre de la Défense (1949 et 1952-1954) et président du Conseil (juillet 1950-février 1951, et août 1951-janvier 1952). Ce partisan convaincu de l'Europe propose d'instituer une Communauté européenne de défense (CED), projet qui sera finalement repoussé par l'Assemblée en 1954. En 1958, il vote l'investiture du général de Gaulle et préconise le « oui » au référendum de ratification des institutions de la Ve République (il doit quitter l'UDSR, qui appartient au « cartel des non »), mais, centriste libéral, il reste volontairement à l'écart du gouvernement. Il se rallie à la candidature de Georges Pompidou à l'élection présidentielle de 1969, devient alors garde des Sceaux et se retire en 1973, après sa défaite aux élections législatives.

Plombières (entrevue de),

rencontre secrète, les 20 et 21 juillet 1858, dans la ville d'eaux de Plombières (Vosges), entre l'empereur Napoléon III et le comte Cavour, Premier ministre du Piémont.

Cet événement capital dans les relations franco-italiennes fixe les formes du soutien que la France apportera aux Piémontais pour unifier la Péninsule.

Après l'échec des tentatives unitaires menées contre l'Autriche en 1848-1849, Cavour a entrepris de réaliser l'unité de l'Italie par des moyens économiques, militaires, politiques et diplomatiques. Or Napoléon III, qui rêve de restaurer l'influence française dans la Péninsule, est disposé à tenter l'aventure italienne, comme l'en a pressé, avant son exécution, le carbonaro Orsini, auteur d'un attentat meurtrier contre l'empereur en janvier 1858. L'accord est scellé autour de cinq points : la France interviendra militairement contre l'Autriche ; le Piémont formera un royaume de Haute-Italie en annexant la Lombardie, la Vénétie, Parme et Modène ; la France recevra la Savoie et Nice ; un royaume d'Italie centrale sera créé ; la souveraineté du pape sur Rome sera garantie.

Vainqueur de l'Autriche à Magenta et à Solferino, respectivement les 4 et 24 juin 1859, Napoléon III, inquiet des réactions des catholiques français, signe le 8 juillet un armistice à Villafranca. L'unification de l'Italie se poursuit cependant grâce à l'élan du Risorgimento et à l'impétuosité de Garibaldi. Par le traité de Turin (24 mars 1860) et après consultation des habitants par plébiscite, la France annexe la Savoie et Nice. Le 14 mars 1861, Victor Emmanuel II, roi de Piémont-Sardaigne, est proclamé à Turin roi d'Italie : une nouvelle nation est née.