Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Condé (Louis Joseph de Bourbon, prince de),

émigré contre-révolutionnaire, organisateur du noyau de l'armée des Princes (Paris 1736 - id. 1818).

Cousin de Louis XVI, ce héros de la guerre de Sept Ans, qui connaît une brève disgrâce pour s'être opposé au ministère Maupeou en 1771, se fait d'emblée l'un des principaux animateurs de la Contre-Révolution. Hostile à l'administration royale lors de l'assemblée des notables de 1787, mais farouche défenseur des ordres privilégiés, il refuse, en 1788, le doublement du tiers état et compose le mémoire des princes du sang dénonçant la révolution naissante. En 1789, il fait partie de ceux qui conseillent à Louis XVI le coup de force contre le tiers état et le renvoi de Necker. Émigré dans la nuit du 16 au 17 juillet 1789, il participe activement, avec le comité de Turin, à la conspiration de Lyon de 1790, puis devient l'un des chefs de l'émigration militaire. Il s'installe au début de l'année 1791 outre-Rhin, où il forme sa propre armée - composée de nobles ultras, mais seul corps émigré digne de ce nom -, et appelle à une croisade royaliste. Écarté des opérations militaires de 1792, il obtient, après Valmy, lors du licenciement des armées émigrées, que seul son corps ne soit pas dissous. Celui-ci est alors financé par l'Autriche, puis par la Russie, enfin par l'Angleterre, participe à diverses campagnes et suit les errances de son chef. Après avoir pris une part active dans l'expédition de Quiberon et dans la trahison de Pichegru, Condé combat jusqu'en 1799 avec son armée, qu'il dissout en mai 1801. Retiré en Angleterre, il regagne la France à la Restauration.

Condorcet (Marie Jean Antoine Nicolas de Caritat, marquis de),

mathématicien, philosophe et homme politique (Ribemont, Aisne, 1743 - Bourg-la-Reine 1794).

Issu d'une famille d'ancienne noblesse dauphinoise, éduqué par les jésuites, élève au collège de Navarre, à Paris, Condorcet est distingué par d'Alembert. Il s'impose d'abord par un Essai sur le calcul intégral (1765).

Des Lumières à la Révolution.

• Élu à l'Académie des sciences en 1769, il en devient le secrétaire perpétuel en 1773, composant, avec ses Éloges des savants morts entre 1666 et 1699, une sorte d'histoire des sciences. Lié aux physiocrates (Quesnay, Turgot) et aux Philosophes, fréquentant le salon de Julie de Lespinasse, il rédige pour l'Encyclopédie des articles d'économie politique. En 1775, Turgot le nomme inspecteur général des monnaies. Élu en 1782 à l'Académie française, il participe aux débats et campagnes d'idées précédant la Révolution et ayant trait tant à la liberté économique qu'à la tolérance, aux droits de l'homme, à l'esclavage ou à l'égalité des femmes. En 1786, il épouse Sophie de Grouchy, sœur du futur maréchal, qui tient un salon influent où se rencontrent Chamfort, Beaumarchais, Mirabeau, Adam Smith, Cloots, Beccaria, Jefferson... Membre de la municipalité parisienne en 1790, député de Paris à l'Assemblée législative, Condorcet, d'abord monarchiste constitutionnel, se déclare républicain après le 10 août 1792, année où il publie cinq Mémoires sur l'instruction publique et un Rapport sur le projet de décret sur l'organisation générale de l'instruction publique. Député de l'Aisne à la Convention, il ne vote pas la mort du roi. Ami des girondins, il est décrété d'accusation en juillet 1793 et réussit à se cacher à Paris durant huit mois, rédigeant son Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain, qui ne sera publiée, grâce à son ami Cabanis, qu'en 1795. Contraint de quitter sa retraite, il est arrêté à Clamart, conduit à la prison de Bourg-Égalité (Bourg-la-Reine) où, le lendemain, le 29 mars 1794, on le trouve mort dans sa cellule, par épuisement ou suicide, on l'ignore.

Une philosophie rationaliste du progrès.

• Condorcet prône une science de l'homme, individuel ou collectif, moyen du progrès politique et social, qu'il élabore grâce à l'outil mathématique. Ainsi, ses travaux sur le calcul des probabilités et les statistiques établissent un modèle du vote (Essai sur l'application de l'analyse à la probabilité des décisions rendues à la pluralité des voix, 1785), et sa réflexion aboutit à une mathématique sociale fondant la démocratie par élimination rationnelle des inégalités économiques ou culturelles (Tableau général de la science qui a pour objet l'application du calcul aux sciences politiques et sociales, 1793). De même, ses projets éducatifs visent à créer un système laïque formateur du citoyen dont s'inspirera la IIIe République. Manifeste en faveur de l'idée de progrès, son ouvrage posthume apparaît comme un testament auquel se référeront les Idéologues, dernière génération des Lumières : influencé par le Tableau philosophique des progrès de l'esprit humain de Turgot (1750), conçu comme une introduction à l'histoire des rapports de la science et de la société, ce texte organise l'évolution de l'humanité en dix périodes, où s'effectue son émancipation progressive des entraves nées de la nature ou de l'homme lui-même. Fondée sur la notion de perfectibilité, l'Esquisse est l'affirmation d'une foi indéfectible dans le progrès indéfini des Lumières, de la science et de la technique, et dans un avenir marqué par la rationalité des sciences sociales, instrument véritable de la liberté démocratique.

Condorcet fut pendant presque vingt ans le principal porte-parole de la science officielle en France, jouissant d'une renommée européenne. Il demeure surtout un théoricien de la science et un formulateur des postulats fondamentaux des Lumières. Au cœur de sa pensée, le rôle du savant dans la société le conduisit à tenter de résoudre la tension entre élitisme scientifique et libéralisme démocratique.

confrérie,

association de dévotion, de charité et d'entraide rassemblant des laïcs.

L'émergence des premières confréries est liée, dans le royaume de France, au mouvement communal de la seconde moitié du XIIe siècle. La confrérie, de même que la commune, est une association d'assistance mutuelle entre égaux. Elle apparaît donc au moment où la bourgeoisie des villes tente de mettre en place de nouveaux systèmes de solidarité et de protection qui échappent, en grande partie, au cadre féodal. Elle naît dans les lieux traditionnels de sociabilité urbaine : la paroisse, le quartier, le métier.