Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
A

Agobard (saint),

archevêque de Lyon (Espagne, vers 769 - Lyon 840).

Probablement d'origine wisigothique, Agobard naît en Espagne au moment où Charlemagne devient roi. Il est élevé dans l'entourage de l'archevêque de Lyon, Leidrade, à qui il succède en 816. Dès lors, il est l'un des personnages les plus importants du règne de l'empereur Louis le Pieux, fils de Charlemagne. Héritier de la première renaissance carolingienne, il se fait le défenseur de la vocation universelle de la royauté, de l'unité de l'empire et des peuples que gouverne l'empereur. Au nom de ce dernier principe, il prend parti pour Lothaire, fils aîné de Louis le Pieux, dans le conflit qui l'oppose à son père sur la part d'héritage du futur Charles le Chauve, né d'un second lit. En prêtant son concours à la déposition de Louis le Pieux, en 833, il va pourtant à l'encontre de l'unité impériale. L'échec de Lothaire le conduit à l'exil en Italie de 835 à 838. Théologien, il écrit contre les juifs, contre les superstitions et contre les hérétiques, notamment les adoptianistes, qui soutiennent que le Christ a été adopté et non engendré par le Père. En défendant un pouvoir théocratique, Agobard contribue fortement à la confusion entre action politique et pouvoir religieux.

I

agrariens,

mouvements politiques qui défendent les propriétaires terriens.

Selon Pierre Barral, la naissance de l'agrarisme français date de « la victoire de la révolution industrielle », en 1860, bien avant l'introduction de ce mot dans le lexique national (1885). Le terme est utilisé d'abord pour décrire des réalités politiques étrangères à la France : le parti agrarien allemand, né des réflexes protectionnistes des propriétaires, ou les théoriciens agrariens américains prônant la redistribution des terres par l'État. Les agrariens conjuguent la défense d'intérêts économiques, l'apologie du mode de vie harmonieux de « l'ordre éternel des champs », ainsi que l'affirmation de la cohésion paysanne au-delà des différences sociales et des clivages nés de l'urbanisation et de la prolétarisation.

Des années 1860 aux années 1930, ils développent des structures paternalistes pour montrer que les campagnes ne sont ni dominées économiquement ni exclues du jeu politique. Après la naissance, en 1867, de la Société des agriculteurs de France, les propriétaires encouragent la création locale de sociétés de cultivateurs. Avec la loi de 1884, qui légalise les syndicats, une fédération organise ce syndicalisme agraire de notables : l'Union centrale des syndicats agricoles, dont le siège est rue d'Athènes à Paris, compte, en 1912, un million d'adhérents, inégalement répartis dans le pays. Face à la « Rue d'Athènes », qui se dit apolitique mais soutient les positions de la droite conservatrice, le « Boulevard Saint-Germain » (Paris) regroupe les syndicats agricoles républicains, rassemblés en 1910 dans la Fédération nationale de la mutualité et de la coopération agricoles. Dans les deux cas, il s'agit d'un syndicalisme interclasses qui s'oppose au socialisme.

Après 1930, les thèmes agrariens étant désormais associés au recours à l'intervention de l'État, la défense du monde agricole devient ouvertement celle des exploitants. La direction de l'agrarisme échappe aux anciens notables, et le progrès pour tous constitue un argument de propagande pour la Confédération générale de l'agriculture (CGA). Dans les années soixante, marquées par la crise agricole, ces agrariens - qui se veulent davantage chefs d'entreprise que paysans - se partagent en deux tendances principales : les conservateurs et modérés (FNSEA), et les tenants d'une politique de réformes socio-économiques (CNJA). Entre le Second Empire et la Ve République, les agrariens ont souligné, grâce au mythe de l'unité paysanne, le poids du modèle rural et la permanence des enjeux politiques que représente une population agricole pourtant vouée au déclin.

Aguesseau ou Daguesseau (Henri François d'),

homme politique et magistrat (Limoges 1668 - Paris 1751).

 Issu d'une famille de parlementaires, il est le fils d'Henri, intendant du Languedoc et conseiller d'État. Après une formation juridique, il devient avocat général au parlement de Paris (1691), puis procureur général (1700). Sa science du droit, son éloquence et la qualité de ses interventions dans de nombreux domaines, entre autres ceux de la fiscalité et du commerce, lui valent une grande considération. Par sa défense pointilleuse du gallicanisme, il devient un des adversaires les plus redoutables de la politique catholique de Louis XIV. Opposé à la publication de la bulle Unigenitus (1713), il encourt même quelque temps la disgrâce du roi.

En 1717, il est nommé chancelier par le Régent. Son désaccord au sujet de l'adoption du système de Law entraîne sa mise à l'écart. L'échec de l'expérience provoque son rappel en 1720, mais son hostilité au « principal ministre », le cardinal Dubois, lui vaut derechef d'être privé des Sceaux en 1722. Il retrouve la dignité de chancelier en 1737, avant de démissionner en 1750.

D'Aguesseau fut un des meilleurs juristes de son temps. Il s'est consacré à la réforme du droit écrit, après une large consultation des parlements, qui préfigure celle du Code civil. Certaines de ses ordonnances, entre autres celles sur les donations (1731), les testaments (1735) et les substitutions (1747), inspireront les législateurs du XIXe siècle. À ce titre, il se trouve statufié, à côté de Michel de L'Hospital, devant l'Assemblée nationale.

aides,

impôts perçus au Moyen Âge, sous le régime féodal, et sous l'Ancien Régime. À l'origine, les aides sont dues par le vassal à son seigneur dans quatre cas : paiement de la rançon du seigneur s'il est fait prisonnier, adoubement de son fils aîné, mariage de sa fille aînée, départ en croisade. D'abord exceptionnel, l'impôt devient rapidement régulier, et se transforme en taxe indirecte perçue sur des biens de consommation - essentiellement les boissons, les alcools et les textiles, mais aussi le papier, le bois, le bétail, l'huile et le savon. Son montant ne va cesser d'augmenter, jusqu'à la fin de l'Ancien Régime. Le mode de perception adopté est extrêmement complexe jusqu'au XVIIe siècle, et nécessite la création d'une cour, de corps de courtiers-jaugeurs, d'inspecteurs... À partir du XVIIe siècle, cet impôt est affermé, à l'instar de la taille. Toutefois, le mode de perception et le montant varient selon les provinces, car, au XVe siècle, certaines d'entre elles avaient racheté une partie ou l'intégralité des droits qu'elles devaient payer. Ces inégalités régionales, qui illustrent la très grande complexité du système fiscal monarchique, contribuent à rendre cet impôt très impopulaire, comme le montrent les cahiers de doléances de 1789. Les aides disparaissent sous la Révolution.