Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
C

Crédit lyonnais,

banque par actions créée en 1863 par des hommes d'affaires de la région lyonnaise d'esprit saint-simonien, qui s'inspirent de l'expérience des frères Pereire, fondateurs du Crédit mobilier. Henri Germain en est le président jusqu'en 1905.

En attirant l'épargne du public avec force publicité sur les multiples formes de dépôts rémunérés, en proposant l'usage du chèque (introduit par la loi du 14 juin 1865) et grâce à la création d'un réseau de succursales (1 460 en 1913), la banque devient, dès 1878, le premier établissement de crédit de France. En 1892, il détient 38 % des dépôts des 42 banques publiant un bilan. En 1913, il possède encore 23 % des avoirs des 99 plus grandes banques. En 1914, drainant une épargne bourgeoise considérable, il se place, par son bilan, non seulement devant les autres banques françaises (notamment la Société générale) mais également devant la prestigieuse Lloyds Bank anglaise. Il n'est devancé que par la Société générale, de 1918 à 1929, et par la Banque nationale de Paris (BNP) depuis la création de cette dernière en 1966 (par fusion de la BNCI - Banque nationale pour le commerce et l'industrie - et du Comptoir national d'escompte de Paris). Par la loi du 2 décembre 1946, le Crédit lyonnais est nationalisé, en même temps que les trois autres principales banques de dépôts (Société générale, BNCI, Comptoir national d'escompte). Dans les années quatre-vingt-dix, il connaît une crise exceptionnellement grave, due à des pertes dans l'immobilier et à une politique de diversification dans des opérations d'investissement internationales aventureuses, menée dans la décennie précédente. Retourné au secteur privé en 1999, le Crédit lyonnais a été repris en totalité par le Crédit agricole en 2003.

Crémieu (édit de),

édit de François Ier portant sur l'organisation de la justice (19 juin 1536).

Le système judiciaire hérité du Moyen Âge se caractérisait par une extrême complexité. Aux juges seigneuriaux étaient venus s'ajouter, à mesure que le domaine royal s'agrandissait, des prévôts royaux et, à un échelon supérieur, des baillis ou sénéchaux, sans que leurs rapports aient été clairement définis, ce qui était source d'innombrables conflits de juridiction. C'est à cette confusion que tente de remédier l'édit de Crémieu, qui délimite les compétences respectives des prévôtés et des bailliages : ces derniers deviennent l'instance ordinaire pour toutes les causes concernant les nobles, les bénéfices ecclésiastiques, le domaine royal ainsi que les cas royaux (lèse-majesté, faux monnayage, assemblées illicites, révoltes, etc.) ; quant aux prévôtés, elles conservent, en première instance, les causes des non-nobles, mais leurs sentences sont susceptibles d'appel devant les bailliages. Ceux-ci peuvent même, en certaines occasions, se saisir directement de certaines causes prévôtales.

En limitant la juridiction des prévôtés, l'édit de Crémieu simplifie la hiérarchie judiciaire au profit des bailliages ; il s'inscrit dans l'action législative des Valois-Angoulême, qui entendent renforcer l'emprise de l'administration royale. Mais, comme tant d'autres, il restera en partie lettre morte et nécessitera des rappels ultérieurs (1559, 1574, 1581), tant à cause de la résistance des officiers de justice que de la monarchie elle-même, laquelle, surtout pour des raisons financières, s'accommode de la multiplicité des offices judiciaires.

Crémieux (Isaac Moïse, dit Adolphe),

avocat et homme politique (Nîmes 1796 - Paris 1880).

Issu d'une famille juive séfarade pleinement intégrée à la société française, Crémieux est resté célèbre pour le décret portant son nom, qui donne la citoyenneté française aux juifs d'Algérie. Avocat brillant, libéral convaincu, pétri des idéaux de la Révolution, il se bat sur deux fronts : la défense de la République, d'une part ; l'intégration de ses coreligionnaires, d'autre part. Il acquiert sa stature publique sous la monarchie de Juillet, en tant qu'avocat à la Cour de cassation. Député de Chinon en 1842, ministre de la Justice dans le gouvernement provisoire en 1848, il est vite écarté de la vie politique, puis entre dans l'opposition, après avoir condamné le coup d'État de Louis Napoléon Bonaparte (dont il avait soutenu la candidature à la présidence de la République). Lié à la franc-maçonnerie, il est également président du Consistoire, et milite en faveur des juifs de France et d'Orient : il obtient ainsi la suppression du more judaico (serment spécifique imposé aux juifs amenés à plaider devant un tribunal), fait libérer plusieurs israélites arrêtés à Damas, crée la première école talmudique au Caire, et contribue à la fondation de l'Alliance israélite universelle, qu'il préside à partir de 1864. Réélu député à Paris en 1869, il retrouve le poste de ministre de la Justice dans le gouvernement de la Défense nationale en 1870, année où il s'illustre par son célèbre décret.

Creusot (Le),

grand ensemble sidérurgique et grande ville industrielle situés en Saône-et-Loire, dont la principale phase de développement s'ouvre dans les années 1830.

L'histoire industrielle du Creusot commence à la fin du XVIIIe siècle, avec l'exploitation systématique du charbon local pour fondre le fer. Travaillant essentiellement pour la marine, la Fonderie royale, qui compte 4 hauts fourneaux et quelque 1 500 ouvriers en 1785, fait déjà figure de géante industrielle. Mais Le Creusot prend son véritable essor après le rachat des usines par un groupe d'hommes d'affaires, dont deux Lorrains, les frères Schneider. En 1836, ils fondent la Société des forges et ateliers du Creusot.

L'âge d'or.

• Le développement du Creusot est étroitement lié à l'histoire de la dynastie Schneider. En 1838, on y construit la première locomotive française. Symbole de l'industrialisation de la France dans la seconde moitié du XIXe siècle, la compagnie connaît une croissance quasi ininterrompue jusqu'à la Première Guerre mondiale. Sous la présidence d'Eugène Schneider, qui fut aussi maire et député du Creusot, ainsi que vice-président puis président du Corps législatif sous le Second Empire, la variété et la qualité de ses produits (matériel ferroviaire, artillerie) permettent de concurrencer la très puissante sidérurgie anglaise.