Dictionnaire de la danse 1999Éd. 1999
B

Johannes BRAHMS (1833-1897). (suite)

Brahms ne compose aucune musique expressément pour la scène. Ni ses *valses, ni ses *czardas, ni ses Danses hongroises, dont le caractère de danse se limite à des choix de temps et d'atmosphère, n'ont a priori vocation à être dansées. Elles le seront pourtant souvent. En premier lieu par I. *Duncan (*Valses de Brahms, 1905) qui imprègne durablement l'exercice de sa marque, comme en attestent les dédicaces chorégraphiques de F. *Ashton (Five Brahms Valses in the Manner of Isadora Duncan, 1975) ou R. *Van Dantzig (Isadora, 1977, mus. Brahms). D'autres lui emboîteront le pas, comme R. *Sacchetto dans les années 1910 (Liebesliederwaltzer), R. *Saint Denis dans les années 1920 (Brahms Waltz), C. *Ari dans les années 1930 (Valses de Brahms) et, par la suite, G. *Balanchine (Liebesliederwaltzer, 1960), Ch. *Weidman (Brahms Waltzes, 1967), Mark *Morris (Love Song Waltzes, 1982), E. *Feld (Love Song Waltzes, 1989). M. *Fokine chorégraphiera pour sa part Czardas (1906) tandis que les Danses hongroises seront explorées par M. A. *De Mey (1989 et 1992). Les chorégraphes trouveront leur inspiration dans de nombreuses autres oeuvres de Brahms qui par leur extrême solidité formelle gardent dans le temps la capacité d'émouvoir tout en évitant la facilité.

AM

Sur la musique de Brahms. *Massine (Choréartium, 1933) *Nijinska (Vision, 1943 ; Brahms Variations, 1944) ; *Lifar (Grand Pas, 1953) ; *Chiriaeff (Fête hongroise, 1964) ; *Louis (Proximities, 1969) ; *Cranko (Initials R.B.M.E., 1972) ; *Bruce (Girl with a Straw Hat, 1976) ; T. *Tharp (Brahms-Paganini, 1980) ; *Taylor (Equinox, 1983) ; J. *Neumeier (Regenlieder, 1983) ; *Bintley (Brahms-Haendel Variations, 1990).

Kim Brandstrup (né en 1957).

Danseur et chorégraphe danois.

Après des études universitaires de cinéma, il entre en 1980 à *London Contemporary Dance School. En 1983, il se fait remarquer par une version dynamique des *Noces de I. *Stravinski et forme l'année suivante l'Arc Dance Company à Londres. En 1989, il reçoit le Laurence Olivier Award pour Orfeo. Avec un style plein de force, il aborde des thèmes profondément humains comme dans Mysterier [les Mystères] (1994) et Amor og Psyke [Amour et *Psyché] (1997) créés pour le *Ballet royal danois.

EA

BRAUN(sœurs) :

Lilly B. (1897-1950). Jeannette B. (1898-1964). Léonie B. (?-1953).

Rythmiciennes et danseuses suisses

Diplômées à l'Institut *Jaques-Dalcroze de Genève (1915), Lilly et Jeanne, jouent un rôle de premier plan dans l'évolution de la *rythmique vers une dimension artistique. Les trois sœurs présentent des spectacles en Suisse, en France, en Italie et aux États-Unis en mêlant, au cours de leurs représentations, des éléments de la méthode Jaques Dalcroze à la danse *moderne. Au début des années 1920, elles séjournent longuement à Rome où elles ouvrent une des rares écoles de rythmique et de danse moderne. Elles participent à plusieurs éditions du Festival de théâtre grec à Syracuse (Sicile).

SF

Guillermina BRAVO (née en 1920).

Danseuse, chorégraphe et pédagogue mexicaine.

Elle fait ses débuts en 1936 avec les sœurs *Campobello. En 1948, elle fonde le Ballet national du *Mexique. Influencé par M. *Waldeen, X. *Francis et M. *Graham, son parcours est déterminant pour l'évolution de la danse moderne et contemporaine dans son pays. Créatrice mystique, elle explore par la suite le réalisme expressionniste, la magie des racines mythiques, la vie érotique et onirique de l'homme, ainsi que la logique poétique du langage corporel et chorégraphique. El paraíso de los ahogados (1960), La poderosa vida de la muerte (1964), Matka (1975) et l'Opéra de quat' sous (1977) sont les moments forts de sa production prolifique et exubérante.

IC

Yves BRAYER (1907-1990).

Peintre et scénographe français.

Formé aux Beaux-Arts de Paris, il signe ses premiers décors pour l'Opéra de *Paris en 1942 (*Joan de Zarissa, S. *Lifar). Oscillant entre une figuration légère aux francs coloris et une figuration plus symbolique au trait dramatique, il opte parfois pour une forme de peinture d'Histoire (piliers romans et sculptures antiques) dérivée du style décoratif des *Ballets Russes, notamment pour la reprise de la Tragédie de *Salomé (1954, A. *Aveline).

CD

Autres collaborations. Lifar (Salomé, 1946 ; l'*Amour sorcier, 1947 ; Lucifer, 1948 ; Nauteos, rep. 1954) ; *Charrat (le Bal du destin, 1965).

Bertolt BRECHT (1898-1956).

Dramaturge et metteur en scène allemand.

Son œuvre théorique, soubassement d'une œuvre dramatique très riche, s'étend des années 1920 aux années 1950. Définissant le théâtre comme espace de médiation et non plus d'identification entre le spectateur et le monde représenté, il s'oppose au théâtre dit « bourgeois » qui, dans sa construction même, cherche à masquer l'artifice de la représentation. Il énonce le principe de Verfremdung [distanciation] qui, par le jeu de l'acteur et la construction dramaturgique et scénique, requiert la collaboration intellectuelle et critique du spectateur plus que sa participation émotionnelle. Il opte, de ce fait, pour la forme épique qui, au contraire de la forme dramatique, fait primer la narration sur l'action, l'intérêt aux sinuosités du déroulement sur l'attention passionnée au dénouement. Le texte du théâtre épique pouvant faire l'objet d'un découpage et d'un montage, chaque scène peut exister pour soi dans une structure dramaturgique autorisant, comme au cinéma, l'ellipse, les retours, les sauts et les bonds.

Cette conception, qui influencera profondément le théâtre du xxe siècle, ne sera pas sans effet sur la danse. Découpages textuels ou scéniques, superposition de voix off, interventions d'acteurs intégrés à l'action chorégraphique, décalage entre le texte dit et le geste, autonomie des séquences, mise en évidence des artifices scéniques, ouverture de la scène à des dimensions propres au cinéma et aux arts plastiques : les chorégraphes, notamment dans les années 1980, sauront tirer parti de la distanciation brechtienne pour se libérer des contraintes de la narration classique du ballet et faire émerger une *dramaturgie préservant l'abstraction du mouvement.

Brecht apporte aussi une contribution directe à la scène chorégraphique en collaborant à plusieurs reprises, dans les années 1920, avec la danseuse V. *Gert, dont le style « grotesque » s'accorde avec son sens de la satire sociale. Il écrit également des textes mis en musique par K. *Weill pour les *Sept Péchés capitaux (1933, G. *Balanchine, déc. Kaspar Neher). Ce ballet en sept tableaux, créé au théâtre des Champs-Élysées (Paris) par les Ballets 1933, met en scène un rôle dédoublé, Anna I qui chante (créée par Lotte Lenya) et Anna II qui danse (créée par Tilly Losch), et fait correspondre une danse à chaque tempérament : la paresse (*tarentelle), la fierté (*valse), la colère (*shimmy-*fox trot), la jalousie (*marche), etc. Il sera souvent repris par la suite, notamment par Grita Krätke (19XX, Berlin) avec Gisela May, dans l'esprit du théâtre épique, et par P. *Bausch, qui en donne une autre interprétation en 1976.

UE,AF