Dictionnaire de la danse 1999Éd. 1999
B

Rudolf BODE (1881-1971).

Théoricien du mouvement et pédagogue allemand.

Il étudie au Conservatoire de Leipzig et à *Hellerau (1911). Influencé par la philosophie de L. *Klages et les théories de R. *Laban, il s'oppose en revanche à *Jaques-Dalcroze : pour lui, le rythme prend son origine dans le corps et non dans la musique. Il fonde à Munich l'Institut für Musik und Rhythmus. Militant de la première heure au sein du parti national-socialiste, il devient responsable de l'éducation physique sous le IIIe Reich. Il élabore une méthode, la gymnastique expressive, à mi-chemin entre danse et gymnastique, dans la mesure où elle se compose d'éléments aussi bien sportifs que rythmico-moteurs. Elle repose sur le principe que tout mouvement implique toujours le corps entier, que le mouvement volontaire est en contraste avec le mouvement naturel et que l'unité motrice dans l'espace est garantie par la confluence de l'impulsion dynamique au centre de gravité. Cette méthode est divulguée en Union soviétique par le metteur en scène et cinéaste Sergueï Eisenstein qui le premier en pressent le potentiel artistique.

SF

Bibliographie. R. Bode, Ausdrucksgymnastik, Munich, Beck'sche, 1922 ; S. Franco, " Ginnastica e corpo espressivo, Il metodo di Rudolf Bode ", in Teatro e Storia, vol. XVIII, Il Mulino, Bologne, 1997.

Gertrud BODENWIESER, [ ndn. BONDY G.] (1890-1959).

Danseuse, chorégraphe et pédagogue autrichienne.

Artiste représentative de l'expressionnisme viennois, ses activités dans l'entre-deux-guerres en font un des personnage central de la scène autrichienne. Elle présente son premier programme en 1920 dans une exposition de peinture et rassemble peu après un groupe avec lequel elle compose des chorégraphies qui témoignent d'un regard engagé sur son temps (le Démon Machine, les Masques de Lucifer). Parallèlement, elle introduit la danse moderne à l'Académie de musique de Vienne et inaugure une méthode d'enseignement raffinée qui puise aux sources de *Jaques-Dalcroze, F. *Delsarte, B. *Mensendieck et de R. *Laban. Juive, elle perd son poste en 1938 et tourne dans le monde entier avec son groupe avant de s'installer en Australie, où elle fonde une nouvelle école.

LGui

Bibliographie. G. Bodenwieser, The New Dance, Sydney, 1969.

Antoine BOËSSET (1587-1643).

Compositeur français.

Il cumule diverses charges auprès de *Louis XIII et compose de nombreux airs de cour de style polyphonique (plus de deux cents nous sont parvenus) qui trouvent notamment place dans les ballets de cour auxquels il collabore, dont le *Ballet de la Délivrance de Renaud (1617), le Ballet des Bacchantes (1623), le Ballet des Voleurs (1624) et le *Grand Bal de la Douairière de Billebahaut (1626). Son fils Jean-Baptiste Boësset (1614-1685) lui succède auprès de *Louis XIV et compose des airs, notamment pour le *Ballet de la Nuit (1653), le Ballet du Temps (1654), le Ballet des Plaisirs (1655), le Ballet de *Psyché (1656), le Ballet d'Alcidiane (1658) et le Ballet de la Raillerie (1659).

RL

Constantin Bogdanov (v.1809-1877).

Danseur et pédagogue russe.

Élève des Écoles théâtrales de Moscou et de *Saint-Pétersbourg, il danse au *Bolchoï où il est le partenaire de F. *Hullin-Sor, E. *Sankovskaïa, Alexandra Voronina-Ivanova, Tatiana Karpakova dans de nombreux ballets, dont ceux de A. *Glouchkovski et F. Hullin-Sor (dans la *Sylphide de cette dernière notamment). À sa retraite, il assure l'organisation des tournées de sa fille N. *Bogdanova.

ESou

Nadejda Bogdanova (1836-1897).

Danseuse russe.

Elle se forme avec son père C. * Bogdanov et se produit dès l'âge de dix ans dans diverses villes de Russie. En 1850, elle étudie avec J. *Mazilier à *Paris où elle débute à l'Opéra dans un pas de deux monté par lui, obtenant ensuite un grand succès dans la *Vivandière de *Saint-Léon. Elle regagne la Russie lorsqu'éclate la guerre de Crimée, et danse de 1855 à 1864 à Saint-Pétersbourg et Moscou, surtout dans les ballets romantiques (la *Sylphide, *Giselle, la *Esméralda, Gazelda ou les Tziganes, *Catarina ou la Fille du bandit, *Faust), ainsi que dans Météore de Saint-Léon en 1861. À partir de 1857, elle fait aussi des tournées à Paris, Berlin, Naples, Varsovie, Budapest. Elle quitte la scène en 1867.

ESou

Fritz BÖHME (1881-1952).

Historien de l'art, critique de danse allemand.

Découvreur de l'*Ausdruckstanz et penseur nazi de la danse, il est l'écrivain le plus marquant de l'entre-deux-guerres. Outre ses rubriques quotidiennes dans le Deutsche Allgemeine Zeitung (1919-1945), ses conférences et ses ouvrages, il organise les congrès de la danse (1927-1930), soutient les recherches sur la *cinétographie Laban et rassemble un cercle d'artistes et d'intellectuels. Partageant la vision du déclin de l'Occident d'Oswald Spengler, il voit dans " l'homme dansant du présent " la figure capable de renouer avec un rythme cosmique originel, vierge des marques de la technique. Avec l'arrivée du nazisme, il croit venu l'avènement d'une nouvelle " culture du mouvement ", qui fera du rythme un fondement de l'ordre social et étatique. Membre du parti nazi, il dirige en 1933-1934 le Bureau de la danse folklorique de la Force par la joie, puis est engagé aux Deutsche Meisterstätten für Tanz pour enseigner l'histoire de la danse, ouvrir une bibliothèque et un fonds d'archives et diriger le Deutsche Tanzzeitschrift, journal de la danse du ministère de la Propagande, tâches qu'il assume jusqu'en 1945.

LGui

Bibliograhie. " Vom musiklosen Tanz ", in Der tanzende Mensch, Backhaus, Leipzig, 1921 ; Der neue Tanz, Velhagen und Klasing, Bielefeld, 1925 ; Tanzkunst, Dessau, Dünnhaupt, 1926 ; Der Tanz der Zukunft, Delphin, Munich, 1926 ; Entsiedlung der Geheimnisse. Zeichen der Seele zur Metaphisik der Bewegung, Kinetischer Verlag, Berlin, 1928 ; Neue deutsche Tänze, Teubner, Leipzig, 1934 ; Rudolf von Laban und die Enstehung des modernen Tanzdrama, Hentrich, Berlin, 1996.

Gerhard BOHNER (1936-1992).

Danseur et chorégraphe allemand.

Il étudie la danse à partir de 1954 et rencontre, à *Berlin, M. *Wigman, qui le fascine. Cependant, l' *Ausdrukstanz étant alors bannie des théâtres allemands, il décide d'orienter sa carrière vers la danse *classique. Engagé au Th. de Manheim en 1958, il est remarqué par T. *Gsovska, qu'il suit à Francfort, puis à Berlin, où il devient soliste au Ballet de la Deutsche Oper (1961-1971). Il danse avec J. *Cranko et K. *MacMillan, créant des rôles de composition appréciés. Il commence à chorégraphier en 1964 et gagne, en 1969, le prix de *Cologne avec Silvia frustriert, un duo à caractère érotique avec S. *Kesselheim, sa danseuse fétiche. Il crée pour différents théâtres, obtient le prix de la Critique et, en 1972, tente d'introduire un groupe de création indépendant au sein de l'Opéra de Berlin. Malgré le succès de Die *Folterung der Beatrice Cenci (1971), il se heurte à l'opposition de la direction. Avec plusieurs de ses danseurs, il poursuit le projet au Tanztheater de Darmstadt où, de 1972 à 1975, il initie des expériences basées sur la création collective et la participation du public. Choqués, les responsables culturels décident de dissoudre l'ensemble. Il en conçoit un dépit qu'il porte à la scène avec Machen = Machtlos (1975). Chorégraphe invité du *NDT et du Tanztheater de *Wuppertal, il codirige avec R. *Hoffmann le Tanztheater de Brême dès 1978, créant des œuvres étonnantes, comme Bilder einer Ausstellung (1981). Écarté de ce poste en 1981, il entreprend une carrière de soliste avec *Schwarz Weiß Zeigen (1983). Chorégraphe de sa génération le plus en conflit avec l'institution théâtrale allemande, il est l'initiateur de la révolution esthétique qui mène au *Tanztheater, ouvrant un chemin à l'expérimentation, et comprend, le premier, la nécessité d'un lien avec le passé, posant la question essentielle du renouveau de l'expressionnisme par le biais de l'abstraction dans la lignée de G. *Palucca, D. *Hoyer et son premier maître, Wigman. À plusieurs reprises, il se confronte au travail d'O. *Schlemmer : en 1977, il recrée avec succès Das *triadische Ballett et, en 1986, Bauhaustänze - Abstrakte Tänze.