Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
R

Ravaillac (François),

régicide, assassin d'Henri IV (Angoulême 1578 - Paris 1610).

Fils d'un petit juriste d'Angoulême, élevé par une mère très pieuse, François Ravaillac est un « intellectuel besogneux », successivement clerc de justice, valet de chambre et maître d'école, vivant dans un état proche de la mendicité. Profondément dévot, il tente d'entrer dans les ordres, mais il est rejeté par les feuillants, auxquels ses « visions » le rendent suspect, puis par les jésuites. Il se croit investi de la mission de délivrer la France du « tyran » Henri IV, coupable à ses yeux de protéger les protestants et de vouloir faire la guerre au pape. Après plusieurs tentatives infructueuses, il revient à Paris en 1610 dans l'intention d'exécuter son projet, alors qu'Henri IV s'apprête à entrer en guerre contre le Saint Empire. Le 14 mai 1610, profitant d'un encombrement qui immobilise la voiture royale dans la rue de la Ferronnerie, il poignarde le roi, qui expire presque immédiatement. Arrêté et torturé, Ravaillac nie obstinément avoir été l'instrument d'une conspiration ourdie par les jésuites et par l'Espagne. Si son geste semble bien être celui d'un individu isolé, il doit être mis en relation avec la diffusion des thèses légitimant le tyrannicide, développées notamment par les jésuites Mariana (De rege et regis institutione, 1598) et Sâ (Institutions des confesseurs, 1593), et qui influencèrent de nombreux « Ravaillac en puissance » (Roland Mousnier). Au terme d'un procès instruit par le parlement de Paris, Ravaillac est condamné le 27 mai à être écartelé et brûlé. Le même jour, le parlement fait condamner par la Sorbonne les thèses de Mariana, dont l'ouvrage sera brûlé le 8 juin.

Ravenne (bataille de),

bataille remportée par l'armée française sur les troupes hispano-pontificales le 11 avril 1512.

Elle marque l'aboutissement d'une campagne restée dans l'histoire comme l'un des premiers exemples modernes de la guerre de mouvement. Attaquée en janvier 1512, à l'est, par les Vénitiens et menacée, au sud, par les troupes de la Sainte Ligue mise sur pied par le pape Jules II, l'armée française de Lombardie, commandée par Gaston de Foix, mène une contre-offensive qui lui permet en un mois de reprendre tour à tour les places de Bologne, de Brescia et de Ravenne. Décidé à s'ouvrir le chemin de Rome, le brillant chef de guerre français provoque alors une bataille rangée, qu'il voudrait décisive, le 11 avril 1512.

Le combat, opposant deux armées de vingt mille hommes chacune, est l'un des plus violents et des plus meurtriers des guerres d'Italie. Pour la première fois, l'utilisation de l'artillerie est une des clés de la victoire : les canons du duc de Ferrare, allié des Français, éclaircissent les rangs ennemis, préparant puis soutenant les assauts des lansquenets et de la cavalerie lourde. Toutefois, dans une dernière charge - inutile - contre l'infanterie espagnole qui se replie en bon ordre, Gaston de Foix, dont l'intelligence tactique va de pair avec le respect de valeurs chevaleresques d'un autre temps, trouve la mort. La rivalité entre les capitaines français ainsi que leur manque de clairvoyance ôtent alors à l'armée victorieuse les bénéfices de son succès, l'acculant à une retraite sans gloire au-delà des Alpes, provoquant la perte du duché de Milan quelques semaines seulement après cette victoire à la Pyrrhus.

Raynal (Guillaume Thomas François, abbé),

philosophe et historien (Lapanouze, Rouergue, 1713 - Chaillot 1796).

Entré chez les jésuites, devenu prêtre, il quitte la vie sacerdotale en 1747 et se rend à Paris où, correspondant littéraire de la cour de Saxe-Gotha, il fréquente Helvétius et le baron d'Holbach. Il publie plusieurs ouvrages, parmi lesquels l'Histoire du stathoudérat et l'Histoire du parlement d'Angleterre, qui lui valent d'être nommé membre de l'Académie des sciences et des belles-lettres de Berlin (1750) puis membre de la Société royale de Londres (1751). Parallèlement à ces activités, il est responsable de la rédaction du Mercure de France (1750-1754). C'est en 1770 qu'il publie l'ouvrage qui le rendra célèbre : Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes. Avec dix-sept éditions, au moins, entre 1772 et 1780, et un tirage de vingt-cinq mille exemplaires environ, ce livre, auquel Diderot a participé, prend violemment position contre l'esclavage et, plus généralement, contre l'Ancien Régime. L'ouvrage est bientôt interdit par un arrêt du Conseil (1772). La deuxième édition est mise à l'Index (1774). Parti en Suisse pour surveiller une nouvelle publication de l'ouvrage, Raynal est décrété de « prise de corps » à son retour à Paris. L'Histoire est condamnée par le parlement de Paris à être brûlée (1781). L'abbé se réfugie alors à l'étranger avant d'obtenir l'autorisation de revenir en France, en 1784. Élu député du Tiers de Marseille aux états généraux de 1789, il renonce à ce mandat en raison de son âge. Il devient membre de l'Institut en 1795.

réaction nobiliaire,

offensive des fractions les plus anciennes du second ordre contre les roturiers et les anoblis.

Parfois relayée par le pouvoir royal, la réaction nobiliaire s'est manifestée de façon récurrente, entre les guerres de Religion et la fin de l'Ancien Régime.

Les frustrations politiques et sociales de la gentilhommerie.

• L'intégration massive de riches roturiers dans les rangs de la noblesse au cours du XVIe siècle, l'essor corrélatif des officiers dans l'appareil d'État et le sentiment de s'appauvrir nourrissent l'insatisfaction sociale de la gentilhommerie : comme en témoignent notamment ses doléances présentées aux états généraux de 1614, elle n'attend pas seulement du roi l'extension de ses privilèges fiscaux, l'abolition de la vénalité des offices, le monopole des dignités curiales et des charges de baillis et de sénéchaux, sans préjudice du tiers des offices de cours souveraines ; elle réclame aussi une répression accrue des usurpations de noblesse et la restriction des anoblissements ; en outre, pour renforcer la visibilité de la hiérarchie sociale, elle exige l'interdiction du port de la soie par les roturiers et obtient des lois somptuaires, dont la multiplication prouve l'inapplication.