physiologiste (Saint-Julien, Rhône, 1813 - Paris 1878).
Monté à Paris en 1834 après avoir été employé d'officine à Lyon, il renonce à une éphémère vocation littéraire et entreprend des études de médecine. Reçu docteur en 1843, il se détourne de l'hôpital pour se consacrer à la recherche. Préparateur, puis suppléant de François Magendie au Collège de France, il lui succède en 1855 à la chaire de physiologie expérimentale. Dans ses premiers travaux, il met en évidence le rôle du suc gastrique et du pancréas dans la digestion et, surtout, la fonction glycogénique du foie, expliquant ainsi magistralement, dans sa thèse, le mécanisme du diabète sucré (Recherches sur une nouvelle fonction du foie considéré comme organe producteur de matière sucrée chez l'homme et les animaux, 1853). Dans ses leçons au Collège de France, à la faculté des sciences de Paris puis au Muséum d'histoire naturelle, il expose - recourant volontiers à la vivisection - des recherches pionnières sur la physiologie du système nerveux, la chaleur animale et les mécanismes de régulation du vivant (Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine, 1856). Ainsi se dessine le concept central de l'œuvre bernardienne, celui de « milieu intérieur » : constitué par les secrétions internes - le sang et la lymphe - et réglé par l'activité nerveuse, il offre au vivant, par sa stabilité, « une possibilité d'autonomie relativement aux variations de ses conditions d'existence dans le milieu extérieur » (Canguilhem). Quant à l'Introduction à l'étude de la médecine expérimentale (1865), elle promeut une méthode expérimentale critique, fondée sur l'idée « d'observation provoquée », sur le travail du doute et de la contre-épreuve.
L'œuvre de Claude Bernard constitue un jalon essentiel dans l'histoire de la compréhension du vivant et celle de la médecine. Elle reconnaît un déterminisme propre aux fonctions biologiques et invite à penser la maladie non plus comme une importation dans l'organisme « d'entités morbides » mais comme le dérèglement de phénomènes normaux, obéissant à des lois assignables. Affranchissant la physiologie aussi bien des réductions mécanistes d'origine cartésienne que des doctrines vitalistes (Barthez, Bichat), Claude Bernard l'institue comme la science expérimentale spécifique des corps vivants et de leur déterminisme. Zola s'en inspirera, important en littérature cet « homme physiologique » sur lequel il érigera le « système » naturaliste (le Roman expérimental, 1880).