camp de concentration bâti pendant la Seconde Guerre mondiale à Natzwiller, près du lieu-dit Struthof, au sud-ouest de Strasbourg, en Alsace alors annexée par l'Allemagne.
Sa construction est décidée dès septembre 1940, dans le but de fournir de la main-d'œuvre pour des carrières de granit.
Les 21 et 24 mai 1941 arrivent au camp deux groupes de déportés en provenance de Sachsenhausen : des condamnés de droit commun et des prisonniers politiques allemands et autrichiens, qui sont affectés à la construction. Le nombre d'internés augmente à partir du printemps 1942. En 1944, ils sont plus de 7 000, divisés en trois commandos chargés de travaux de terrassement et de la construction de routes. Des milliers de détenus supplémentaires sont envoyés en commandos extérieurs, notamment dans la vallée de la Moselle et du Neckar. Le camp comporte dix-huit baraquements, disposés sur deux rangs et en paliers sur une pente de 30 % ; les conditions d'internement y sont extrêmement dures : isolement total, exécutions sommaires, tortures, sous-alimentation et humiliations quotidiennes sont le lot de tous les prisonniers. Le taux de mortalité est particulièrement élevé. Sous la direction du SS Hauptsturmführer Hüttig jusqu'en février 1942, puis de Zill jusqu'en octobre 1942, suivi de Josef Kramer et enfin de Fritz Hartjenstein à partir de mai 1944, 200 SS tiennent le camp, dont 150 sont affectés à la surveillance. Ils sont secondés par des détenus, en général de droit commun, aussi cruels que leurs geôliers.
Les Nacht und Nebel (« Nuit et brouillard », prisonniers politiques considérés comme particulièrement dangereux), signalés par d'immenses lettres NN barbouillées en rouge sur leurs vêtements, sont soumis à un régime extrêmement sévère. Les premiers NN français arrivent en juillet 1943, en trois convois (167 hommes). Ils sont rejoints d'avril à fin août 1944 par de nombreux autres, dont plus d'une centaine de membres du réseau Alliance, qui seront exécutés.
Le tribunal militaire de Metz a établi, dans son audience du 15 juin 1954, qu'en trois ans et demi sont morts, au camp de Natzwiller, 4 471 Français, 4 500 Polonais, 508 Néerlandais, 353 Luxembourgeois, 307 Belges ainsi que des Allemands, Autrichiens, Tchèques, Russes, Norvégiens et Italiens, dont le nombre n'a pas été évalué. Les morts étaient incinérés dans un four crématoire, d'abord mobile, puis fixe à partir d'octobre 1943 et installé à l'intérieur même de l'enceinte électrifiée. Une chambre à gaz fut construite en août 1943, dans les dépendances de l'hôtel du Struthof. Le professeur August Hirt y a gazé 86 Juifs (dont trente femmes), envoyés d'Auschwitz, dans le but d'étudier leurs cadavres, qui, à la Libération, ont été retrouvés à l'université de Strasbourg, conservés dans du formol. D'autres expériences ont été pratiquées par Otto Bickenbach sur des Juifs et des Tziganes, pour tester leur résistance au gaz ou pour vérifier l'efficacité d'injections antityphus.
Du 31 août au 4 septembre 1944, tous les détenus sont évacués à Dachau, en trois convois. Le camp est libéré le 23 novembre et accueille ensuite des miliciens et des Alsaciens accusés de collaboration avec l'Allemagne nazie. Le camp sera rasé le 29 mars 1954. Ne subsistent aujourd'hui que le bunker, le crématoire, la cuisine des prisonniers et la baraque no 1, transformée en musée.