Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
F

Fontevraud (abbaye de), (suite)

Robert d'Arbrissel désire que la communauté soit égalitaire ; lui-même n'accepte que le titre de « maître » et se fait assister par une prieure. En 1115, il désigne comme supérieur une femme, Pétronille de Chemillé (morte en 1149), qui devient la première abbesse de Fontevraud. Issues pour la plupart de l'aristocratie, les moniales affirment leur prééminence par leur nombre et par leur vocation contemplative. Les statuts, souvent remaniés, accentuent la séparation des moniales et des frères, en renforçant l'assujettissement des seconds, ce qui suscite quelques réactions. L'abbesse dispose de tous les pouvoirs. Fontevraud présente donc la particularité d'être un ordre double, mais où l'égalité primitive a laissé la place à une subordination des religieux aux religieuses et à l'abbesse, qui dirige la congrégation.

L'abbaye de Fontevraud a bénéficié de la protection des Plantagenêts, qui en ont fait leur nécropole : l'église renferme les gisants d'Henri II, d'Aliénor d'Aquitaine et de Richard Cœur de Lion. L'ordre a été supprimé pendant la Révolution, en 1792.

Formigny (bataille de),

bataille, qui, le 15 avril 1450, voit la victoire des troupes françaises de Charles VII sur l'armée anglaise commandée par sir Thomas Kyriel, dans le village normand de Formigny, près de Bayeux.

C'est un épisode important de la campagne de Normandie, dernière phase de la guerre de Cent Ans. Face aux succès remportés par les Français dans les derniers mois de 1449 en haute Normandie et dans le Cotentin, les Anglais envoient sur le continent une armée commandée par Kyriel, qui débarque à Cherbourg le 15 mars 1450. Celui-ci reprend plusieurs places du Cotentin avant d'envahir le Bessin. Le comte de Clermont, Jean de Bourbon, est alors nommé lieutenant général par Charles VII et reçoit pour mission de stopper la progression anglaise. Le 15 avril, il quitte Carentan et se dirige vers Bayeux pour éviter la jonction de Kyriel et du duc de Somerset, lieutenant du roi Henri VI d'Angleterre. En route, son armée rencontre les Anglais à Formigny. Le combat s'engage sans tarder. L'issue en reste indécise jusqu'à l'arrivée, vers midi, du connétable Arthur de Richemont, qui permet la victoire française. Selon un relevé officiel dressé par les hérauts français, les Anglais auraient perdu près de 4 000 hommes dans la bataille.

La victoire ouvre à Charles VII la route de Bayeux et de Caen, qui capitule le 1er juillet, puis celle de Cherbourg, qui tombe le 12 août.

Fort-Chabrol,

nom donné à un événement qui illustre l'agitation nationaliste entourant l'affaire Dreyfus à l'extrême fin du XIXe siècle.

Le 23 février 1899, Paul Déroulède et ses troupes de la Ligue des patriotes ont tenté en vain de déclencher un putsch. Au début du mois d'août, Déroulède prépare une nouveau coup de force et mobilise divers groupements, parmi lesquels figurent en bonne place les antisémites conduits par Jules Guérin, directeur du journal l'Antijuif. Des contacts sont pris avec des milieux militaires restés farouchement antidreyfusards. Le général de Négrier, qui vient d'être relevé de ses fonctions, semble bien avoir été pressenti comme chef militaire de la rébellion, chargé d'entraîner la foule vers l'Élysée le moment venu. Un gouvernement est même prévu en cas de victoire, dans lequel on retrouve nombre de héros de la cause antidreyfusarde. Mais, face à cette tentative de coup d'État fort bien bien préparée, le gouvernement de Waldeck-Rousseau riposte rapidement : le 12 août, 37 nationalistes, parmi lesquels Déroulède, sont arrêtés. Des perquisitions sont effectuées chez les chefs royalistes et 17 prévenus sont déférés devant la Haute Cour. Dans le même temps, Jules Guérin, entouré de militants antisémites, se retranche dans une maison de l'impasse Chabrol, acte de « résistance » qui lui vaut une certaine popularité. Waldeck-Rousseau ayant refusé de faire donner l'assaut, les assiégés ne se rendent que le 20 septembre. Cet épisode tragi-comique met fin à une agitation nationaliste parisienne commencée depuis septembre 1898.

fortifications.

Au gré d'une longue histoire militaire, la France s'est dotée de tout l'éventail des systèmes de fortifications occidentaux.

De la tour aux fortifications bastionnées.

• Les premiers châteaux forts apparaissent au Xe siècle, limités à une simple tour de bois édifiée sur une butte de terre, la « motte ». Au cours des siècles suivants, la tour, devenue donjon, est construite en pierre et peut atteindre jusqu'à 30 mètres de hauteur. Le donjon est, quant à lui, entouré d'une enceinte carrée ou rectangulaire associée à des tours d'angle. Pour la défense du domaine royal, les premiers Capétiens font ainsi construire les châteaux forts du Louvre, de Montlhéry, de Dourdan et d'Étampes. Les villes sont également protégées, les portes faisant l'objet d'un soin particulier, comme celles des châteaux : dotées d'un pont-levis, elles sont précédées d'un système défensif, l'échauguette.

À partir du XVe siècle, l'apparition du boulet métallique remet en cause la fortification médiévale verticale. Allemands et, surtout, Italiens sont alors à l'origine d'innovations appliquées par la suite en France. Tours et murailles s'abaissent ; les fossés gagnent en profondeur ; les terres de déblai sont utilisées pour remparer, c'est-à-dire pour renforcer les murs. Des plates-formes surmontent les tours et sont dotées de pièces d'artillerie. Pour le flanquement, c'est-à-dire la défense latérale des villes ou des forteresses, les Italiens adoptent le tracé bastionné inauguré en France à Cambrai.

Vauban et sa postérité.

• À partir du XVIIe siècle, l'école française, représentée par le chevalier de Ville, le comte de Pagan et, surtout, le maréchal de Vauban, assure la relève. Nommé commissaire général des fortifications, Vauban organise la défense des nouvelles frontières du royaume en Franche-Comté, en Alsace et en particulier dans le Nord, avec le célèbre « Pré carré », ainsi que sur certains points du littoral. Il fait preuve d'éclectisme, se libère souvent du tracé bastionné et sait s'adapter à la nature du terrain. Par une ironie de l'histoire, cet artilleur de talent met au point un système d'attaque efficace des nouvelles fortifications, qu'il s'efforce lui-même de neutraliser par l'édification d'une seconde enceinte extérieure, constituée de bastions indépendants portant l'artillerie.