Le socialisme français prend place dans le mouvement d'ensemble né au XIXe siècle qui a dénoncé le capitalisme et voulu assurer une répartition plus égale des richesses.
Les premières idées socialistes proprement dites apparaissent dans les années 1830. Les théoriciens du socialisme utopique - Saint-Simon, Fourier, Leroux, Proudhon... - définissent des projets, forts différents, d'organisation de l'économie et de la société, qui, tous, s'opposent au libéralisme. Mais les luttes sociales et les luttes politiques se mêlent pendant plusieurs décennies. Il faut attendre la fin des années 1870 pour que prennent corps les premiers partis socialistes, et les années 1890 pour que ceux-ci remportent leurs premiers succès électoraux. La force de l'idée républicaine, qui impose alors les principaux clivages entre la gauche et la droite, et la faiblesse relative de la classe ouvrière, dans une France majoritairement rurale où l'industrialisation est lente, expliquent la double impossibilité dans laquelle s'est trouvé le socialisme naissant : rompre nettement avec les républicains pour promouvoir un intérêt social propre, ou s'identifier pleinement à la République. Ses caractères originaux en découlent : division en courants idéologiques distincts ; influence doctrinale, notamment le marxisme, jusque dans les années 1970, comme point discriminant ; insuffisance organisationnelle ; faible liaison avec le syndicalisme ; importance de l'implantation municipale et des élus ; rôle clé des dirigeants, qui ont dû toujours chercher une « synthèse ». Ces traits visibles à la fin du XIXe siècle perdurent, pour la plupart, jusqu'à aujourd'hui.
Réforme ou révolution ?
• La participation du socialiste indépendant Alexandre Millerand dans le gouvernement de « défense républicaine » de Waldeck-Rousseau (1899-1901) fait éclater le premier regroupement des partis socialistes en 1901. Deux orientations s'opposent alors : celle du Parti socialiste de France, autour de Jules Guesde mais aussi d'Édouard Vaillant, héritier du blanquisme, qui se veut révolutionnaire, fidèle au marxisme, et condamne le « ministérialisme » ; celle du Parti socialiste français, autour de Jean Jaurès, qui soutient le Bloc des gauches et entend unir les valeurs de la République et du socialisme. Le compromis, imposé par l'Internationale socialiste, qui permet l'unité de 1905, amène la nouvelle Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO) à adopter une déclaration de principe marxiste qui privilégie la lutte des classes et qui se donne pour finalité la socialisation des moyens de production et d'échange. Les controverses demeurent vives sur la question du pouvoir, sur la place des réformes, sur le rôle du syndicalisme, sur les moyens de lutter contre les menaces de guerre. Jean Jaurès, cependant, impose peu à peu son ascendant et prône une synthèse entre les idées de réforme et de révolution, entre le patriotisme et l'internationalisme. Ce socialisme s'avère plus adapté que celui des marxistes intransigeants à un électorat composite où se côtoient ouvriers, paysans, fonctionnaires et intellectuels. À la veillle de la Première Guerre mondiale, le socialisme devient une force notable. Un rapprochement s'esquisse avec la CGT, la centrale syndicaliste révolutionnaire, dans la lutte contre la loi des trois ans (service militaire).