Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Satire (

ou Satyre) Ménippée, pamphlet politique collectif dirigé contre la Ligue et publié en 1594 ; il est dû aux chanoines Jacques Gillot et Pierre Le Roy, à l'humaniste Jean Passerat, à l'érudit Florent Chrestien, aux juristes Gilles Durant, Nicolas Rapin et Pierre Pithou.

Baptisée ainsi en référence au philosophe cynique grec Ménippe, connu pour son style satirique, cette œuvre pleine de verve naît dans le Paris des guerres de Religion : sous l'impulsion du duc de Mayenne, la Sainte Ligue a convoqué en février 1593 les états généraux pour « élire un roi » afin d'écarter du trône Henri de Navarre (futur Henri IV), héritier légitime mais chef du parti protestant. La Satire Ménippée représente l'opinion du parti des « politiques », catholiques modérés opposés à l'extrémisme des ligueurs - qu'ils accusent de collusion avec le roi d'Espagne Philippe II - et favorables à un compromis avec les huguenots. Cette œuvre composite, qui fait alterner les morceaux d'éloquence juridico-politique les plus solennels et les bouffonneries scatologiques à la Rabelais, relate la session des états généraux du 10 février 1593 : tandis que les discours des ligueurs reflètent le cynisme profond de leurs motivations, la rhétorique cicéronienne d'un dénommé d'Aubray, personnage représentant le parti modéré, invoque les principes de la continuité dynastique et relativise la question de l'appartenance religieuse de l'héritier du trône. La Satire Ménippée atteste l'effort de la bourgeoisie humaniste pour sortir de l'impasse sanglante où les guerres de Religion ont enfermé la France plus de trente années durant.

Savary (Jacques),

négociant (Doué, Anjou, 1622 - Paris 1690).

Savary est resté célèbre pour son œuvre normative et pédagogique qui couronne une carrière juridique, commerciale et financière, et accompagne l'épanouissement du capitalisme commercial.

Issu d'une famille réputée d'origine noble, mais marchande depuis le XVIe siècle, Savary se frotte de droit chez un procureur, puis un notaire parisien, avant de s'établir comme marchand mercier dans la capitale. Entré dans la clientèle du surintendant des Finances Fouquet, il délaisse dès 1656-1658 le commerce pour la gestion des Fermes des douanes. Mais sa position ayant été compromise à la chute de son protecteur en 1661, il se consacre à une activité de conseil. C'est ainsi qu'en 1670 il adresse à Colbert deux mémoires (diagnostic et remèdes) sur les législations du royaume en matière de commerce. Ses propositions inspirent l'édit pour le commerce des marchands en gros et en détail de mars 1673 (appelé couramment « Ordonnance sur le commerce de terre », « Code marchand » ou « Code Savary »), complété en 1681 par des dispositions portant sur le commerce maritime. Il l'illustre en 1675 par un vade-mecum à l'usage des commerçants et des banquiers, également très utile aux magistrats : le Parfait négociant, ou Instruction générale pour tout ce qui regarde le commerce tant de France que de l'étranger. Complété en 1688 par un recueil de jurisprudence, Parères, ou Avis et conseils sur les plus importantes matières du commerce, l'ouvrage est réédité de nombreuses fois jusqu'à la fin du XVIIIe siècle et traduit en plusieurs langues.

Deux des dix-sept enfants de Savary, Philémon-Louis (1654-1727), chanoine de Saint-Maur, et Jacques Savary des Brûlons (1657-1716), inspecteur de la douane de Paris, se font connaître par un Dictionnaire universel de commerce, d'histoire naturelle, d'art et de métiers, paru en 1723, puis réédité et augmenté à plusieurs reprises.

Savary (Jean Marie René),

duc de Rovigo, général de division et homme politique (Marcq, Ardennes, 1774 - Paris 1833).

Fils d'un capitaine de cavalerie, formé au collège de Metz, il est engagé volontaire en 1790, rejoint l'armée du Rhin en 1793, puis participe à l'expédition d'Égypte et à la seconde campagne d'Italie, au cours de laquelle il se fait apprécier de Bonaparte, dont il devient l'un des aides de camp. Il est dès lors désigné pour des missions de confiance et des enquêtes délicates et parvient à déjouer en Vendée une nouvelle rébellion chouanne, si bien qu'il est promu général de brigade le 29 août 1803. Durant le procès du duc d'Enghien (mars 1804), il précipite le jugement et hâte l'exécution de la sentence. Général de division en février 1805, il est occupé à des tâches strictement militaires durant la campagne de 1806, avant d'être chargé de missions diplomatiques en Russie, puis en Espagne, où Napoléon souhaite placer son frère Joseph sur le trône. Nommé le 3 juin 1810 à la tête du ministère de la Police générale en remplacement de Fouché, Savary établit un étroit réseau de surveillance et procède à de nombreuses arrestations d'opposants potentiels. Il ne parvient pas pour autant à déjouer la conspiration du général Malet (1812). Retiré lors de la première Restauration, il incite l'Empereur à reprendre le pouvoir. Il est condamné à mort par contumace en 1816 pour son action durant les Cent-Jours et passe l'essentiel de la Restauration en exil, non sans avoir proposé ses services à Louis XVIII. Le régime de Juillet l'emploie de nouveau, en tant que commandant en chef en Algérie, mais ces fonctions ont rapidement raison de sa santé.

Savoie,

région historique correspondant aux départements actuels de la Haute-Savoie et de la Savoie.

Berceau des Allobroges à l'époque gauloise, la Savoie est conquise par les Romains en 121 avant J.-C. Le nom de Sapaudia (d'où dérive « Savoie ») apparaît au IVe siècle. Devenue burgonde aux Ve et VIe siècles, elle est annexée par les Mérovingiens, puis fait partie de la Lotharingie sous les Carolingiens.

L'essor de la maison de Savoie.

• Au XIe siècle, les comtes de Savoie profitent du contrôle qu'ils exercent sur les routes alpines pour constituer un État indépendant, à cheval sur les deux versants des Alpes. Le premier de cette lignée est Humbert Ier « Blanches-Mains », comte de 1027 à 1048. Ses successeurs reconnaissent l'autorité de l'empereur germanique, qui accorde l'érection du comté de Savoie en duché (1416). Les ducs de Savoie jouent sur les intérêts divergents de leurs voisins : la France, le Saint Empire romain germanique et les États italiens. Ainsi, en 1419, Amédée VIII incorpore le Piémont à ses États. La seconde moitié du XVe siècle peut être considérée comme une période d'apogée pour la Savoie, dont la dynastie se lie à toutes les familles royales occidentales.