Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Dauphiné,

ancienne province de France qui s'étend des Alpes au Rhône, entre la Savoie, au nord, et la Provence, au sud.

Formé de la partie septentrionale de la province romaine de Narbonnaise, le Dauphiné est dominé durant le haut Moyen Âge par les Burgondes, puis par les Francs, avant d'être inclus, en 843, dans le royaume de Lothaire. Il n'acquiert son identité qu'à partir du XIe siècle, lorsqu'en 1029 le comté de Vienne, détaché du royaume de Bourgogne, est inféodé pour sa partie méridionale au comte d'Albon, Guigues Ier le Vieux. Agrandi à partir de ce noyau initial, le Dauphiné, situé dans la mouvance impériale, en vient, sous l'autorité des maisons d'Albon, de Bourgogne et de La Tour du Pin, à former une principauté remarquablement organisée, surtout en matière de justice et d'administration. Son existence autonome est cependant de courte durée  : en 1349, par le traité de Romans, Humbert II, endetté et privé de descendance, est conduit à céder son État au petit-fils de Philippe VI, le futur Charles V, en échange de 200 000 florins. Dès lors, le Dauphiné constitue l'apanage traditionnel du fils aîné du roi de France, qui prend le titre de dauphin sans pour autant y résider. Seul le futur Louis XI, écarté par son père après le soulèvement avorté de la Praguerie, se consacre en personne au gouvernement de la province. Devenu roi, il en conserve l'administration et prépare ainsi son intégration au royaume. Cette pratique, reprise par ses successeurs, aboutit à l'union définitive du Dauphiné à la couronne en 1560.

David (Jacques Louis),

peintre et homme politique (Paris 1748 - Bruxelles 1825).

« Citoyen-artiste » au service de la Révolution, puis peintre officiel de l'Empire, David est un personnage controversé. Prix de Rome en 1774, il s'impose dans les années 1780 comme le chef de file du néoclassicisme, s'opposant au style rococo et remettant à la mode l'Antiquité classique, notamment avec le Serment des Horaces (1784), qui le rend célèbre. S'il n'est guère théoricien, il est ambitieux et s'enthousiasme d'emblée pour la Révolution, exposant après la prise de la Bastille un Brutus, héros de la République romaine, resté fameux. En 1790, tandis qu'il ébauche la grande toile du Serment du Jeu de paume, qui restera inachevée, il combat l'Académie royale de peinture au sein de la Commune des arts, groupe d'artistes réunis sur son initiative. Membre du Club des jacobins, signataire, après Varennes, d'une pétition républicaine, il est élu en septembre 1792 à la Convention, où, député montagnard, il joue un rôle important au sein du Comité d'instruction publique. Il régente alors la politique artistique, participe à l'élaboration du calendrier républicain, œuvre à l'« épuration » et à la suppression des Académies et de sociétés littéraires, et conçoit les scénographies des grandes fêtes révolutionnaires de l'an II. Parallèlement, il continue d'exalter dans ses toiles les vertus civiques et les martyrs de la liberté : Lepeletier de Saint-Fargeau, Joseph Bara, et surtout Marat assassiné, représenté mort dans sa baignoire (1794). Membre à partir de septembre 1793 du Comité de sûreté générale, où, s'il est responsable des arrestations, il est peu influent et souvent absent. Il échappe à la guillotine après la chute de Robespierre, peut-être grâce à sa neutralité lors du 9 Thermidor, puis est incarcéré en 1795. Sous le Directoire, il abandonne la politique pour se consacrer à la peinture, mais il lit Babeuf et lance des pétitions en faveur des jacobins ou contre le pillage des objets d'arts par l'armée d'Italie. Il est cependant fasciné par Bonaparte, qu'il peint comme un héros antique et qui le nomme en 1804 premier peintre de l'Empire. Dès lors, David glorifie le règne, réalisant portraits et œuvres d'apparat, tels le Sacre (1807) ou la Distribution des aigles (1810). En 1816, au retour de Louis XVIII, ce régicide demeuré fidèle à Napoléon est contraint de s'exiler en Belgique, où il finit ses jours après avoir dominé la peinture révolutionnaire et impériale et formé dans son atelier nombre d'élèves, tels Topino-Lebrun, Gros, Gérard, Girodet ou Ingres.

Davout (Louis Nicolas),

maréchal de France, duc d'Auerstaedt et prince d'Eckmühl (Annoux, Yonne, 1770 - Paris 1823).

Né dans une famille de noblesse ancienne mais sans gloire, Davout entre en 1785 à l'École militaire de Paris et commence sa carrière en 1788 comme sous-lieutenant dans le régiment de Royal-Champagne cavalerie. Il soutient avec enthousiasme la cause de la Révolution et s'enrôle, en 1791, parmi les volontaires de l'Yonne, où il est bientôt élu chef de bataillon. Fait général de division dans l'armée du Nord en 1793, il refuse cette promotion, se conformant en cela au décret qui exclut les nobles de l'armée. Il reprend du service après le 9 Thermidor et se lie d'amitié avec Desaix, qui le présente à Bonaparte en 1798. Désigné pour commander une brigade de cavalerie à l'armée d'Orient, il s'illustre durant la campagne d'Égypte. Après son retour, il est promu général de division dès le 3 juillet 1800. En 1801, il devient général de la Garde des consuls et épouse la sœur du général Leclerc. Il s'affirme comme l'un des véritables hommes de guerre de l'entourage de Napoléon et joue un rôle décisif à Austerlitz. En 1806, par ses succès à Auerstaedt, il facilite la victoire d'Iéna. Il est nommé gouverneur général du grand-duché de Varsovie en 1807. Il se distingue particulièrement à Eckmühl en 1809. Maréchal d'Empire en 1804, duc en 1808, prince en 1809, il est alors au faîte de la société impériale. Chargé de la défense de Hambourg en 1813, il n'évacue la place que le 27 mai 1814, sur ordre du roi, après la chute de Napoléon. Il est le seul des maréchaux à ne pas prêter serment à Louis XVIII. Ministre de la Guerre et pair de France durant les Cent-Jours, il est exilé à Louviers en décembre 1815. Toutefois, il reçoit le bâton de maréchal fleur de lys en 1817 et reprend place à la Chambre des pairs en 1819.

Déat (Marcel),

homme politique (Guérigny, Nièvre, 1894 - San Vito, près de Turin, 1955).

Intellectuel doctrinaire, normalien revenu pacifiste de la guerre, qu'il a faite à 20 ans, Marcel Déat est l'une des figures montantes de la SFIO au début des années vingt. Élu député de la Marne en 1926, il fait parti, quelques années plus tard, des théoriciens d'un « néosocialisme » qui prône l'union anticapitaliste des classes moyenne et ouvrière, et la participation des socialistes au gouvernement. Il se marginalise peu à peu, rompt avec Léon Blum, et finit par être exclu du parti en 1933. Éphémère ministre de l'Air dans le gouvernement Sarraut (janvier-juin 1936), hostile au Front populaire, Déat est alors à la recherche d'un modèle, et, tels le radical Gaston Bergery et l'ex-communiste Jacques Doriot, s'oriente vers un régime de type autoritaire. Le 4 mai 1939, il retrouve des accents pacifistes dans un article publié par l'Œuvre sous le titre « Faut-il mourir pour Dantzig ? ». Le 10 juillet 1940, il vote les pleins pouvoirs à Pétain, appuie ensuite Pierre Laval, crée le Rassemblement national populaire (RNP) en 1941, et, au terme d'une « dérive fasciste » (Philippe Burrin), joue finalement la carte allemande. Le RNP, qui compte tout au plus 20 000 adhérents actifs à son apogée en 1942, permet néanmoins à Déat de diffuser un programme favorable au parti unique, au corporatisme, à « l'épuration et à la protection de la race ». Nommé ministre du Travail et de la Solidarité nationale par Laval en 1944, passé en Allemagne à la Libération, Marcel Déat trouve refuge, ensuite, dans un couvent en Italie, où il finit ses jours.