Dictionnaire de la danse 1999Éd. 1999
W

Onna WHITE (née en 1922). (suite)

ESe

Autres chorégraphies pour le théâtre musical. Fanny (1956) ; Whoop-up (1958) ; Take Me Along (1959) ; Irma la Douce (1960) ; Half a Six Pence (1965) ; Mame (1966) ; Ilya Darling (1967) ; Gantry (1970, chor. et m. en sc.) ; I Love My Wife (1977) ; Charlie Girl (1986, Londres).

Grete WIESENTHAL (1885-1970)

Danseuse, chorégraphe et pédagogue autrichienne.

Danseuse classique, elle quitte en 1907 l'Opéra impérial de *Vienne et fonde un groupe avec ses sœurs (Elsa, Bertha et Martha), qui enthousiasme le public viennois par ses valses fluides et aériennes, interprétées sur des musiques de J. *Strauss. Après un passage chez *Jaques-Dalcroze (1910-1911), elle se sépare de ses sœurs et tourne en Europe avec son partenaire Anton Birkmeyer. À partir des années 1920, elle s'oriente vers la chorégraphie, poursuit sa collaboration avec M. *Reinhardt (la Chauve-souris, 1929) et le festival de Salzbourg (1930-1959) et voyageant avec son groupe (1938-1956). La technique de danse qu'elle développe dans son école (1919-1934), puis à l'Académie de musique de Vienne (1934-1951), intègre dans une base classique des mouvements de valse, des tours et des sauts et se caractérise par une grande musicalité. Son œuvre figure au répertoire de l'Opéra de Vienne.

LGui

Bibliographie. G. Wiesenthal, Der Aufstieg, Berlin, 1919 ; Der ersten Schritte, Vienne, 1947.

Mary Wigman, [Wiegmann Marie, dite ] (1886-1973).

Danseuse, chorégraphe et pédagogue allemande.

Fille de commerçants aisés de Hanovre, éduquée en partie en Grande-Bretagne, très douée pour la musique, ce n'est qu'en 1910 qu'elle rompt avec sa famille « bourgeoise », mue par le désir de « dire avec son corps », confirmé par ce qu'elle a vu des sœurs *Wiesenthal. Elle étudie auprès d'É. *Jacques-Dalcroze à Hellerau/ Dresde, où elle est très proche du mouvement expressionniste Die Brücke. Insatisfaite de la démarche de Jacques-Dalcroze, elle va à Ascona, introduite par E. *Nolde, travailler avec R. *Laban. Élève, puis collaboratrice de ce dernier, elle partage ses travaux et les périples du groupe de *Monte Verità. Elle côtoie le groupe de peintres Der blaue Reiter et, brièvement, les dadaïstes. En 1919, elle se lance dans sa carrière de défricheuse autonome ; parmi ses premiers solos figurent : Danses extatiques, Danses hongroises et Danses de la nuit. Après des débuts difficiles, dans un pays exsangue, en pleine mutation culturelle et sociale, elle connaît un succès, une notoriété croissantes, prônant la danse *expressive comme art de la scène et activité d'amateur. La jeunesse se passionne pour l'*Ausdruckstanz et la *Tanzgymnastik. En 1920, elle ouvre son école à Dresde, qui devient rapidement un bouillon de culture, et essaime dans d'autres villes. Parmi les premiers élèves, membres de sa compagnie, nombre de danseurs sont aussi devenus célèbres : H. *Holm, H. *Kreutzberg, G. *Palucca, etc. Elle fait maintes tournées, dont trois aux États-Unis entre 1930 et 1933, avec un succès notoire. En 1930, elle crée *Totenmal, une impressionnante chorégraphie chorale. En 1931, Holm ouvre l'École Wigman à New York. Wigman, tout en manifestant un désintérêt pour la politique, participe à plusieurs congrès nationaux, soucieuse de voir la danse s'épanouir comme art et activité éducative. Elle compose Totenklage [Lamentation pour les morts] pour les Olympiades de Berlin, en 1936. Mais, affichant son indépendance et son désaccord, elle perd la bienveillance du parti nazi, et se trouve bientôt à l'index, son école sous tutelle, puis vendue, son art décrété dégénéré. Elle choisit cependant de rester dans son pays, qu'elle aime. Elle donne ses derniers solos en 1942, et s'installe à Leipzig, où elle enseigne à l'Académie de musique. Elle y connaît les angoisses de la guerre, puis les graves difficultés matérielles propres à la zone d'occupation soviétique. Elle ne cesse d'enseigner, invincible passion. Puis elle peut reprendre son indépendance, créer des chorégraphies pour ses élèves, des mises en scène, comme *Orphée et Eurydice de C. W. Gluck. Elle intervient pendant plusieurs années dans les grands stages d'été en Suisse, où de nombreux danseurs viennent du monde entier travailler avec elle. En 1950, elle s'installe à Berlin-Ouest, y ouvre une école, un des rares instituts à promouvoir alors la danse d'*expression en Allemagne. Elle y enseigne pendant près de vingt ans, et prend part à la vie culturelle. Elle compose plusieurs chorégraphies, dont Chorische Studien [Scènes chorales] en 1953, paraissant elle-même sur scène, puis des œuvres majeures telles que Carmina burana (1955), Alceste (1958), le *Sacre du printemps. Elle se retire en 1968, et meurt cinq ans après, affaiblie par l'âge, la maladie et la cécité croissante.

Wigman, chorégraphe prolifique, danseuse bouleversante, a donné à cette danse « libre » sa véritable dimension, en tant qu'art de la scène, et expression de l'individu. Art majeur, autonome, notamment par rapport à la musique - elle a prôné la danse en silence et a eu comme collaborateurs successifs les musiciens Will Goetze, Hanns Hasting, Ulrich Kessler -, portant très loin les éléments du langage chorégraphique analysés par Laban. « Temps, espace, énergie, voici les éléments qui donnent vie à la danse [...] le souffle est le grand maître mystérieux qui règne inconnu. » Véritable architecte et amoureuse de l'espace, elle a vastement développé la chorégraphie de groupe. Proche de l'avant-garde expressionniste, elle a souvent dit la mort, dans l'angoisse, le déchirement ou l'extase. Dans ses premières œuvres, elle a fréquemment évoqué le macabre et le grotesque médiéval, et utilisé des masques. « Le masque cache et révèle, ne tolère aucune déviation... » Elle a privilégié la célébration, « le divin principe de la vie », une certaine mystique, mais la joie, la sensualité, la poésie, l'humour n'étaient pas absents de son œuvre, ni de sa manière d'être en tant que personne.

Elle était également peintre et poète, et, surtout, fut une immense pédagogue. Elle ne prônait pas de « méthode », ni une « technique » spécifique, mais cherchait à conjuguer la découverte et l'analyse, connaître l'« extase du travail lucide », « à ouvrir à mes élèves des chemins qui mènent au profond d'eux-mêmes ». Il émane de ses nombreux et pertinents écrits sagesse et intuition, en particulier dans le Langage de la danse, où elle révèle la genèse de certaines de ses danses, ainsi que l'émouvante Lettre à un jeune danseur, son credo pédagogique. « Une des plus grandes figures de l'art moderne », écrivait John Martin en 1939.