Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
C

Courtrai (bataille de), (suite)

La rivalité entre le comte, allié au menu peuple de Flandre, et le roi de France, qui s'appuie sur ses « collaborateurs » - les leliaerts ou « gens des lys », c'est-à-dire le patriciat urbain -, est très ancienne, et due à des facteurs autant politiques qu'économiques. L'expansion et la centralisation capétiennes menacent en effet cette vieille principauté, et provoquent la rupture du schéma féodal classique : les riches gouvernants des villes flamandes s'opposent au pouvoir de leur seigneur, le comte, en nouant alliance avec le suzerain plus lointain, le roi de France, lequel paraît moins menaçant. Le comte n'a plus, pour résister, qu'à rechercher le soutien des métiers opprimés par la gestion municipale des leliaerts. Le phénomène se complique tout au long du XIIIe siècle de la rivalité franco-anglaise. Les rois de France et d'Angleterre font assaut auprès des vassaux du comte de Flandre pour les attirer dans leur dépendance respective. Sous-jacents, le développement économique de la Flandre et les enjeux qu'il suscite : si le comté importe en effet massivement la laine anglaise pour ses draperies, son principal débouché est le marché français. Depuis Bouvines, où le comte de Flandre appartenait à la coalition adverse et fut fait prisonnier, jusqu'à Courtrai, le roi de France avait pu, dans l'ensemble, préserver ses intérêts. D'où l'effet symbolique du coup d'arrêt mis par les Brugeois en 1302.

Couthon (Georges Auguste),

homme politique (Orcet, Puy-de-Dôme, 1755 - Paris 1794).

Membre du petit groupe des fidèles de Robespierre en l'an II - avec Saint-Just et Lebas -, il joue un rôle de premier plan parmi les montagnards. Avocat et franc-maçon, actif défenseur des humbles et lecteur attentif de Rousseau, il s'engage d'emblée dans la Révolution, malgré une paralysie qui le prive de l'usage de ses jambes en 1791. Membre de la municipalité de Clermont-Ferrand, où il fonde un club jacobin en 1790 et préside le tribunal du district, il est élu député à l'Assemblée législative en 1791, puis, l'année suivante, à la Convention, où il intervient peu. Régicide, il entre au Comité de salut public le 30 mai 1793, fait décréter d'arrestation les girondins le 2 juin. Puis, envoyé en mission en août au siège de Lyon insurgé, il se refuse à exécuter le décret du 12 octobre qui ordonne de détruire la ville. Il fait alors figure de montagnard modéré. Pourtant, après avoir participé activement à la chute des hébertistes et des indulgents, il rédige et fait adopter la loi du 22 prairial an II (10 juin 1794) qui, réformant la procédure du Tribunal révolutionnaire, établit la Grande Terreur : un acte que ses ennemis politiques ne lui pardonneront pas. Le 9 thermidor (27 juillet 1794), il est décrété d'accusation avec Robespierre et Saint-Just, qu'il rejoint à la Commune. Après l'assaut des troupes de la Convention, il est arrêté mais fait une grave chute dans un escalier. Le lendemain, à l'agonie, il est le premier des vingt-deux robespierristes condamnés à périr sur l'échafaud.

coutume.

La coutume représente l'une des formes d'expression du droit positif.

Contrairement à la loi, qui est l'imposition d'une règle à la société par l'autorité souveraine, la coutume est constituée par « un ensemble d'usages d'ordre juridique, qui ont acquis une force obligatoire dans un groupe sociopolitique donné, par la répétition d'actes publics et paisibles pendant un laps de temps relativement long » (John Gillisen). Son importance varie au cours de l'histoire. On peut considérer qu'au XIe siècle, en Europe occidentale, 90 % du droit est coutumier, et 10 %, législatif. Aujourd'hui, les proportions sont inversées, le point de retournement étant situé au XVIe siècle.

Primauté de la coutume.

• Réfléchir sur la coutume suppose que l'on s'arrête sur la France médiévale, son âge d'or. Les sociétés sans écriture ne connaissent nécessairement que le droit coutumier. Aussi, le droit écrit de l'Empire romain laisse-t-il une large place à la coutume en tant que source du droit. La désagrégation des cadres impériaux a pour conséquence la disparition quasi totale de la loi, les « lois barbares » étant plutôt des coutumes mises par écrit (listes de tarifs compensatoires correspondant à certaines infractions). Malgré la volonté législative des premiers Carolingiens, cette situation perdure jusqu'au XIIe siècle. La période qui s'ouvre alors, dans la seconde moitié du XIIe siècle, et se prolonge jusque vers 1280, marque un véritable tournant dans le domaine juridique : multiplication des actes législatifs, seigneuriaux, urbains ou royaux, redécouverte du droit romain, codification du droit canonique, formulation d'un droit objectif (territorial) au détriment du droit subjectif, qui dépend de la personne à qui il est appliqué. Ces éléments tendent à imposer un droit rationnel, et impliquent le passage d'une coutume dont les règles ne sont pas énoncées préalablement à leur application à une coutume réfléchie et mise par écrit. Ce processus se concrétise via une première vague de rédaction de coutumiers, depuis le Très Ancien Coutumier de Normandie (vers 1190), jusqu'à la Coutume de la comté de Clermont-en-Beauvaisis, de Philippe de Beaumanoir (1283). Le mouvement reprend ensuite au XIVe siècle, notamment avec la Très Ancienne Coutume de Bretagne (1330), le Grand Coutumier de France, de Jacques d'Ableiges, et la Somme rurale, de Jean Boutillier, à la fin du siècle. En l'occurrence, il s'agit d'initiatives privées, d'œuvres de praticiens de la justice royale (baillis) ou princière ; elles représentent une tentative, plus ou moins concluante, de dire rationnellement le droit coutumier dans les termes savants et universels du droit romain.

La rédaction des coutumes va freiner l'introduction du droit romain en France. En effet, le partage du royaume entre pays de droit écrit (le Midi) et pays de coutumes (le Nord) date du règne de Saint Louis ; cette démarcation ne signifie pas, au demeurant, que le Midi méconnaît le droit coutumier, mais indique que le droit romain y a force supplétoire.