Danseur et chorégraphe hongrois.
Élève de N. *Guerra à Budapest, E. *Cecchetti à Milan, Hertha Feist et R. *Laban à Berlin (1926), il débute comme danseur à la galerie d'art Der Sturm à Berlin en 1928. Excellent danseur dans les rôles démoniaques typiques de l'*expressionnisme, il s'affirme comme chorégraphe à Augsburg (1933-1934) et Düsseldorf (1934-1935). Contraint de fuir l'Allemagne nazie en décembre 1935, il se réfugie à Budapest où il est acclamé comme danseur avec sa partenaire L. *Karina. Primo ballerino et chorégraphe à l'Opéra de *Rome (1938-1945), il y conduit une formidable bataille pour la réhabilitation artistique du ballet alors réduit en Italie à un conventionnalisme sans poésie. Il révèle des danseurs de grande technique et de fort tempérament (dont A. *Radice et U. *Dell'Ara) et crée un grand nombre de ballets, collaborant pour certains avec quelques-uns des peintres et compositeurs italiens majeurs du XXe siècle. Après la guerre, on le retrouve à la *Scala (*Follia di Orlando, 1947), au Mai musical florentin, au théâtre des Champs-Élysées (le Portrait de *Don Quichotte, 1947), au *Teatro Colón de Buenos Aires (1948 et 1949), au Brésil où il est chorégraphe de la compagnie IVo Centenário à São Paulo (1953-1954), au Teatro Massimo de *Palerme (1958-1959), à l'Opéra de *Cologne (1960-1963) et au Staatsoper de *Vienne (1964-1966 et 1971-1974).
Dès ses débuts en Allemagne, étranger à l'idéologie dominante de la danse *moderne, il se bat pour une synthèse des langages classique et moderne. Il propage l'esthétique de S. *Diaghilev, dont il propose le répertoire dans de nouvelles versions : l'*Oiseau de feu (1933, Augsbourg) la *Légende de Joseph (1933, Augsbourg), le *Tricorne (1933, Augsbourg), *Pulcinella (1933, Augsbourg), *Petrouchka (1933, Budapest), le *Fils prodigue (1934, Düsseldorf) ou encore plus tard à Rome le *Sacre du printemps (1941), Mavra (1942). S'il expérimente la danse sans musique (Ballata senza musica, 1950, déc. T. *Scialoja), celle-ci tient toutefois une place centrale dans son travail. Il crée ainsi *Marsia (1948, mus. Luigi Dallapiccola) à Venise, la première européenne d'*Orpheus (1948, mus. I. *Stravinski), Coup de feu (1952, Grand B. du Marquis de *Cuevas) sur une musique spécialement composée par G. *Auric et signe la création mondiale de Moïse (1957, mus. D. *Milhaud). Il revisite aussi des œuvres anciennes comme les Créatures de *Prométhée (1933) et les *Petits Riens (1933) et crée quelques ballets concertants comme Mystères (1951, mus. B. *Bartók). Son style tend vers l'équilibre classique mais il peut aussi puiser son inspiration dans les couleurs du folklore (La Giara, mus. A. *Casella, 1939), les lazzi de la commedia dell'arte (Scarlattiana, 1939, mus. Casella, déc. Gino Severini) et surtout dans les problématiques existentielles (le *Mandarin merveilleux, 1942 ; Coro di morti, mus. G. *Petrassi, 1942 ; le *Boléro, 1944). Il touche au mystère de la poésie quand la vibration expressive n'est pas contredite par la retenue classique (Estri, 1968, mus. Petrassi, déc. C. *Cagli) et sait user avec intelligence et une rare culture de toutes les ressources scéniques (*Perséphone, 1970). Metteur en scène (Woyzeck, 1942 ; *Macbeth, 1956), théoricien, animateur inspiré et infatigable, il compte à la fin des années 1950 parmi les chorégraphes européens majeurs.